Pour la première fois depuis le début de la crise syrienne, il y a
maintenant 17 mois, le président libanais hausse publiquement le ton
contre son voisin Bachar el-Assad. Dans un communiqué publié lundi,
Michel Sleiman a exprimé son "mécontentement" et a demandé au ministre
des Affaires étrangères, Adnan Mansour, de remettre une lettre
officielle de protestation à l’ambassadeur syrien à Beyrouth. Selon le
quotidien libanais L’Orient-Le Jour, le chef de l’État a pris cette
décision dans la nuit de dimanche à lundi, après l’incursion dans la
région libanaise du Qaa de forces syriennes sur plus de 500 mètres.
D’après des témoignages recueillis par la chaîne libanaise MTV, des
soldats syriens armés se seraient rendus coupables de destructions et de
vols. Cette offensive a entraîné la fuite des habitants de la région,
ajoute MTV. Il ne s’agit pourtant pas d’une première. Que ce soit dans
la vallée de la Bekaa (centre) ou dans le nord du Liban, des incidents
similaires se sont produits au cours des derniers mois, provoquant la
colère des habitants du Qaa, outrés que l’armée, présente sur place, ne
les ait pas protégés.
Les agissements de la Syrie au pays du Cèdre ont été maintes fois
dénoncés par le président libanais. Mais il s’est toujours heurté à
l’hostilité de son conseil des ministres, issu de la coalition
pro-syrienne du 8 mars. Ce gouvernement a toujours tenu à rester à
l’écart du conflit syrien afin, dit-il, de "préserver la stabilité" du
Liban. Un mutisme qui n’aura donc pas résisté à la dernière offensive
syrienne. "Michel Sleiman ne pouvait plus rester silencieux, la
légitimité de l’armée libanaise étant en jeu", estime Daniel Meier *,
chercheur associé au Center for Middle East Studies à Oxford. "Si le
président, en tant que chef suprême des armées, continuait sa stratégie
du laisser-faire, il perdait toute légitimité", ajoute le spécialiste du
Liban.
Étonnamment, l’initiative présidentielle pourrait également servir
les intérêts de Damas. D’après L’Orient-Le Jour, la sortie de Michel
Sleiman viserait également à mettre un terme à la contrebande d’armes
alimentant les rebelles syriens. En effet, Damas a déjà protesté à
plusieurs reprises contre le trafic organisé à la frontière
libano-syrienne, au nord du pays. Si le message de Michel Sleiman
devrait satisfaire les forces d’opposition libanaises, farouchement
hostiles à la Syrie, il semble avoir irrité le Hezbollah. En témoigne la
réaction du ministre libanais des Affaires étrangères, Adnan Mansour,
issu des rangs du parti de Dieu. Selon la presse libanaise, ce dernier a
refusé de transmettre la lettre de protestation à l’ambassadeur syrien.
(*) Daniel Meier, auteur de Le Liban : idées reçues (éditions Cavalier bleu)
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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