Après en avoir débattu vendredi, l'Assemblée va adopter mardi, sans le
soutien de l'opposition, la résolution socialiste sur la reconnaissance
de l'Etat palestinien, un texte à portée symbolique au moment où les
Palestiniens tentent de faire avancer leur cause à l'ONU.
Dans le sillage de leurs homologues britanniques et espagnols, les
députés français vont à leur tour "inviter" leur gouvernement à
reconnaître officiellement l'Etat palestinien "en vue d'obtenir un
règlement définitif du conflit".Le texte, qui sera voté par la presque totalité de la gauche et rejeté par la grande majorité de la droite, a déjà été critiqué par Israël pour qui l'Assemblée commet "une grave erreur". Le Sénat se prononcera sur un texte similaire le 11 décembre.
L'initiative socialiste, si elle ne lie pas le gouvernement, s'inscrit cependant dans un mouvement global en Europe considérant la reconnaissance comme un moyen de faire pression pour relancer un processus de paix moribond et sauver la solution des deux Etats israélien et palestinien.
Lors du débat vendredi, qui ne s'est déroulé qu'en présence d'une cinquantaine de députés, la gauche a insisté sur la nécessité d'agir face à "l'impasse" de la situation: poursuite de la colonisation, échec des négociations sous égide américaine et multiplication des violences meurtrières.
"Notre initiative est une réponse au blocage", a expliqué le chef de file du groupe socialiste, Bruno Le Roux, plaidant à l'adresse de l'opposition "que l'objet de notre vote, ce n'est pas un débat de politique intérieure".
"Ce type de résolution doit ramener l'espoir, signifier aux Palestiniens qu'une issue politique est possible", a soutenu le coprésident du groupe écologiste François de Rugy. "Nous avons la responsabilité de réparer une injustice vieille de 60 ans", a renchéri le communiste François Asensi.
Les débats ont montré l'extrême sensibilité du sujet en France où vit la première communauté juive d'Europe, dont le vote a fortement basculé à droite ces dernières années. Un rassemblement est prévu à la mi-journée près de l'Assemblée à l'appel de la "Ligue de défense juive", une organisation controversée pour son radicalisme.
La droite, qui pense qu'une reconnaissance ne peut intervenir qu'à la conclusion de négociations, s'est montrée très hostile à une démarche qu'elle estime réservée à l'exécutif.
La Constitution "ne donne ni à l'Assemblée, ni au Sénat, le droit de réécrire la diplomatie", a affirmé l'UMP Pierre Lellouche. Un argument aussi avancé par le chef de file d'un groupe de la majorité, Roger-Gérard Schwartzenberg (radicaux de gauche) qui ne prendra pas part au vote car "c'est à l'exécutif de décider de la diplomatie".
Plusieurs députés UMP, chauds partisans d'Israël comme Christian Estrosi ou Claude Goasguen ont été très virulents vendredi, accusant le PS d'agir pour des raisons "électoralistes" à destination de "l'électorat musulman".
D'autres sont allés encore plus loin en mêlant tous les conflits de la région. "Le Hamas est l'équivalent de Daesh et d'Al-Qaïda", n'a pas hésité à lancer l'UDI Meyer Habib, député franco-israélien de la circonscription des Français de l'étranger incluant Israël et les territoires palestiniens, s'applaudissant mutuellement avec le FN Gilbert Collard pour qui les socialistes "embrassent le Hamas, le terrorisme".
Seuls une poignée d'UMP soutiennent la résolution, comme l'ancien président de la commission des Affaires étrangères Axel Poniatowski, favorable à la reconnaissance "pour que les deux parties soient dans un rapport mieux équilibré dans les négociations".
Devant les députés, Laurent Fabius a de nouveau répété que "la France reconnaîtra(it) l'Etat palestinien", sans cependant s'engager sur un délai. Paris se veut à la manoeuvre diplomatique sur ce dossier et le ministre des Affaires étrangères a relancé l'idée d'organiser une conférence internationale sur le Proche-Orient.
Mais les enjeux diplomatiques se situent actuellement à l'Onu, où les Palestiniens veulent soumettre au Conseil de sécurité un texte réclamant la fin de l'occupation israélienne en novembre 2016.
Ce projet, soutenu par la Ligue arabe, risque de se heurter au véto
américain. Paris travaille donc avec ses partenaires européens à un
projet alternatif demandant la reprise du processus de paix et qui
prévoirait un délai de deux ans pour que la négociation aboutisse.
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