De récentes visites en Russie de responsables et d'opposants syriens ont
permis à Moscou d'arracher un accord sur une relance des discussions
pour tenter de mettre fin à la guerre en Syrie, selon des participants
des deux bords.
Il s'agit d'une acceptation de principe des deux parties sans qu'une date ne soit encore avancée pour lancer les négociations.
La Russie a reçu tour à tour en novembre un groupe d'opposants civils et
militaires mené par l'ancien chef de la Coalition Moaz al-Khatib, puis
une délégation du régime conduite par le ministre syrien des Affaires
Étrangères Walid Mouallem.
"Les réunions avec (le président russe Vladimir) Poutine et (son
ministre des Affaires étrangères Sergueï) Lavrov ont été très
positives", a affirmé à l'AFP Bouthaina Chaabane, conseillère du
président Bashar al-Assad et membre de la délégation.
"La Russie a pris l'initiative de rechercher sérieusement une solution
politique via le dialogue avec l'opposition. Elle a reçu l'accord du
gouvernement syrien", a-t-elle ajouté, jointe à Damas par téléphone.
Moscou est avec l'Iran le principal allié du régime syrien face à une
rébellion armée appuyée par les pays occidentaux et arabes.
Selon une source proche de la délégation, "il n'y a pas encore de
calendrier pour une discussion avec l'opposition. Les Russes voulaient
savoir si nous acceptions l'idée et nous leur avons répondu qu'il n'y
avait pas de problème de notre côté".
"Les Russes sont en contact avec des personnes mais nous n'avons même
pas discuté de qui il s'agissait. Ils nous ont dit: 'Nous avons des
contacts et si vous acceptez l'idée, nous voulons commencer à préparer
un dialogue à Moscou'", a ajouté ce responsable sous couvert d'anonymat.
Au début de l'année, deux réunions s'étaient tenues à Genève sous le
parrainage conjoint des États-Unis, qui soutiennent l'opposition, et de
la Russie. Mais elles avaient lamentablement échoué, butant sur le
maintien d'Assad au pouvoir, la lutte contre le terrorisme et le
gouvernement transitoire.
- 'Moscou veut aller de l'avant' -
La situation a changé. Bachar al-Assad a été réélu en juin pour un
nouveau septennat lors d'un scrutin contesté par les Occidentaux et
l'opposition. La lutte contre les jihadistes du groupe État islamique,
qui contrôlent une partie de la Syrie et de l'Irak, est devenue une
priorité.
Dans ce contexte, le dirigeant de l'opposition modérée Moaz al-Khatib a
affirmé mardi à l'AFP être prêt à discuter avec le régime pour mettre
fin au carnage alors que le cap des 200.000 morts est désormais franchi.
"Pour nous, c'est dans l'intérêt du peuple syrien que nous nous
asseyions une bonne fois pour trouver le moyen de mettre fin à la
souffrance du peuple", a déclaré celui qui fut le président de la
Coalition syrienne avant de démissionner de son poste en 2013, tout en
restant une figure influente de l'opposition.
Joint au Qatar, il insiste sur la nécessité de résoudre le problème car
il "affecte chaque Syrien: le régime souffre, l'opposition souffre et
les gens souffrent".
Pour cela, il a décidé de faire un pas vers le régime en acceptant un
maintien temporaire d'Assad au pouvoir. "Bien sûr qu'il doit partir mais
l'idée que son mandat finisse à une date précise a du sens. S'il y a
une vision claire à annoncer au peuple syrien, il peut y avoir un
arrangement sur sa personne".
Parmi les personnes à la manoeuvre pour réunir des membres de
l'opposition, outre Moaz al-Khatib, figurent Qadri Jamil, ancien figure
de l'opposition et ancien vice-Premier syrien résidant à Moscou, ainsi
que Haytham Manna, un opposant de longue date basé à Paris, même si
chacun agit séparément.
Joint mardi par l'AFP à Moscou, M. Jamil a confirmé l'invitation de la
diplomatie russe aux discussions. "Mais je ne peux pas confirmer qu'une
rencontre est prévue en décembre à Moscou", a-t-il précisé, en indiquant
qu'il y avait "encore des nuances à régler".
La Coalition de l'opposition est opposée à cette approche, mais elle a perdu beaucoup d'influence sur le terrain.
Pour Waddah Abdel Rabbo, rédacteur en chef du quotidien al-Watan, proche
du pouvoir syrien, "il est clair que Moscou veut aller de l'avant". "Il
a désormais entre ses mains une grande partie des cartes syriennes et
jouit d'un poids au niveau mondial".
La situation difficile que traverse la Coalition, tiraillée entre ses
deux parrains, le Qatar et l'Arabie Saoudite, combinée à la focalisation
de Washington sur la lutte contre les jihadistes de l'EI ont poussé
Moscou à avancer ses propres pions.
Dans ce processus, quel rôle jouent les Etats-Unis? "Nous n'avons pas
posé la question à nos interlocuteurs russes mais je ne pense pas qu'ils
iraient de l'avant sans en faire part aux Américains. Ils veulent
essayer d'obtenir l'agrément de tous", a souligné une source proche de
la délégation syrienne.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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