Le 14 août prochain, jour de la fête de l’indépendance au Bahreïn, le
principal parti d’opposition al-Wefaq appelle à descendre pacifiquement
dans les rues pour réclamer l’instauration d’une vraie monarchie
constitutionnelle. Hamad Ben Issa al-Khalifa, douzième souverain de
Bahreïn, n’a pas l’intention de céder. Preuve de sa fermeté, l’homme a
promulgué mardi soir une loi prohibant tout "rassemblement,
manifestation ou sit-in" dans la capitale du pays, Manama.
Quelques jours avant cette décision royale, le ministre de l’Intérieur
annonçait déjà l’interdiction d’un rassemblement à l’appel du Tamarrod,
prévu lui aussi le 14 août. Le Tamarrod est l’équivalent bahreïni du
mouvement égyptien du même nom, à l’origine de la chute du président
Morsi, appelant à une démocratisation des sociétés arabes. Mais dans le
pays de la famille al-Khalifa, ce mouvement fait désordre. Le pouvoir en
place dans ce petit pays de 1,3 million d’habitants est vivement
contesté depuis plusieurs années. Le roi, un sunnite, est accusé de
marginaliser les chiites, qui représentent 60 % de la population, et
d’en faire des citoyens de seconde zone, exclus notamment de certains
postes de la fonction publique.
L’interdiction récente de manifester vient alourdir un peu plus le
climat ambiant. Fin juillet, prenant prétexte d’une montée des
violences, le pouvoir entérinait une loi alourdissant sévèrement les
peines encourues par les auteurs d’"actes terroristes" pouvant aller
jusqu’à la déchéance de nationalité, la prison à vie ou la peine de
mort. Les opposants s’interrogeant eux sur la notion de "terroriste",
assez floue à Bahreïn. Ce durcissement législatif des dernières semaines
vise notamment à éviter le scénario tragique de 2011. Il y a deux ans,
le Bahreïn était le théâtre d’une révolution avortée. Un mois avant même
que la Syrie ne s’embrase, des milliers de manifestants appelaient à la
démocratisation rapide et sensible du régime.
Face à la menace d’un coup d’État et à l’instauration fantasmée d’un
régime chiite soutenu par l’Iran, la famille al-Khalifa - appuyée par 4
000 soldats (saoudiens pour la plupart) du Conseil de coopération du
Golfe - réprimait dans le sang la contestation. Selon Human Right Watch,
plus de 80 personnes sont mortes et des dizaines d’autres ont été
emprisonnées. Début août, 12 chiites ont d’ailleurs été condamnés à des
peines allant de 5 ans d’emprisonnement à la prison à vie, pour leur
participation active au mouvement de révolte. Depuis 2011, la famille
royale s’emploie donc à effacer toutes traces de l’embryon
révolutionnaire, dans les têtes comme dans les rues. De la place de la
Perle, ancien lieu de ralliement des manifestants, il ne reste
aujourd’hui plus rien. Rasée par les bulldozers, la place "Tahrir
bahreïnie" a laissé place à un immense carrefour : circulez, il n’y a
plus rien à voir.
(08-08-2013 - Assawra avec les agences de presse)
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