mercredi 23 mai 2012

Yémen : Al-Qaïda déracine des milliers de Yéménites dans le sud

Quand les partisans d’Al-Qaïda ont déferlé il y a un an sur la province d’Abyan dans le sud du Yémen, ils ont jeté sur les routes des milliers de civils cherchant à se mettre à l’abri des violences.

Ils sont aujourd’hui quelque 160 000 à vivre dans des conditions difficiles, selon des statistiques des Nations unies et ont peu d’espoir de regagner vite leurs demeures avec la nouvelle offensive de l’armée contre Al-Qaïda.

Les organisations internationales, sans fonds et sans personnels suffisants, ont du mal à répondre aux besoins des déplacés partis sans rien emporter.

"Nous n’avons plus rien", se lamente Arwa, mère de deux enfants qui a fui sa ville de Jaar lorsqu’elle a été prise par Al-Qaïda.
Elle vit actuellement dans le laboratoire de sciences de l’école publique Al-Masmoum dans la ville portuaire d’Aden et partage les lieux avec son mari, leurs deux enfants et une autre famille de trois personnes.
Les sept personnes ne disposent que de cinq matelas posés à même le sol et se relayent pour dormir. Ils se lavent et font la vaisselle dans les éviers du laboratoire et se plaignent de l’insuffisance des rations alimentaires de l’ONU.

Lorsque ses enfants sont tombés malades, Arwa a dû vendre le savon fourni par un organisme d’aide pour leur acheter des médicaments. "Ce n’est pas une vie", dit-elle, même si sa situation semble plus supportable que celle d’autres.

Dans les 78 écoles d’Aden abritant des déplacés, quatre familles en moyenne s’entassent dans une même salle de classe. Certains arrivés récemment se sont installés dans les couloirs ou sur les cours de récréation.
"Ils vivent dans des conditions très difficiles et c’est le cas dans toutes les écoles", déclare Sara Suleiman de l’organisation d’aide OXFAM.

Au niveau national, plus de 535.000 Yéménites ont été déplacés par les conflits passés et en cours dans le pays. Seul un nombre limité a pu rentrer chez lui et la majorité compte sur l’aide internationale, lorsqu’elle est disponible, pour survivre.

"La situation est vraiment sombre", déplore Alison Parker, de fonds des Nations unies pour l’enfance, UNICEF, qui évoque d’énormes insuffisances de l’assistance internationale.

A Aden, où vivent la plupart des 35.000 familles déplacées d’Abyan, le plus difficile est de fournir un abri, explique Tareq Talahma du service de coordination des affaires humanitaires de l’Onu (OCHA).

Environ 20.000 déplacés vivent dans les écoles publiques d’Aden, empêchant des milliers d’enfants locaux d’assister régulièrement aux cours.

A Al-Masmum, un bâtiment a été réservé aux écoliers tandis que les deux autres sont utilisés comme logements pour les personnes déplacées.

Les salles de classe sont bondées tandis que les bâtiments des écoles se sont dégradés.

Selon l’UNICEF, la présence de déplacés dans les écoles d’Aden perturbe l’apprentissage de plus de 100.000 écoliers dont beaucoup ont déjà perdu tout ou partie de l’année scolaire. Les enfants des déplacés ne reçoivent quant à eux aucune éducation, selon le représentant d’OXFAM.

L’installation des déplacés à Aden fait l’objet d’un bras de fer entre le gouverneur qui veut les regrouper dans des camps gérés par les Nations unies et l’organisation internationale qui est réticente à le faire.
"Ce n’est pas une option car de tels camps ne seront pas sécurisés et cela ne fera qu’ajouter aux tensions existantes", plaide Tareq Talahma.

"Tout ce qu’on demande c’est un peu de sécurité et le monde entier est incapable de nous l’assurer", déplore Nimah Mansur, qui a fui sa province d’Abyan et qui n’a même pas de salle de classe pour s’abriter avec sa famille.

Elle vit sous une tente dans la cour de l’école avec deux autres familles.
Dans la chaleur étouffante de l’été, ces déplacés préfèrent passer le plus clair de leur temps à l’extérieur. "On peut à peine respirer sous la tente", dit Mme Mansur en demandant quand est-ce qu’elle pourra "rentrer à la maison".

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