Des combats d’une violence sans précédent, selon une ONG syrienne,
ont éclaté dimanche à Damas entre soldats et rebelles, seize mois après
le début d’une révolte contre le régime de Bashar al-Assad qui s’est
militarisée au fil des mois face à une communauté internationale
impuissante.
"L’armée régulière tire des obus de mortier contre plusieurs
quartiers" où sont retranchés des rebelles de l’Armée syrienne libre
(ASL), a affirmé à l’AFP le directeur de l’Observatoire syrien des
droits de l’Homme (OSDH) Rami Abdel Rahman ajoutant que "ça n’a jamais
été aussi intense" à Damas.
Les combats se déroulent, notamment dans le sud de la capitale,
également en proie à des bombardements de l’armée, selon l’OSDH, alors
que des militants ont évoqué des "chars entrant dans le quartier
al-Tadamone et des affrontements". "Les combats les plus violents se
sont produits dans les quartiers de Tadamone, Kafar Soussé, Nahr Aïcha,
Sidi Qadad. Les forces de sécurité tentent de reprendre le contrôle de
ces quartiers mais n’y arrivent pas pour le moment", selon Rami Abdel
Rahmane.
Parallèlement des observateurs de l’ONU se sont à nouveau rendus
dimanche à Treimsa, dans le centre de la Syrie, où selon l’OSDH, des
bombardements et des combats ont fait jeudi plus de 150 morts, dont des
dizaines de rebelles.
L’opposition et une partie de la communauté internationale avaient qualifié de "massacre" cette opération.
La mission de l’ONU a indiqué dimanche soir dans un communiqué que
"plus de 50 maisons ont été brûlées et/ou détruites" à Treimsa, faisant
état de la présence de "mares de sang et de restes de cerveaux" humains.
Un dirigeant de l’ASL, Saleh al-Subaai, a été abattu par balles, a
indiqué la mission, et un médecin et ses enfants ont été tués par la
chute d’un obus de mortier sur leur maison.
Selon les 27 habitants interrogés par les observateurs, l’attaque a
débuté à 05H00 jeudi (02H00 GMT) par des bombardements puis des
opérations au sol.
Selon ces témoins, l’armée a mené des perquisitions maison par maison
et procédé à des contrôles d’identité des hommes, dont plusieurs ont
ensuite été tués ou emmenés hors du village.
L’OSDH avait indiqué que certains habitants ont été "exécutés
sommairement" ou tués en tentant de fuir, et une trentaine de cadavres
ont été brûlés.
Mais le régime syrien a à nouveau démenti avoir perpétré un massacre.
Accusé par l’émissaire Kofi Annan d’avoir utilisé l’artillerie lourde
à Treimsa, sur la base des conclusions des observateurs, Damas a nié
tout recours aux hélicoptères ou aux chars dans son opération contre des
"terroristes" dans cette localité.
Estimant que Kofi Annan s’était "précipité" et ne s’était pas "basé sur
les faits", il a assuré qu’il n’y avait "pas eu de massacre" à Treimsa
"mais des combats entre l’armée régulière et des groupes armés", faisant
état de 39 morts, dont deux civils.
Des habitants ont raconté dimanche à un correspondant de l’AFP que
des maisons avaient été visées, éventrées par les chars, puis pillées
par les milices du régime et incendiées.
"Ici, des gens ont été égorgés", a expliqué un homme faisant visiter
la maison d’une famille connue pour son soutien aux rebelles syriens. A
l’intérieur, de nombreux corps calcinés n’ont pas encore été enlevés.
Dimanche, les violences ont fait au moins 55 morts —25 civils, 12
combattants rebelles et 18 soldats—, au lendemain de la mort de 115
personnes, selon l’OSDH.
Parmi les victimes figurent quatre civils tués par un obus qui s’est abattu sur leur maison à Rastan (centre), selon l’OSDH.
Des vidéos ont montré des personnes évacuant des décombres le corps
inerte d’une fillette, le visage en sang. "Regardez, celui-là est encore
vivant, mon Dieu, aidez-nous", crie quelqu’un en montrant d’autres
corps recouverts de poussière.
A Qousseir (centre), contrôlée depuis des mois par l’ASL, après les
bombardements intensifs des derniers jours, des résidents ont foré des
abris dans leurs propres maisons ou commerces.
"Avant, on s’abritait dans le sous-sol d’une école, mais les gens
étaient tués avant d’y arriver", a expliqué Hussein, un militant, à un
correspondant de l’AFP.
Dans l’espoir de redonner un élan diplomatique à son plan de paix,
qui n’a jamais eu d’effet sur le terrain, Kofi Annan est attendu lundi à
Moscou, où il doit rencontrer mardi le président russe Vladimir
Poutine, selon le Kremlin.
La Russie résiste fermement à toute intervention extérieure en Syrie
et a bloqué jusqu’à présent tout projet de résolution condamnant la
répression.
Une visite de Ban Ki-moon est prévue aussi la semaine prochaine en
Chine, autre soutien de Damas auquel le secrétaire général de l’ONU a
demandé "d’user de son influence" pour faire appliquer le plan Annan.
Le président américain Barack Obama ne doit pas attendre son
éventuelle réélection en novembre pour agir en Syrie, a estimé sur la
chaîne CNN Abdel Basset Sayda, chef du Conseil national syrien.
L’Iran, principal allié de Damas dans la région, s’est dit prêt à
organiser à Téhéran une rencontre entre gouvernement syrien et
opposition.
