dimanche 7 décembre 2014

Israël/Palestine : Les Bédouins dénoncent leur expulsion au profit des colonies israéliennes en Cisjordanie

Des enfants jouent pieds nus au ballon tandis que des chèvres paissent alentour: la paisible vie du village bédouin de Khan al-Ahmar, en Cisjordanie occupée, est aujourd'hui menacée par un projet israélien de relocalisation de ses habitants.
L'administration israélienne affirme à l'AFP que ces bédouins dont les tentes sont plantées à quelques kilomètres de Jérusalem seront installés dans des logements près de Jéricho, à une dizaine de kilomètres plus à l'est. Ce projet "vise à améliorer leurs conditions de vie en réglementant leurs habitations et en leur donnant accès à des infrastructures correctes pour l'eau, l'électricité, les égouts et le système scolaire", assure-t-elle dans une réponse écrite à l'AFP.
Mais Aïd Khamiss Souilem, porte-parole de la tribu des Jahalines, assure qu'à Khan al-Ahmar, personne ne croit à ce discours. "Israël essaye de dire qu'en tant qu'Etat démocratique, il se soucie de rendre la vie des bédouins meilleure, mais la question n'est ni économique ni sociale: la question ici, c'est celle de Jérusalem", dit-il.
Car, souligne M. Souilem, de la limite orientale de Jérusalem-Est, occupée et annexée par Israël, jusqu'à la mer Morte, qui borde la Jordanie, il ne subsiste plus aucune présence palestinienne: Khan al-Ahmar est actuellement encerclé par les colonies israéliennes, illégales aux yeux de la communauté internationale, et une fois les Jahalines délogés, "la région allant de Jérusalem à la mer Morte sera totalement israélienne et le rêve des deux Etats sera mort et enterré".
Les Palestiniens réclament depuis des décennies un Etat indépendant dans les frontières de 1967, soit 22% de la Palestine historique regroupant la bande de Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem-Est dont ils veulent faire leur capitale. Ils affirment qu'Israël cherche à morceler un peu plus leur terre pour empêcher l'installation d'un Etat viable.
Les organisations internationales et de défense des droits de l'Homme dénoncent depuis des années une tentative délibérée de déplacer la population palestinienne, notamment dans les 60% de la Cisjordanie sous son contrôle total, dits "zone C".
Si les Jahalines étaient déplacés vers Jéricho, alors les colonies qui encerclent Jérusalem-Est couperaient de fait en deux la Cisjordanie, séparant la partie au nord de Jérusalem de celle au sud de la Ville sainte.
"Si nous ne restons pas, il n'y aura jamais d'Etat palestinien", affirme M. Souilem. Alors, dit-il, "nous ne bougerons pas". Le seul endroit où il accepterait d'aller, c'est son village bédouin du Néguev, dans le sud, que ses parents ont été forcés de quitter quand l'Etat hébreu a été créé en 1948 et qui est désormais habité par des Israéliens.
"Ou alors le monde entier doit reconnaître la Palestine et j'y aurai un village bédouin reconnu", espère-t-il.
Pourtant, l'administration israélienne assure avoir discuté de son plan de transfert "une dizaine" de fois avec des dignitaires bédouins et soutient que le projet vise à "améliorer la qualité de vie de la population bédouine". Faux, rétorque Shlomo Lecker, qui défend les Jahalines.
Pour cet avocat israélien, Nouweima, où les bédouins doivent être transférés "est un ghetto où ils veulent entasser 12.000 personnes pour vider leurs terres". "Depuis 15 ans, la colonisation s'étend dans cette zone dont les Palestiniens sont éloignés. Le plan concernant les bédouins s'inscrit dans cette campagne et concerne des zones que l'Etat veut annexer", explique-t-il.
De fait, souligne l'agence de l'ONU pour l'aide aux réfugiés palestiniens (UNRWA), les plus de 12.000 bédouins menacés de "transfert forcé" vivent "dans la zone dite E1 et dans celle de (la colonie de) Maalé Adoumim près de Jérusalem, des régions choisies pour la construction de nouvelles colonies israéliennes".
Awda Jahaline, un bédouin qui vit, lui, à Jabal al-Baba, près de Maalé Adoumim, refuse également son transfert et dénonce un "massacre" contre les bédouins. En mesure de rétorsion, affirme-t-il, Israël "fait pression en jouant sur nos autorisations de travail sur son sol". Mais, dit-il, même privé du droit de travailler en Israël, lui non plus ne partira pas.
"Ils veulent que nous quittions les terres où nous sommes nés", accuse-t-il. "Mais pour nous déplacer vers d'autres terres qu'ils ont aussi volées à des Palestiniens".

(06-12-2014)

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