jeudi 26 juillet 2012

Liban : le Hezbollah défie le président

Pour la première fois depuis le début de la crise syrienne, il y a maintenant 17 mois, le président libanais hausse publiquement le ton contre son voisin Bachar el-Assad. Dans un communiqué publié lundi, Michel Sleiman a exprimé son "mécontentement" et a demandé au ministre des Affaires étrangères, Adnan Mansour, de remettre une lettre officielle de protestation à l’ambassadeur syrien à Beyrouth. Selon le quotidien libanais L’Orient-Le Jour, le chef de l’État a pris cette décision dans la nuit de dimanche à lundi, après l’incursion dans la région libanaise du Qaa de forces syriennes sur plus de 500 mètres.

D’après des témoignages recueillis par la chaîne libanaise MTV, des soldats syriens armés se seraient rendus coupables de destructions et de vols. Cette offensive a entraîné la fuite des habitants de la région, ajoute MTV. Il ne s’agit pourtant pas d’une première. Que ce soit dans la vallée de la Bekaa (centre) ou dans le nord du Liban, des incidents similaires se sont produits au cours des derniers mois, provoquant la colère des habitants du Qaa, outrés que l’armée, présente sur place, ne les ait pas protégés.

Les agissements de la Syrie au pays du Cèdre ont été maintes fois dénoncés par le président libanais. Mais il s’est toujours heurté à l’hostilité de son conseil des ministres, issu de la coalition pro-syrienne du 8 mars. Ce gouvernement a toujours tenu à rester à l’écart du conflit syrien afin, dit-il, de "préserver la stabilité" du Liban. Un mutisme qui n’aura donc pas résisté à la dernière offensive syrienne. "Michel Sleiman ne pouvait plus rester silencieux, la légitimité de l’armée libanaise étant en jeu", estime Daniel Meier *, chercheur associé au Center for Middle East Studies à Oxford. "Si le président, en tant que chef suprême des armées, continuait sa stratégie du laisser-faire, il perdait toute légitimité", ajoute le spécialiste du Liban.

Étonnamment, l’initiative présidentielle pourrait également servir les intérêts de Damas. D’après L’Orient-Le Jour, la sortie de Michel Sleiman viserait également à mettre un terme à la contrebande d’armes alimentant les rebelles syriens. En effet, Damas a déjà protesté à plusieurs reprises contre le trafic organisé à la frontière libano-syrienne, au nord du pays. Si le message de Michel Sleiman devrait satisfaire les forces d’opposition libanaises, farouchement hostiles à la Syrie, il semble avoir irrité le Hezbollah. En témoigne la réaction du ministre libanais des Affaires étrangères, Adnan Mansour, issu des rangs du parti de Dieu. Selon la presse libanaise, ce dernier a refusé de transmettre la lettre de protestation à l’ambassadeur syrien.

(*) Daniel Meier, auteur de Le Liban : idées reçues (éditions Cavalier bleu)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire