La junte militaire en Égypte doit céder le pouvoir au vainqueur de la
première élection présidentielle organisée dans le pays depuis la chute
de Hosni Moubarak, en février 2011, a insisté mercredi la chef de la
diplomatie américaine Hillary Clinton. "Nous estimons qu’il est
impératif que l’armée remplisse sa promesse faite au peuple égyptien de
céder le pouvoir au vainqueur légitime" du scrutin de dimanche, a
indiqué Hillary Clinton, lors d’une discussion à Washington, en présence
de l’un de ses prédécesseurs, James Baker.
Certaines actions des autorités militaires ces derniers jours se sont
avérées "clairement gênantes", a ajouté Hillary Clinton, soulignant :
"L’armée doit adopter un rôle approprié qui n’est pas celui
d’interférer, de dominer ou d’essayer de corrompre l’autorité
constitutionnelle." Les militaires au pouvoir en Égypte n’ont cessé de
dire "une chose publiquement puis de revenir en arrière d’une certaine
manière, mais notre message à nous a toujours été le même : ils doivent
respecter le processus démocratique", a martelé la secrétaire d’État.
"Par cela, nous entendons des élections qui soient libres, justes et
légitimes, dont le vainqueur prenne non seulement la place de la
nouvelle autorité, mais reconnaisse aussi que la démocratie n’est pas
l’affaire d’une seule élection, une seule fois", a-t-elle précisé.
Peu après la fin du vote pour la présidentielle dimanche, la junte a
annoncé sa volonté de remettre les clés de l’exécutif au futur président
avant la fin du mois, tout en gardant pour elle le pouvoir législatif
et en contrôlant d’autres verrous institutionnels au nom de "l’équilibre
des pouvoirs". Ces dispositions ont été vivement contestées par les
Frères musulmans et les partis de la mouvance révolutionnaire, qui les
ont assimilées à "un coup d’État".
Peu avant les déclarations de la secrétaire d’État américaine,
l’annonce prévue jeudi des résultats de la présidentielle a été
repoussée, prolongeant l’incertitude sur le successeur de Moubarak, dans
le coma. Les deux candidats, celui des Frères musulmans Mohammed Morsi
et son rival, le dernier Premier ministre de l’ancien raïs, Ahmad
Chafiq, revendiquent tous deux la victoire.
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L’annonce des résultats de la présidentielle reportée
L’annonce des résultats de la première élection présidentielle en
Égypte depuis le départ, en février 2011, de l’ancien président Hosni
Moubarak, initialement prévue jeudi, a été reportée à une date non
précisée, a indiqué l’agence officielle MENA. Selon l’agence, "la
Commission électorale, dirigée par le juge Farouk Sultan (...), a décidé
de reporter l’annonce des résultats du second tour", qui a opposé les
16 et 17 juin l’ultime Premier ministre de Moubarak, le général à la
retraite Ahmad Chafiq, au Frère musulman Mohammed Morsi, qui ont tous
deux clamé leur victoire.
La Commission électorale examinait mercredi des recours déposés par
des avocats des deux candidats concernant des violations des règles
encadrant la campagne et le décompte des votes. Elle a indiqué dans un
communiqué qu’elle "poursuiv(ait) l’examen des recours" et que cela
nécessitait "plus de temps avant l’annonce des résultats définitifs".
Les Égyptiens attendent les résultats dans un contexte de vives
tensions politiques, notamment entre les Frères musulmans et l’armée qui
s’est attribué de larges pouvoirs. Une "déclaration constitutionnelle
complémentaire" promulguée dimanche par le Conseil suprême des forces
armées (CSFA), qui dirige le pays depuis seize mois, donne en effet à
l’armée de vastes prérogatives, qui réduisent considérablement la marge
de manoeuvre du futur président.
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L’attente nourrit les tensions
Les Egyptiens ne connaîtront pas ce jeudi, comme c’était pourtant
prévu, le nom de leur futur président, la commission électorale
réclamant un délai pour l’examen des recours déposés par les deux
candidats, Mohamed Morsi des Frères musulmans et Ahmed Chafik, issu des
rangs de l’armée et du régime d’Hosni Moubarak.
