La situation humanitaire est "catastrophique" à Aden, s'est alarmée la
Croix-Rouge alors que la grande ville du sud du Yémen est le théâtre de
combats quotidiens entre rebelles chiites liés à l'Iran et partisans du
président soutenu par l'Arabie Saoudite.
Mercredi, la Croix-Rouge espère faire atterrir à Sanaa un premier avion
d'aide avec à son bord 16 tonnes de médicaments chargées en Jordanie.
Une deuxième cargaison de 32 tonnes pourrait suivre jeudi, selon
Marie-Claire Feghali, la porte-parole du Comité international de la
Croix-Rouge (CICR) à Sanaa.
Cette aide est attendue avec impatience au Yémen, où "la situation humanitaire est très critique", a-t-elle précisé.
Ce pays pauvre de la Péninsule arabique est soumis depuis le 26 mars aux
raids aériens d'une coalition arabe menée par Ryad en soutien au
président Abd Rabbo Mansour Hadi. Ce dernier a été contraint de quitter
le pays sous la pression de ses adversaires, les rebelles Houthis alliés
à des militaires restés fidèles à l'ex-chef de l'Etat Ali Abdallah
Saleh.
Mardi,
les pays du Golfe ont proposé au Conseil de sécurité de l'ONU un projet
de résolution qui frapperait de sanctions le chef des rebelles Houthis
et le fils aîné de l'ex-président yéménite, Ahmed Ali Abdallah Saleh.
Aux termes de ce texte, dont l'AFP a eu copie, le Conseil impose aussi
aux Houthis et à leurs alliés un embargo sur les armes et les somme de
cesser les hostilités et d'abandonner le pouvoir "immédiatement et sans
conditions".
Outre les liaisons aériennes et maritimes désormais coupées, les
infrastructures ont été sérieusement affectées par les raids et
l'aggravation des combats, en particulier dans le sud.
"La situation est catastrophique" à Aden, où "la guerre a gagné tous les coins de la ville", a précisé Mme Feghali.
En raison des combats, la plupart des quelque 800 000 habitants "ne
peuvent même pas s'enfuir". Et "des cadavres restent parfois abandonnés
dans la rue, personne ne pouvant s'aventurer pour aller les retirer",
relate la porte-parole du CICR.
"La situation est encore pire dans les hôpitaux", déplore Mme Feghali,
dont l'organisation a demandé en vain une pause humanitaire pour
acheminer des secours.
Présent au Yémen, Médecins sans frontières (MSF) juge également que la
situation "empire de jour en jour" à Aden, selon la chef de sa mission,
Marie-Elisabeth Ingres.
"Notre
priorité est de trouver un moyen d'envoyer une équipe médicale de
soutien", a-t-elle dit, ajoutant qu'une équipe attendait à Djibouti "le
feu vert de la coalition".
Le porte-parole de la coalition, le général Ahmed Assiri, a indiqué plus
tard qu'un permis avait été délivré à un bateau à Djibouti transportant
de l'aide et des médicaments pour qu'il se rende au Yémen.
Mardi, les opérations d'évacuation se sont poursuivies. A Sanaa, trois
avions indiens ont embarqué 604 personnes, dont une centaines de
Yéménites, pour Djibouti, a indiqué à l'AFP un responsable de
l'aéroport.
La marine pakistanaise a aussi annoncé mardi l'évacuation par bateau
d'une centaine de ses ressortissants et d'une trentaine d'étrangers.
Les combats, qui se sont concentrés ces derniers jours dans le sud, ont
fait depuis dimanche au moins 159 morts, dont 63 à Aden, selon un bilan
compilé par l'AFP à partir de différentes sources.
Mardi, l'aviation de la coalition a lancé des raids contre une position
rebelle dans la banlieue nord d'Aden, tuant huit miliciens, et contre
des camps militaires dans la province de Taëz, plus au nord, faisant des
morts et des blessés, selon des sources militaires.
Dans son opération militaire, l'Arabie saoudite a reçu l'appui des Etats
Unis, dont le vice-secrétaire d'Etat Antony Blinken a indiqué mardi à
Ryad que son pays accélérait ses livraisons d'armes au royaume avec
lequel il partageait les renseignements et renforçait la coordination.
L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a annoncé mardi qu'au moins
540 personnes avaient été tuées et 1700 blessées au Yémen depuis le 19
mars, une semaine avant le début de la campagne aérienne.
De son côté, le Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef) évalue
qu'"au moins 74 enfants ont été tués et 44 blessés depuis le 26 mars".
Plus de 100 000 personnes ont été déplacées en raison de la guerre, selon l'Unicef.
Deux adolescents ont été tués et plusieurs blessés mardi quand une
roquette a touché une école près d'une base militaire dans le province
d'Ibb (sud-ouest), a indiqué un responsable local qui ne pouvait dire si
le tir provenait d'une frappe aérienne ou de l'artillerie des Houthis.
Les terroristes chiites et leurs alliés, qui se sont emparés l'an dernier
de Sanaa et de vastes régions du nord et du centre, ont réussi début
mars à avancer vers Aden. Les forces favorables au président tentent de
desserrer l'étau des Houthis sur la ville, avec le soutien des raids de
la coalition.
Le conflit a été au menu des discussions du président turc Recep Tayyip Erdogan en visite en Iran.
M. Erdogan, un islamo-conservateur, avait dénoncé fin mars ce qu'il a
appelé la volonté de "domination" de l'Iran au Yémen et a été accusé en
retour par Téhéran d'alimenter l'instabilité au Moyen-Orient.
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