jeudi 4 décembre 2014

Tunisie: le Parlement élit un ancien ministre de Bourguiba à sa tête

Le premier Parlement tunisien démocratiquement élu a choisi jeudi comme son président Mohammed Ennaceur, 80 ans, un ancien ministre du père de l'indépendance Habib Bourguiba issu du parti anti-islamiste Nidaa Tounès, vainqueur des législatives.
M. Ennaceur, seul candidat, a reçu les voix de 174 élus sur les 214 présents. Dans un bref discours, il a remercié ses collègues et promis que le Parlement agira dans "un cadre consensuel", garantira les "libertés et les droits de l'Homme" et s'attèlera "à bâtir un Etat de droit".
Les députés ont aussi élu jeudi deux vice-présidents, Abdelfattah Mourou, l'un des fondateurs du parti islamiste Ennahda, deuxième des législatives, ainsi que Faouzia Ben Fedha, élue de la troisième formation du Parlement, l'Union patriotique libre, un parti inclassable dirigé par l'homme d'affaires et patron de club de foot Slim Riahi.
Malgré leur opposition frontale, les deux premiers partis se sont ainsi accordés pour élire un représentant de chacune des formations. Nidaa Tounès a exclu de former une grande coalition avec ses principaux adversaires d'Ennahda, sans pour autant exclure des accords au cas par cas, alors que les tractations pour former une majorité et un gouvernement doivent avoir lieu après la présidentielle courant décembre.
Mohamed Ennaceur, vice-président de Nidaa Tounès, est un ancien ministre des Affaires sociales de Bourguiba. Il s'agit d'un proche de Béji Caïd Essebsi, 88 ans, chef de Nidaa Tounès et favori du deuxième tour de la présidentielle face au président sortant Moncef Marzouki.
Sous le régime de Zine El Abidine Ben Ali, qui a renversé Bourguiba en 1987, M. Ennaceur a quitté le devant de la scène politique sans pour autant rompre avec elle, devenant représentant de la Tunisie auprès des institutions des Nations unies à Genève.
Après la révolution de janvier 2011, il a retrouvé le portefeuille des Affaires sociales dans le gouvernement de M. Caïd Essebsi, qui a organisé cette année-là les élections de l'Assemblée nationale constituante (ANC) remportées par Ennahda.
L'ANC, qui a adopté en janvier 2014 une Constitution largement considérée comme un modèle de libéralisme dans le monde arabe, a exercé le pouvoir législatif jusqu'à l'élection le 26 octobre d'un nouveau Parlement, l'Assemblée des représentants du peuple.
Nidaa Tounès dispose de 86 élus et les islamistes de 69 dans ce qui est le premier Parlement démocratiquement élu en Tunisie.
Le vote pour sa présidence aurait dû avoir lieu mardi, lors de sa toute première réunion, mais il avait été repoussé faute d'accord sur un candidat susceptible d'obtenir la majorité absolue des votes des députés.
La transition post-révolutionnaire doit s'achever cette année avec l'élection d'un chef de l'Etat courant décembre. La date du deuxième tour de scrutin présidentiel n'a pas encore été fixée, la justice examinant encore des recours déposés après le premier tour le 23 novembre.
Les deux finalistes se sont invectivés par médias interposés depuis le premier tour.
M. Caïd Essebsi a pointé du doigt le président sortant, élu en 2011 par la Constituante avec l'appui d'Ennahda, l'accusant de compromissions avec les islamistes et de courtiser les jihadistes.
M. Marzouki considère son concurrent comme le représentant du régime déchu, celui-ci ayant servi comme ministre sous le régime de Bourguiba puis au début des années 1990 comme président du Parlement de Ben Ali.

(04-12-2014)

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