Ce report alimente dans les cafés du Caire et sur les réseaux sociaux
les rumeurs sur une intervention de l’armée, soupçonnée de préparer son
déploiement dans les grandes villes du pays. De sources militaires, on
répond que l’armée est simplement en état d’alerte de crainte
d’éventuelles violences après l’annonce des résultats de la
présidentielle.
Ce climat de tensions est exacerbé par l’incertitude sur l’état de
santé d’Hosni Moubarak. Condamné le 2 juin à la réclusion à perpétuité
pour la mort de manifestants durant la "révolution du Nil", l’ancien
président, âgé de 84 ans, a été transféré mardi soir dans un hôpital
militaire, où il alternerait périodes de coma et de réveil.
Pour la deuxième nuit consécutive, des milliers de manifestants se
sont rassemblés mercredi soir sur la place Tahrir du Caire, épicentre de
la révolution ayant abouti au renversement d’Hosni Moubarak 16 mois
plus tôt.
Ces manifestants exigent de l’armée, qui dirige le processus de
transition après avoir mis de côté Hosni Moubarak face à la pression de
la rue, qu’elle respecte sa promesse de transmettre le pouvoir aux
civils d’ici le 1er juillet.
Dans les faits, cet engagement risque de ne pas être honoré. En plein
dépouillement du scrutin présidentiel, le Conseil suprême des forces
armées (CSFA) vient de s’arroger le pouvoir législatif après la
dissolution du parlement issu des élections remportées par les
islamistes l’hiver dernier. Il a en outre par avance dépouillé le futur
chef de l’Etat de quasiment toute prérogative dans l’attente de la
rédaction de la future Constitution, tâche qu’il pourrait confier à une
commission formée par ses soins.
L’attente des résultats officiels de la présidentielle pourrait durer
plusieurs jours. Le week-end commence vendredi en Egypte, ce qui
pourrait prolonger l’incertitude jusqu’à dimanche.
Ce délai nourrit les soupçons des adversaires de l’armée dans un pays
habitué aux élections frauduleuses depuis que les militaires en ont
pris la direction en 1952.
"Il n’y a absolument aucune justification au report de l’annonce du
résultat", a déclaré mercredi un dirigeant des Frères musulmans, Essam
el Erian, à l’antenne d’Al Djazira.
"J’invite le général Chafik, qui a appris le sens de l’honneur au
sein de l’armée égyptienne, à s’exprimer ce soir pour féliciter le
véritable vainqueur, Mohamed Morsi", a-t-il ajouté, tout en écartant
l’hypothèse de violences : "Il n’y a absolument aucune raison de guerre
civile."
Quelques heures seulement après la fermeture des bureaux de vote
dimanche, les Frères musulmans ont affirmé que leur candidat était élu
avec 52% des voix.
Le camp Chafik s’est en revanche dit mercredi une nouvelle fois
certain de la victoire de l’ancien Premier ministre d’Hosni Moubarak,
même si l’un de ses porte-parole a évoqué un scrutin serré.
Ahmed Chafik a lui-même lancé mercredi un appel à l’unité nationale
et s’est dit prêt à participer à un gouvernement dirigé par les Frères
musulmans.
Cette lutte de pouvoir entre les islamistes et l’armée, dont les
candidats ont recueilli à eux deux moins de la moitié des suffrages au
premier tour, place les jeunes révolutionnaires laïques face à une
alternative douloureuse. Beaucoup, cependant, préfèrent encore voir
Mohamed Morsi élu plutôt qu’Ahmed Chafik.
"Toute tentative visant à nous imposer Chafik, toute tentative de
manipulation de la part du conseil militaire afin de nous l’imposer
plongera l’Egypte dans une période d’instabilité et de tensions", a
déclaré Ahmed Maher, du mouvement du 6-Avril, à Reuters.
"Nous descendrons dans les rues pour manifester."
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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