Des confiseries aux couches de bébé, les Syriens sont appelés à acheter
les produits "Made in Syria" à l'appel d'industriels qui se mobilisent
face au manque cruel de devises, aux sanctions et aux dommages de la
guerre civile.
"Nous voulons rappeler aux gens que nous sommes toujours là", explique
derrière son stand un vendeur d'ustensiles de cuisine "Heart".
L'usine de cette société a pourtant été détruite par les combats à Douma, une ville rebelle proche de la capitale syrienne.
Mais "Heart" a tenu à participer, avec une soixantaine d'autres
entreprises locales, à la foire qui se tient dans le complexe sportif
d'un quartier résidentiel de Damas.
Cet événement a été organisé par la Chambre d'industrie de la province
de Damas pour "promouvoir notre industrie en encourageant les gens à
acheter des produits syriens vendus moitié moins chers que les articles
importés", explique Mohammad Omar, l'un de ses responsables.
La foire a été un tel succès, selon M. Omar, qu'il a été décidé de la
renouveler chaque mois à Damas et de l'étendre à d'autres provinces
contrôlées par le régime, comme à Tartous (ouest) en mai.
L'enjeu est crucial pour les Syriens dont le pouvoir d'achat a été
considérablement écorné en quatre ans de guerre et dont la priorité est
d'assurer les besoins de base, à savoir la nourriture et le logement.
Quatre Syriens sur cinq vivent désormais sous le seuil de pauvreté,
selon l'ONU.
Dania, 30 ans, était ainsi venue "se promener" à la foire. Mais elle est
repartie avec un sac si lourd que c'est son mari qui le porte. "Nous
avons acheté du thym, des produits de nettoyage, du lait, du fromage. Ça
vaut le coup, c'est moitié moins cher qu'au marché", affirme la jeune
femme.
Pour Dania comme pour de nombreux Syriens, les produits importés sont hors de portée.
La livre syrienne a en effet perdu plus des trois-quarts de sa valeur
depuis quatre ans: il en faut 300 pour un dollar contre 50 en mars 2011.
Pour enrayer la pénurie de devises, les autorités syriennes ont
récemment annoncé un plan pour "accroître les exportations et limiter
les importations". "Ce que nous pouvons produire ici ne sera plus
importé. Nous pouvons fournir le marché avec beaucoup de produits", a
expliqué Fares Shehabi, président de la fédération des Chambres
d'industrie.
Le défi est de taille pour les entreprises confrontées aux sanctions
internationales, qui ont fait chuter les exportations, et aux
conséquences de la guerre, qui a bouleversé le marché intérieur.
En 2014, les exportations n'ont atteint que 1,8 milliard de dollars
contre 11,3 en 2010, selon le journal pro-gouvernemental Al-Watan. Et le
ratio entre exportations et importations s'est nettement détérioré, de
82,7% en 2010 à 29,7% en 2014.
La maison Halwani, l'une des plus importantes fabriques de halva,
confiserie à base de sésame, d'amandes et de miel, a ainsi vu ses ventes
s'écrouler de 60% en quatre ans.
"C'est en province que se trouvaient les plus grands consommateurs de
halva et nous avons perdu ce marché", explique Louay Halwani, son
propriétaire. Car la guerre civile a coupé les lignes de communication
tandis que des localités de la périphérie de la capitale, comme Douma,
sont soumises à un siège du régime ou sont détruites par les combats.
Pour compenser cette chute, "nous voulons approcher le consommateur
directement sans passer par des intermédiaires", souligne M. Halwani,
bien décidé à sauver la maison fondée en Syrie en 1830 par son arrière
grand-père et installée depuis trente ans à Bab Msala, au coeur de
Damas.
De son côté, Ahmad a fortement baissé les prix du prêt-à-porter et de la
lingerie qu'il propose, car ses ventes ont chuté de 50%.
"Nous avons de nouvelles jupes en tergal de différentes couleurs pour
seulement 2.000 livres (7 dollars)...C'est trois fois rien",
annonce-t-il pour convaincre une jeune cliente, portant jeans moulant et
foulard sur la tête. Elle choisit plutôt un top à paillettes, imitation
d'une grande marque française, à cinq dollars.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire