Les appels se sont multipliés lundi pour la libération du chef de
l'opposition chiite à Bahreïn, arrêté dans ce royaume du Golfe où les
autorités peinent à étouffer un mouvement de contestation qui dure
depuis près de quatre ans.
L'arrestation dimanche de cheikh Ali Salmane, secrétaire général du
mouvement Al-Wefaq ("L'entente"), constitue une "escalade" qui menace la
"stabilité sociale" et la "paix civile", ont averti le Wefaq et quatre
autres groupes d'opposition dans un texte conjoint.
En fin d'après-midi, des heurts ont éclaté entre policiers et
manifestants près de la résidence de cheikh Salmane dans un village de
la banlieue de Manama, ont indiqué des témoins, précisant que les forces
de sécurité ont fait usage de gaz lacrymogènes.
Des organisations locales et régionales de défense des droits de l'Homme
ont également exigé la "libération immédiate et sans condition" de
cheikh Salmane, détenu pour avoir exercé son "droit à la liberté
d'expression", selon un communiqué.
Dans la matinée, des dizaines de dignitaires religieux chiites avaient
protesté dans une mosquée en brandissant des portraits du chef de
l'opposition qui n'a pas été libéré après un interrogatoire de près de
dix heures dimanche au ministère de l'Intérieur.
Son arrestation a provoqué immédiatement des manifestations sporadiques,
accompagnées de heurts nocturnes, entre jeunes et policiers dans
plusieurs villages chiites de la banlieue de Manama, selon des images
postées sur les réseaux sociaux.
Proche allié des Etats-Unis et siège de la Ve flotte américaine, Bahreïn
(1,3 million d'habitants) est secoué depuis février 2011 par un
mouvement de contestation animé par la majorité chiite qui réclame une
monarchie constitutionnelle.
La dynastie sunnite des Al-Khalifa a jusqu'ici réprimé d'une poigne de
fer toutes les manifestations violentes. Un dialogue national, entamé en
juillet 2011 et auquel a participé le Wefaq, n'a abouti à aucun
résultat tangible. Des élections législatives, organisées en novembre,
ont été boycottées par l'opposition.
Vendredi, à l'issue d'un Congrès général, le Wefaq a reconduit cheikh
Salmane au poste de secrétaire général, qu'il occupe depuis 2006, pour
un mandat de quatre ans.
Le même jour, une manifestation ayant rassemblé plusieurs milliers de
chiites a été organisée près de Manama pour réclamer l'éviction du
gouvernement et du Parlement, qualifiés "d'illégitimes".
Cheikh
Salmane a été convoqué dimanche matin au ministère de l'Intérieur pour
être interrogé par la police criminelle sur "des violations des
dispositions de la loi" qui n'ont pas été précisées par les autorités.
Selon son avocat Abdallah al-Chamlane, qui dit ne pas avoir été autorisé
à l'assister, cheikh Salmane est accusé "d'incitation à la haine contre
le régime et d'appel à le renverser par la force", d'"insulte envers la
magistrature et le pouvoir exécutif", d'"incitation confessionnelle",
de "propagation de fausses nouvelles" et de "participation à des
manifestations préjudiciables à l'économie".
Nabeel
Rajab, directeur du Centre bahreïni des droits de l'Homme, a réagi à
l'arrestation de l'opposant en affirmant que "le silence de la
communauté internationale a contribué" au durcissement des autorités.
Face à la poursuite de la contestation, Bahreïn a alourdi les peines
pour les auteurs de violences et introduit la peine capitale ou la
prison à perpétuité en cas de morts ou de blessés.
Lundi, un tribunal de Manama a condamné deux chiites à la peine de mort
et un troisième à la prison à vie pour avoir tué un policier. Neuf
autres ont été condamnés à six ans de prison chacun pour leur
implication dans l'explosion qui a tué le policier, a précisé l'agence
officielle Bna.
(29-12-2014 - Assawra avec les agences de presse)
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