Les jihadistes du groupe Etat islamique (EI) ont mené samedi pour la
première fois une double attaque suicide contre un poste-frontière
contrôlé par les Kurdes entre la Turquie et la ville syrienne de Kobané
qu'ils tentent de prendre depuis près de trois mois.
Des responsables du principal parti kurde syrien PYD et une ONG syrienne
ont affirmé que les kamikazes de l'EI étaient venus "du côté turc" de
la frontière, mais Ankara a dénoncé un "mensonge grossier".
La double attaque a provoqué de violents combats du côté syrien du
poste-frontière entre les jihadistes et les YPG, la milice kurde
défendant la ville de Kobané depuis le début de l'assaut de l'EI pour la
prendre, le 16 septembre.
Si les jihadistes parviennent à s'emparer de ce poste-frontière syrien
tout proche de Kobané, ils couperaient la route d'approvisionnement des
combattants kurdes et encercleraient totalement cette ville du nord
syrien.
"Des affrontements ont éclaté pour la première fois dans la zone après
deux attaques jihadistes à l'aube au poste-frontière séparant la Turquie
de Kobané", a indiqué à l'AFP Rami Abdel Rahmane, directeur de
l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Un jihadiste a mené une attaque à la voiture piégée et l'autre avec une
ceinture explosive, selon l'ONG qui dispose d'un large réseau
d'informateurs à travers la Syrie ravagée par la guerre depuis près de
quatre ans.
L'EI a revendiqué trois attaques suicide au poste-frontière, selon le
centre américain de surveillance des sites islamistes SITE.
Les combats dans et autour de Kobané, ainsi que les frappes de la
coalition internationale menée par les Etats-Unis dans le secteur, ont
fait une quarantaine de morts ces dernières 24 heures, dont 28
jihadistes et 11 combattants kurdes, selon l'OSDH.
L'OSDH a affirmé que les attaques jihadistes avaient été menées à partir
du territoire turc. Et Khaled Issa, un représentant du PYD, le parti
chapeautant les YPG, a parlé d'une "première offensive des terroristes
de l'EI contre Kobané depuis le territoire turc".
M. Issa a affirmé que le PYD avait des vidéos mettant en cause
l'implication de la Turquie, que les Kurdes syriens accusent toujours de
soutenir l'EI.
La Turquie a confirmé une attaque au poste-frontière mais a démenti
toute utilisation de son territoire. "Les allégations selon lesquelles
le véhicule est passé par la Turquie sont des mensonges", a déclaré
l'état-major, et le bureau du Premier ministre a dénoncé un "mensonge
grossier".
Les jihadistes et les combattants kurdes se partagent la ville, que l'EI
cherche à conquérir pour s'assurer le contrôle d'une longue bande
territoriale à la frontière syro-turque.
Après avoir réussi à stopper l'offensive, les Kurdes sont parvenus à
reprendre une partie du terrain perdu à Kobané, grâce à l'aide de
frappes de la coalition et de renforts de combattants kurdes d'Irak.
Mais pour le régime syrien, ces frappes ont eu peu d'impact sur le
groupe extrémiste. "Est-ce que Daech (acronyme de l'EI en arabe) est
plus faible aujourd'hui après plus de deux mois de frappes de la
coalition? Tous les indicateurs montrent que non", a dit Walid Mouallem,
chef de la diplomatie.
"Si les Etats-Unis et les membres du Conseil de sécurité de l'ONU ne
mènent pas un réel effort pour obliger la Turquie à contrôler sa
frontière, même ces frappes de la coalition ne pourront pas venir à bout
de Daech", a ajouté Mouallem.
La montée en puissance des groupes jihadistes, notamment de l'EI, dans
le conflit en Syrie a éclipsé le combat des rebelles contre le régime de
Bashar al-Assad, lancé en 2011.
Accusé de crimes contre l'Humanité, l'EI regroupe des dizaines de
milliers de combattants et est responsable de viols, rapts, exécutions
et crucifixions dans les vastes régions sous son contrôle en Syrie comme
en Irak voisin.
Sur le front irakien, des combats ont eu lieu entre l'armée aidée de
tribus et l'EI à Ramadi, chef-lieu de la province stratégique d'Al-Anbar
que l'EI contrôle déjà en grande partie. Une prise totale de Ramadi lui
permettrait d'asseoir son autorité sur Al-Anbar, frontalière de la
Jordanie, de l'Arabie saoudite et de la Syrie.
Enfin, trois des six avions-bombardiers français Mirage appelés à être
déployés en Jordanie pour participer à la campagne aérienne contre l'EI
en Irak sont arrivés dans le royaume, selon l'armée jordanienne.
(29-11-2014)
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