jeudi 8 août 2013

Bahreïn : le nouveau tour de vis de la royauté (Assawra)

Le 14 août prochain, jour de la fête de l’indépendance au Bahreïn, le principal parti d’opposition al-Wefaq appelle à descendre pacifiquement dans les rues pour réclamer l’instauration d’une vraie monarchie constitutionnelle. Hamad Ben Issa al-Khalifa, douzième souverain de Bahreïn, n’a pas l’intention de céder. Preuve de sa fermeté, l’homme a promulgué mardi soir une loi prohibant tout "rassemblement, manifestation ou sit-in" dans la capitale du pays, Manama.
Quelques jours avant cette décision royale, le ministre de l’Intérieur annonçait déjà l’interdiction d’un rassemblement à l’appel du Tamarrod, prévu lui aussi le 14 août. Le Tamarrod est l’équivalent bahreïni du mouvement égyptien du même nom, à l’origine de la chute du président Morsi, appelant à une démocratisation des sociétés arabes. Mais dans le pays de la famille al-Khalifa, ce mouvement fait désordre. Le pouvoir en place dans ce petit pays de 1,3 million d’habitants est vivement contesté depuis plusieurs années. Le roi, un sunnite, est accusé de marginaliser les chiites, qui représentent 60 % de la population, et d’en faire des citoyens de seconde zone, exclus notamment de certains postes de la fonction publique.
L’interdiction récente de manifester vient alourdir un peu plus le climat ambiant. Fin juillet, prenant prétexte d’une montée des violences, le pouvoir entérinait une loi alourdissant sévèrement les peines encourues par les auteurs d’"actes terroristes" pouvant aller jusqu’à la déchéance de nationalité, la prison à vie ou la peine de mort. Les opposants s’interrogeant eux sur la notion de "terroriste", assez floue à Bahreïn. Ce durcissement législatif des dernières semaines vise notamment à éviter le scénario tragique de 2011. Il y a deux ans, le Bahreïn était le théâtre d’une révolution avortée. Un mois avant même que la Syrie ne s’embrase, des milliers de manifestants appelaient à la démocratisation rapide et sensible du régime.
Face à la menace d’un coup d’État et à l’instauration fantasmée d’un régime chiite soutenu par l’Iran, la famille al-Khalifa - appuyée par 4 000 soldats (saoudiens pour la plupart) du Conseil de coopération du Golfe - réprimait dans le sang la contestation. Selon Human Right Watch, plus de 80 personnes sont mortes et des dizaines d’autres ont été emprisonnées. Début août, 12 chiites ont d’ailleurs été condamnés à des peines allant de 5 ans d’emprisonnement à la prison à vie, pour leur participation active au mouvement de révolte. Depuis 2011, la famille royale s’emploie donc à effacer toutes traces de l’embryon révolutionnaire, dans les têtes comme dans les rues. De la place de la Perle, ancien lieu de ralliement des manifestants, il ne reste aujourd’hui plus rien. Rasée par les bulldozers, la place "Tahrir bahreïnie" a laissé place à un immense carrefour : circulez, il n’y a plus rien à voir.
  
(08-08-2013 - Assawra avec les agences de presse)

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