Depuis le début de la révolte populaire en Syrie le 15 mars 2011,
plus de 17.000 personnes, en majorité des civils, ont péri, selon
l’OSDH.
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Damas dément les accusations d’Annan sur le massacre de Tremsa
Le régime syrien de Bashar al Assad a démenti dimanche les
affirmations de Kofi Annan selon lesquelles il aurait fait usage d’armes
lourdes ou d’hélicoptères à Tremsa, où l’opposition a fait état du
massacre de 100 à 220 personnes.
Selon Damas, les commentaires de l’émissaire spécial de l’Onu sur les combats qui se sont déroulés à Tremsa étaient "hâtifs".
Porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Djihad Makdissi a
déclaré qu’au moins 37 combattants et deux civils avaient été tués dans
les affrontements, qui ont éclaté au cours d’une opération des forces de
sécurité contre ce village de la province d’Hama, utilisé, selon le
régime, comme base arrière par les insurgés.
Les rebelles estiment que le nombre de victimes est compris entre 100
et 220, dont beaucoup de familles entières de Tremsa, où les
observateurs de l’Onu ont fait état de violents combats jeudi.
"Les forces gouvernementales n’ont pas utilisé d’avions, ni
d’hélicoptères, ni de chars ni de pièces d’artillerie. L’arme la plus
lourde utilisée a été le (lance-roquette) RPG", a déclaré Djihad
Makdissi lors d’une conférence de presse à Damas.
"Ce qui s’est produit n’était pas un massacre (...), ce qui s’est
produit était une opération militaire. Il y a eu des affrontements entre
les forces de sécurité, dont le devoir est de défendre les citoyens et
des forces lourdement armées qui ne croient pas en une solution
politique", a-t-il ajouté.
Une vidéo publiée par les insurgés et censée provenir du petit
village montrait les corps ensanglantés et brûlés de jeunes hommes, qui
pourraient être des rebelles.
Djihad Makdissi s’est également exprimé au sujet des rapports faisant
état de la désertion du général Manaf Tlas, un membre du cercle intime
de Bashar al Assad, précisant qu’il "était parti sans autorisation".
C’est la première fois que le gouvernement syrien reconnaît sa
disparition, mais le porte-parole n’a fait aucun commentaire au sujet
des rapports signalant que le général aurait rejoint les rangs des
insurgés.
L’émissaire spécial Kofi Annan, qui s’efforce de mettre en oeuvre un
processus de paix en Syrie, a déclaré vendredi que la Syrie avait violé
ses engagements envers les efforts de paix soutenus par les Nations
Unies.
"Je suis choqué et consterné par les nouvelles provenant du village
de Tremsa, près d’Hama, qui font état de combats intenses, d’importantes
victimes et de l’utilisation confirmée d’armes lourdes telles que de
l’artillerie, des tanks et des hélicoptères", a déclaré Kofi Annan, qui
verra mardi le président russe Vladimir Poutine.
"C’est une violation de la promesse faite par le gouvernement de
cesser d’employer des armes lourdes dans les zones peuplées et une
violation de son engagement de respect du plan en six points", a-t-il
ajouté.
Djihad Makdissi a rejeté les accusations de Kofi Annan, dont
l’émissaire spécial a également fait mention dans une lettre adressée au
ministre des Affaires étrangères, Walid al Mualem.
"Le moins que l’on puisse dire au sujet de cette lettre portant sur
ce qui s’est passé à Tremsa est qu’elle ne s’appuie pas sur les faits.
De la manière la plus diplomatique possible, nous disons que cette
lettre a été rédigée de manière très précipitée", a commenté le
porte-parole.
Il a ajouté que les déclarations faites samedi par un groupe
d’observateurs des Nations unies dépêché à Tremsa confirmaient la
version syrienne des événements. Les observateurs avaient indiqué que la
violence semblait être due à des attaques visant des rebelles et des
militants de l’opposition.
Mais leur rapport soulignait aussi l’usage de l’artillerie et de
mortiers. Un jour auparavant, le chef de la mission d’observation avait
par ailleurs déclaré que, selon des observateurs présents dans la
province, des hélicoptères de combat avaient été employés et des tirs
aveugles avaient eu lieu.
Djihad Makdissi souligne que les accusations de violentes attaques
étaient peu plausibles étant donnée la petite taille du village.
"Tout ce qui a été dit concernant l’utilisation d’armes lourdes dans
l’attaque d’un village de moins de 100 hectares est tout à fait faux",
a-t-il dit, démentant que les villageois aient été visés. "Nous sommes
en état d’autodéfense, pas en situation d’attaque."
De violents combats ont été signalés dimanche en plein jour à Damas
entre forces de sécurité syriennes et insurgés dans plusieurs quartiers
du sud de la capitale, selon des opposants.
Un car des forces de sécurité syriennes a également été la cible
d’une explosion dans Damas, faisant plusieurs blessés, d’après les
insurgés.
Alors que la révolte de l’opposition syrienne contre le régime de
Bashar al Assad entre dans son dix-septième mois, des responsables
étrangers considèrent que l’insurrection présente désormais toutes les
caractéristiques d’une guerre civile.
Le Comité international de la Croix rouge (CICR) a requalifié
officiellement samedi le conflit syrien de "conflit armé intérieur", une
dénomination qui facilite les poursuites pour crimes de guerre en cas
de violation du droit international humanitaire.
(15 juillet 2012)
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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