Quatre mois après la guerre sanglante de l'été, la
menace d'un nouveau conflit plane sur la bande de Gaza, où la
reconstruction peine à débuter et la réconciliation palestinienne semble
moribonde, avertissent des experts.
Peu de choses ont changé depuis la fin de la guerre, le 26 août, dans
l'étroite langue de terre où s'entassent 1,8 million de Palestiniens.
100.000 Gazaouis sont toujours sans abri pour affronter le rude hiver et
la reconstruction de leurs maisons semble encore loin. D'un côté,
Israël laisse passer au compte-gouttes les matériaux de construction de
peur qu'ils ne servent à fabriquer des armes; de l'autre, les querelles
politiques des rivaux historiques du Hamas, qui rechigne à
céder le pouvoir à Gaza, et du Fatah du président Mahmoud Abbas
ralentissent encore le processus.
"Toutes les options sont ouvertes, mais une nouvelle guerre se dessine
si rien n'évolue", prévient Naji Charab, un politologue gazaoui. "Si le
Hamas ne parvient pas à dégager des solutions, il pourrait estimer ne
pas avoir d'autre choix" que le retour au combat.
Les dirigeants du Hamas brandissent d'ailleurs déjà la
menace: ils ont fait des récentes célébrations du 27ème anniversaire du
parti une nouvelle démonstration de force, faisant défiler leurs hommes
en tenue, juchés sur leur arsenal de roquettes et autres projectiles qui
se sont abattus par milliers sur Israël l'été dernier.
A cette occasion, la branche armée du Hamas, les brigades Qassam, ont
prévenu: "Faites attention à l'explosion, nous n'accepterons rien de
moins que la reconstruction de tout ce que l'ennemi sioniste a détruit à
Gaza. Et si nous ne sommes pas entendus, il y aura des conséquences
pour l'ennemi, son peuple et ses dirigeants".
Ce week-end, pour la première fois depuis la fin de la guerre,
l'aviation israélienne a visé le sud de la bande de Gaza après un tir de
roquette. Ces attaques n'ont fait aucun blessé mais ont relancé les
craintes que la situation ne dégénère de nouveau à Gaza, ravagée par
trois guerres en six ans.
Les menaces ne sont pas prises à la légère côté israélien. "Si le blocus
se poursuit, si les frontières restent fermées et si la reconstruction
reste aussi lente durant les six prochains mois, le Hamas va hausser le
ton et, en fonction de la réponse israélienne, on pourrait aller vers
une nouvelle guerre", assure à l'AFP Avi Issacharoff, qui a longtemps
couvert les Territoires palestiniens pour la presse israélienne.
Le politologue gazaoui Walid al-Moudallal estime aussi que l'attitude
d'Israël sera prépondérante. "Si tout est à l'arrêt en terme de
reconstruction, alors la guerre sera la seule option. Le Hamas n'aura
pas d'autre choix", prédit-il. "Il n'y a que peu d'options et elles sont
toutes pires les unes que les autres".
Le noeud du problème est le blocus imposé depuis huit ans par Israël à la bande de Gaza.
Les Palestiniens estiment qu'il faudrait que 175 camions de matériaux de
construction entrent chaque jour pour réhabiliter Gaza en trois ans.
Mais, selon l'ONG Oxfam, seuls 287 poids-lourds ont été autorisés en
novembre à rallier l'enclave par les points de passage israéliens et
égyptien, souvent fermés aux marchandises et la plupart du temps aux
hommes.
Et rien ne semble prêt de changer tant la situation politique apparaît
bloquée. Au printemps, les rivaux palestiniens signaient la
réconciliation et entérinaient la remise du pouvoir à un gouvernement
d'union qui dirigerait la Cisjordanie occupée et la bande de Gaza. Huit
mois plus tard, le gouvernement n'a pu se rendre qu'une fois à Gaza, où
le Hamas fait toujours la police, les élections promises n'ont pas eu
lieu et les gardes présidentiels de M. Abbas censés prendre le contrôle
des points de passage côté gazouis se font toujours attendre.
Ramallah accuse le Hamas de ne pas jouer le jeu de la réconciliation et
de conserver un pouvoir concurrent. Gaza dénonce les impayés de ses
fonctionnaires armés que le gouvernement d'union se refuse à payer et sa
crise financière va grandissante avec la zone-tampon que l'Egypte
construit à sa frontière nord avec Gaza.
Pour Aviram Zino, éditorialiste du journal israélien de droite Maariv,
"la bombe gazaouie a entamé son compte à rebours. Si la situation
n'évolue pas, un nouveau cycle de violence risque d'éclater".
(22-12-2014
- Assawra)
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