Le premier Parlement tunisien démocratiquement élu a choisi jeudi comme
son président Mohammed Ennaceur, 80 ans, un ancien ministre du père de
l'indépendance Habib Bourguiba issu du parti anti-islamiste Nidaa
Tounès, vainqueur des législatives.
M. Ennaceur, seul candidat, a reçu les voix de 174 élus sur les 214
présents. Dans un bref discours, il a remercié ses collègues et promis
que le Parlement agira dans "un cadre consensuel", garantira les
"libertés et les droits de l'Homme" et s'attèlera "à bâtir un Etat de
droit".
Les députés ont aussi élu jeudi deux vice-présidents, Abdelfattah
Mourou, l'un des fondateurs du parti islamiste Ennahda, deuxième des
législatives, ainsi que Faouzia Ben Fedha, élue de la troisième
formation du Parlement, l'Union patriotique libre, un parti inclassable
dirigé par l'homme d'affaires et patron de club de foot Slim Riahi.
Malgré leur opposition frontale, les deux premiers partis se sont ainsi
accordés pour élire un représentant de chacune des formations. Nidaa
Tounès a exclu de former une grande coalition avec ses principaux
adversaires d'Ennahda, sans pour autant exclure des accords au cas par
cas, alors que les tractations pour former une majorité et un
gouvernement doivent avoir lieu après la présidentielle courant
décembre.
Mohamed Ennaceur, vice-président de Nidaa Tounès, est un ancien ministre
des Affaires sociales de Bourguiba. Il s'agit d'un proche de Béji Caïd
Essebsi, 88 ans, chef de Nidaa Tounès et favori du deuxième tour de la
présidentielle face au président sortant Moncef Marzouki.
Sous le régime de Zine El Abidine Ben Ali, qui a renversé Bourguiba en
1987, M. Ennaceur a quitté le devant de la scène politique sans pour
autant rompre avec elle, devenant représentant de la Tunisie auprès des
institutions des Nations unies à Genève.
Après la révolution de janvier 2011, il a retrouvé le portefeuille des
Affaires sociales dans le gouvernement de M. Caïd Essebsi, qui a
organisé cette année-là les élections de l'Assemblée nationale
constituante (ANC) remportées par Ennahda.
L'ANC, qui a adopté en janvier 2014 une Constitution largement
considérée comme un modèle de libéralisme dans le monde arabe, a exercé
le pouvoir législatif jusqu'à l'élection le 26 octobre d'un nouveau
Parlement, l'Assemblée des représentants du peuple.
Nidaa Tounès dispose de 86 élus et les islamistes de 69 dans ce qui est le premier Parlement démocratiquement élu en Tunisie.
Le vote pour sa présidence aurait dû avoir lieu mardi, lors de sa toute
première réunion, mais il avait été repoussé faute d'accord sur un
candidat susceptible d'obtenir la majorité absolue des votes des
députés.
La
transition post-révolutionnaire doit s'achever cette année avec
l'élection d'un chef de l'Etat courant décembre. La date du deuxième
tour de scrutin présidentiel n'a pas encore été fixée, la justice
examinant encore des recours déposés après le premier tour le 23
novembre.
Les deux finalistes se sont invectivés par médias interposés depuis le premier tour.
M. Caïd Essebsi a pointé du doigt le président sortant, élu en 2011 par
la Constituante avec l'appui d'Ennahda, l'accusant de compromissions
avec les islamistes et de courtiser les jihadistes.
M. Marzouki considère son concurrent comme le représentant du régime
déchu, celui-ci ayant servi comme ministre sous le régime de Bourguiba
puis au début des années 1990 comme président du Parlement de Ben Ali.
(04-12-2014)
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