Mohamed Morsi a prêté officiellement serment samedi à la tête de
l’Egypte en promettant que son pays ne reviendrait pas en arrière sur
les acquis de la "révolution du Nil".
L’islamiste, issu des Frères musulmans et vainqueur de l’élection
présidentielle, est devenu le premier chef de l’Etat du pays le plus
peuplé du monde arabe à ne pas sortir des rangs de la puissante armée.
Cette institution, qui pilote la transition chaotique depuis la
chute, en février 2011, du régime d’Hosni Moubarak, reste déterminée à
conserver une forte emprise sur la vie politique et économique.
Elle a toutefois remis le pouvoir au nouveau chef de l’Etat lors
d’une cérémonie organisée sur la base militaire d’Heikstep et
retransmise à la télévision.
"Le peuple égyptien, le monde arabe, le monde musulman et le monde
tout entier assistent à un modèle unique, sans précédent, de transfert
des pouvoirs de l’armée égyptienne par la volonté du peuple à une
autorité civile élue", s’est félicité Mohamed Morsi lors de cette
cérémonie suivie d’un défilé.
"Les forces armées ont remis le pouvoir en confiance et ont tenu leur
promesse", a poursuivi le chef de l’Etat assurant aux généraux que
personne "ne toucherait à leur droits".
"Nous avons tenu la promesse que nous avions faite devant Dieu et le
peuple. Nous avons désormais un président élu qui prend les commandes de
l’Egypte à l’issue d’un vote direct et libre", a quant à lui déclaré le
maréchal Hussein Tantaoui, président du Conseil suprême des forces
armées (CSFA) qui assurait l’intérim.
"L’Egypte renaît comme un Etat moderne, démocratique où le peuple est
souverain. Le moment est venu de laisser le passé derrière nous",
a-t-il ajouté.
Après avoir prêté serment devant la Haute Cour constitutionnelle,
Morsi avait prononcé quelques heures plus tôt son premier discours dans
l’enceinte de l’université du Caire en commençant par l’incantation
rituelle "Dieu est le plus grand, au-dessus de tout !"
"L’Egypte ne reviendra pas en arrière", a-t-il lancé à un auditoire
composé de citoyens ordinaires, de responsables politiques et de
généraux.
A ces derniers, qui ont dissous le Parlement élu cet hiver et rogné
une bonne partie des prérogatives présidentielles, il a dit qu’ils
étaient désormais libres de rentrer dans les casernes pour se concentrer
sur leur mission de défense nationale.
L’orateur, dont l’intervention était retransmise en direct à la
télévision nationale, a salué les élections législatives "libres et
équitables" remportées haut la main par son camp.
Il a dit que l’Egypte oeuvrerait pour mettre un terme au bain de sang
en Syrie et tiendrait ses engagements internationaux, laissant entendre
qu’il ne toucherait pas au traité de paix historique signé il y a 35
ans avec Israël.
"Nous sommes porteurs d’un message de paix au monde", a-t-il dit pour
tenter de rassurer la communauté internationale, qui redoute que
l’arrivée de la confrérie au pouvoir ne menace la région. "Nous
soulignons l’engagement de l’Etat égyptien à honorer ses traités et ses
accords internationaux".
"Les Egyptiens n’exporteront pas la révolution. Nous ne nous
ingérerons pas dans les affaires de pays tiers (...) et nous
n’autoriserons personne à s’immiscer dans les nôtres".
A propos de la Syrie, il a dit : "L’effusion de sang du peuple syrien
doit cesser. Nous ferons tous les efforts pour y parvenir dans un
avenir proche".
L’armée s’est toujours engagée à remettre le pouvoir d’ici le 1er
juillet, alors même que dans les heures qui ont suivi la fin du second
tour de la présidentielle, elle avait publié un décret rognant les
prérogatives du chef de l’Etat. Elle s’était aussi approprié les
pouvoirs législatifs jusqu’à l’élection d’une nouvelle assemblée.
"Des institutions élues vont rejouer leur rôle et la grande armée
égyptienne sera libre de revenir à sa mission qui est de protéger la
sécurité de la nation et les frontières du pays", a dit Morsi, qui a
fait l’éloge de la police, pourtant très critiquée au début de la
répression de la "révolution du Nil".
Abordant très brièvement les questions économiques, il a promis
d’encourager les investissements et de relancer le secteur, vital, du
tourisme.
Vendredi, lors d’une cérémonie d’investiture officieuse organisée
pour ses partisans place Tahrir, le président avait soulevé sa veste
pour montrer qu’il ne portait pas de gilet pare-balle et restait près du
peuple, contrairement au "raïs" déchu.
"Il n’y a pas de pouvoir au-dessus du peuple", avait-il alors lancé à
la foule. "Aujourd’hui, vous êtes la source de ce pouvoir".
(1er juillet 2012 - Assawra avec les agences de presse)
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