Les affrontements entre l’armée syrienne et les insurgés ont fait
rage mardi à Damas pour la troisième journée consécutive, donnant lieu à
des combats d’une violence sans précédent dans la capitale en 17 mois
de conflit politique en Syrie.
L’intensification des combats dans la capitale syrienne survient
alors que les puissances occidentales tentent de convaincre Moscou,
soutien indéfectible de Damas, d’accentuer la pression sur le président
Bashar al Assad, qui reste sourd aux appels à cesser la répression des
manifestations antigouvernementales.
En visite à Moscou, l’émissaire international Kofi Annan a espéré, à
l’issue d’une rencontre avec le président Vladimir Poutine, que le
Conseil de sécurité de l’ONU arriverait à surmonter ses désaccords sur
le dossier syrien.
"Je souhaite que nous poursuivions les discussions et que nous
trouvions une formulation qui puisse nous permettre à tous d’avancer sur
cette question critique", a déclaré le diplomate ghanéen, chargé par
l’ONU et la Ligue arabe de trouver une issue pacifique au conflit.
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a pour sa part indiqué
qu’il n’y avait aucune raison de ne pas parvenir à un accord au Conseil
de sécurité sur un projet de résolution.
Moscou, qui a opposé son veto à deux reprises au Conseil de sécurité
de l’ONU par le passé à des résolutions condamnant la répression, reste
pour l’heure hostile aux sanctions prônées par les puissances
occidentales et contenues dans un projet de résolution britannique.
L’ambassadeur à l’ONU Mark Lyall Grant a annoncé lundi que le projet
de résolution serait mis au voix mercredi, malgré l’hostilité de la
Russie.
A Jérusalem, le chef des services de renseignements israéliens a
estimé mardi que le régime syrien avait perdu le contrôle de Damas.
"L’armée syrienne agit de façon brutale, ce qui montre que le régime
est désespéré. Son contrôle de Damas diminue", a déclaré le
major-général Aviv Kochavi, lors d’une commission parlementaire, selon
un porte-parole de la Knesset.
"Assad a déplacé une grande partie des ses troupes qui étaient sur le plateau du Golan dans les zones de conflit."
Sur le terrain, les hélicoptères des forces gouvernementales ont
bombardé les quartiers damascènes de Midan et de Tadamon contrôlés par
les combattants rebelles. A Midan, quartier sunnite, des habitants ont
signalé la présence de tireurs d’élite sur les toits. Les insurgés ont
annoncé avoir tué 70 soldats et miliciens (Chabiha) ces dernières 24
heures et avoir abattu un hélicoptère de combat de l’armée syrienne
au-dessus du quartier de Kabun, dans le nord-est de la capitale.
"Des hélicoptères nous survolent à basse altitude. Il est facile de
leur tirer dessus avec des armes antiaériennes", a déclaré à Reuters un
responsable des insurgés.
Les autorités ont relativement peu communiqué sur les combats dans
Damas. La télévision publique a cependant parlé d’une opération
militaire en cours contre les "derniers éléments de groupes terroristes
armés" à Midan et a dit également que dans un quartier voisin, Nahr
Aïcha, des affrontements avaient là eu lieu avec des "terroristes"
tentant de bloquer des rues.
Quelques heures plus tard, le ministre de l’Information, Omran Zoabi,
a parlé d’affrontements avec des combattants qui s’étaient infiltrés
dans la capitale. Certains, a-t-il dit, se sont rendus et un grand
nombre d’autres ont été mis en déroute et contraints de prendre la
fuite.
"Ce qui se passe, c’est que des éléments armés s’étaient infiltrés
dans Damas et tentaient de progresser dans un des quartiers. Mais les
forces de sécurité les ont encerclés et affrontés et les combats se
poursuivent", a-t-il dit à Reuters. "Certains combattants se sont rendus
et d’autres ont pris la fuite à pied ou à bord de véhicule, tirant en
l’air à l’aveuglette pour effrayer la population", a dit Zoabi.
La capitale était jusqu’ici considérée comme un bastion imprenable du
pouvoir. "Quand vous pointez vos armes vers le coeur de Damas, vers
Midan, vous avez perdu la ville. Les rebelles de la rue ont le soutien
des familles de Damas", a assuré l’opposant Imad Moaz.
Selon un officier de l’Armée syrienne libre (ASL), des milliers de
combattants d’Idlib, de Rakka, de Hama et de Homs sont arrivés à Damas
mais ils ne disposent pas de la puissance de feu nécessaire pour porter
un coup décisif au régime.
"Nous ne voulons pas contrôler Damas parce que nous avons que nous ne
serons pas capables de le faire ou de renverser (le régime) mais ce que
nous voulons c’est contrôler quelques quartiers que nous pourrions
utiliser comme des points d’action", a dit cet officier.
Damas est en "état d’alerte générale", a ajouté un autre haut
responsable rebelle. "Nous nous en sortons bien mais nous ne pouvons
rien annoncer encore. Nous ne pouvons pas dire que nous contrôlons un
quartier sinon le régime le rasera complètement. Il est trop tôt encore
pour parler de le renverser."
Alors que les combats faisaient rage à Damas, un général et plusieurs
autres officiers de l’armée syrienne ont fui dans la nuit de lundi à
mardi en Turquie avec quelque 1.280 Syriens, a-t-on appris mardi auprès
d’un responsable turc.
Selon ce responsable, les dernières défections qui ont affecté
l’armée syrienne portent à 18 le nombre de généraux syriens ayant trouvé
refuge en Turquie.
Un certain nombre d’officiers ont également fait défection avec leur
famille, soit 68 personnes au total en comptant leurs proches. Face à
l’escalade de la violence et à "la hausse du nombre d’agressions" visant
des Irakiens en Syrie, l’Irak a invité mardi ses ressortissants à
quitter la Syrie.
Selon l’Observatoire syrien pour les droits de l’homme, les violences
politiques ont fait depuis mars 2011 plus de 17.000 morts en Syrie. La
Croix-Rouge qualifie désormais les combats de "conflit armé intérieur",
autrement dit de guerre civile.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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