Le président tunisien Moncef Marzouki se rend mardi en France pour
une visite de trois jours destinée à tourner la page des tensions qui
ont marqué la relation entre les deux pays en raison de l’attitude
équivoque de Paris lors de la révolution de 2011. Lors de sa première
visite officielle en France, il rencontrera mardi son homologue François
Hollande et est appelé à s’entretenir notamment avec le Premier
ministre, Jean-Marc Ayrault, et le maire de Paris, Bertrand Delanoë, né
en Tunisie à l’époque du protectorat français. Moncef Marzouki se rendra
aussi à Marseille jeudi, au dernier jour de ce déplacement.
Signe que la France tient à réparer les liens, le chef de l’État
tunisien sera le premier haut responsable étranger à s’exprimer devant
l’Assemblée nationale (chambre basse du Parlement) depuis le discours du
président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, en janvier
2006.
Moncef Marzouki a souligné son souhait de tourner la page de la
discorde, alors que Tunis n’avait guère apprécié la position de la
France avant la fuite en janvier 2011 du président déchu Ben Ali, le
gouvernement français à l’époque de la présidence Nicolas Sarkozy
n’ayant pas saisi l’ampleur du soulèvement. La Tunisie n’a d’ailleurs
nommé que le 5 juillet son nouvel ambassadeur en France, Adel Fekih, qui
hérite d’un poste vacant depuis mars 2011, soit trois mois après la
révolution.
"Les Tunisiens ont quand même peu apprécié l’attitude d’anciens
gouvernements français qui avaient tout de même apporté un certain
soutien à la dictature", a noté Moncef Marzouki dans un entretien
accordé à l’AFP, en référence aux liens étroits unissant la France au
régime Ben Ali. En effet, la France sous les présidences de Jacques
Chirac ou de M. Sarkozy a entretenu des relations privilégiées avec le
président tunisien déchu. Et alors que ce dernier était acculé par les
manifestations, les autorités françaises ont longtemps continué de lui
accorder un certain soutien. "Vous vous souvenez des dérapages verbaux
de certains ministres français quand il y a eu cette révolution. Ça a
laissé des traces en Tunisie. Ce sont ces traces que je voudrais
effacer", a ainsi souligné Moncef Marzouki.
"Ces problèmes, on va les résoudre très rapidement, parce que de part
et d’autre de la Méditerranée nous avons maintenant les mêmes idéaux,
les mêmes principes, les gens qui sont actuellement au gouvernement nous
comprennent un peu mieux", a-t-il encore dit. Moncef Marzouki a salué
l’importance de "la relation stratégique" franco-tunisienne, la France
étant notamment le premier partenaire économique de Tunis et quelque 600
000 Tunisiens vivant sur le territoire français.
Plus de 1 200 entreprises françaises sont installées en Tunisie, et,
selon le ministère français de l’Économie, les échanges commerciaux ont
atteint en 2011, année de la révolution et d’une récession, 7,6
milliards d’euros contre 6,9 milliards un an plus tôt. Le président
tunisien, opposant historique au régime déchu, entretient une relation
particulière avec la France, où il a passé le tiers de sa vie, y ayant
notamment effectué ses études de médecine et y ayant passé ses années
d’exil.
Selon des analystes, Moncef Marzouki, dirigeant du parti de centre
gauche Congrès pour la république (CPR), est très affaibli sur un plan
politique dans son pays, le gouvernement étant dominé par les islamistes
d’Ennahda avec lesquels il s’est allié. Un autre parti de gauche,
Ettakatol, participe à cette coalition. Il appartient à l’Internationale
socialiste dont est aussi membre le Parti socialiste de François
Hollande. La visite de Moncef Marzouki fait suite à celle du Premier
ministre tunisien, l’islamiste Hamadi Jebali, à Paris fin juin.
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Le parti islamiste Ennahda se proclame "centriste" et "modéré"
Les islamistes d’Ennahda, au pouvoir en Tunisie, ont adopté dimanche
en congrès une motion sur leur engagement "centriste" et "modéré", mais
les débats se poursuivaient toujours dans la nuit sur l’avenir du parti,
après quatre jours de réunion.
"Cette nuit nous allons annoncer les résultats lors d’une grande
fête", a déclaré le chef historique et co-fondateur d’Ennahda, Rached
Ghannouchi, très influent sur la scène politique tunisienne bien qu’il
n’occupe aucune fonction officielle.
Ce dernier a répété à plusieurs reprises ces derniers jours que
Ennahda, inspiré à l’origine des Frères musulmans égyptiens, devait
devenir un parti de gouvernement "modéré".
Lors d’une conférence de presse, le président du Congrès et ministre
de la Santé, Abdelatif Mekki a confirmé que le millier de délégués
réunis au Kram, en banlieue nord de Tunis, avaient adopté un texte
confirmant cette orientation.
La motion, qui n’a pas été publiée, "conforte les choix centristes et
modérés, le bannissement de l’extrémisme", a assuré le responsable.
Vers minuit heure locale (23H00 GMT dimanche), il a indiqué, sans
plus de précisions, que le parti avait adopté une stratégie économique
pour la "création d’emplois", alors que le chômage notamment des jeunes
était l’un des grands facteurs de la révolution de 2011.
Dans la nuit de dimanche à lundi, les délégués vont encore désigner
les instances dirigeantes du parti, en particulier le chef du parti, un
poste que devrait conserver, sauf surprise, Rached Ghannouchi.
Des questions restent encore en suspens, en particulier les délégués
n’ont pas tranché leur position concernant la nouvelle Constitution du
pays, en cours de rédaction à l’Assemblée nationale constituante (ANC).
Ils ont confirmé qu’Ennahda militera pour un régime parlementaire
mais sans déterminer encore s’il sera pur ou laissera des prérogatives
importantes au chef de l’Etat comme le réclament les partenaires des
islamistes au gouvernement, selon M. Mekki, qui a assuré que la question
sera tranchée dans la nuit.
Par ailleurs, M\. Ghannouchi a indiqué souhaiter élargir la coalition
au pouvoir à d’autres formations politiques et a dit vendredi qu’un
remaniement ministériel pourrait intervenir après le congrès.
Ennahda veut, par ce premier congrès en Tunisie depuis 1988,
déterminer sa position en vue des élections prévues en mars 2013.
L’enjeu est de transformer ce mouvement, après des décennies de
clandestinité, en parti de gouvernement.
Violemment réprimé sous le président déchu Ben Ali, il s’est imposé
après les premières élections post-révolutionnaires d’octobre comme le
principal partenaire d’une coalition au pouvoir formée avec deux partis
de centre-gauche.
Ennahda s’est fixé pour objectif d’être une formation de consensus
mais doit pour cela concilier les modérés et les tenants d’une ligne
plus radicale, qui seraient minoritaires.
L’opposition parlementaire accuse pour sa part ce parti de tentations
hégémoniques, craignent une islamisation rampante du pays et réclament
un gouvernement d’union nationale.
Ennahda est notamment accusé d’avoir manqué de fermeté face à la
mouvance salafiste responsable de plusieurs coups d’éclat ces derniers
mois.
Le Congrès pour la République (CPR) du président Moncef Marzouki et
Ettakatol, les deux partis du centre-gauche alliés à Ennahda, jugent
pour leur part que le parti islamiste avait intégré les principes
républicains.
Ainsi, Ennahda a renoncé à faire inscrire expressément la charia —la loi coranique— dans la Constitution.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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