Les pourparlers relancés à Washington doivent avant tout servir à tester
les intentions d’Israël et le cas échéant lui faire porter la
responsabilité d’un échec, selon experts et responsables palestiniens,
qui leur assignent des objectifs modestes.
Les deux parties ont accepté mardi lors d’une première réunion de tenter
de parvenir à un accord de paix dans les neuf mois, un objectif "à
portée de vue" selon l’Union européenne, mais les Palestiniens se
montrent beaucoup plus dubitatifs.
"A ce stade, il s’agit simplement de préparer les négociations", a
précisé mercredi le négociateur palestinien Yasser Abed Rabbo, à la
radio officielle Voix de la Palestine, alors que la prochaine rencontre
doit avoir lieu dans deux semaines, selon le secrétaire d’État américain
John Kerry.
Les négociations doivent porter sur toutes les questions liées au
"statut final" : le droit au retour pour quelque 5 millions de réfugiés
palestiniens, les frontières d’un futur État palestinien, le sort de
Jérusalem, la question des colonies juives.
"Tout le monde sait que les activités de colonisation continuent, cela
signifie que les négociations sont vouées à l’échec et doivent cesser", a
prévenu M. Abed Rabbo. "Et les Américains en sont parfaitement
conscients, ils devront donc décider s’ils veulent ou non de véritables
négociations".
Israël ne s’est pas engagé à geler la construction de colonies pendant
les négociations —ce qui était une des demandes répétées des
Palestiniens. En revanche, le gouvernement de Benjamin Netanyahu a
accepté de libérer 104 prisonniers palestiniens arrêtés avant les
accords d’Oslo en 1993.
"Ces discussions sont vouées a l’échec, il n’y a aucune chance pour que
ça mène à un accord", affirme le politologue Abdelmajid Soueilem",
estimant que "le but de ces négociations est de faire plaisir aux
Américains".
"C’est le principe même des négociations qui est important pour les
Américains afin de garder un rôle dans la région", explique-t-il.
"L’annonce dimanche de la libération de 104 prisonniers palestiniens
incarcérés avant les accords d’Oslo de 1993 ne suffira pas à amadouer
l’opinion palestinienne ou la convaincre que ces négociations vont
aboutir", ajoute M. Soueilem.
Un avis partagé par un autre expert, Hani Habib, pour qui "la rue
palestinienne ne se sent pas concernée par la reprise des négociations".
Selon lui, "ces prisonniers auraient dû être libérés après la signature
des accords d’Oslo, il y a 20 ans, donc cela ne peut pas être considéré
comme une faveur exceptionnelle en échange d’un retour aux
négociations".
De son côté, Samir Awad, professeur de science politique à l’Université
de Bir Zeït, juge que la libération des prisonniers est "le fait des
pressions américaines mais ce n’est pas suffisant pour assurer le succès
des discussions".
"Le peuple palestinien ne se sent pas partie prenante du processus de
paix et a appris la reprise de négociations par la presse, pas par les
dirigeants palestiniens", remarque-t-il.
"L’opinion publique palestinienne ne pense pas que ces négociations sont
dans l’intérêt du peuple palestinien mais uniquement le fruit des
pressions américaines", souligne juge Hani Habib.
Plus de deux tiers des Palestiniens (69%) jugent faibles ou nulles les
chances de création dans les cinq ans d’un État palestinien à côté
d’Israël, selon un sondage réalisé à la mi-juin.
En outre, si une majorité absolue de Palestiniens (53%) soutient une
solution à deux États, 58% des Palestiniens considèrent qu’elle n’est
plus viable.
Les experts jugent que la direction palestinienne doit surtout s’assurer
qu’en cas d’échec, la faute en retombe sur le gouvernement israélien.
"Israël n’est pas prêt à la paix", affirme M. Soueilem, rappelant la
très forte opposition à un État palestinien au sein même du gouvernement
israélien, où le lobby de la colonisation a rarement été aussi
puissant.
Le gouvernement d’"Israël ne pourra pas affronter le puissant lobby
pro-colons", prédit Samir Awad. "Mais il est important qu’il en arrive à
ce point là". Israël "devra alors assumer la responsabilité" de l’échec
des pourparlers".
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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