Les Soudanais commençent à voter lundi pour leur prochain président,
mais Omar el-Béchir, au pouvoir depuis 25 ans, est assuré d'être
reconduit, la majeure partie de l'opposition boycottant ce scrutin déjà
critiqué par la communauté internationale.
M. Béchir, 71 ans, affronte 15 concurrents peu connus lors de cette
élection organisée jusqu'à mercredi. Les 13,3 millions d'électeurs
soudanais, pays à l'économie exsangue et miné par des rébellions armées,
sont également appelés à choisir, dans le même temps, leurs
parlementaires et leurs représentants régionaux.
Les 7.100 bureaux de vote seront ouverts de 05H00 à 15H00 GMT durant les
trois jours de scrutin, qui se déroulera sous l'oeil d'observateurs de
15 organisations internationales, dont la Ligue arabe et l'Union
africaine.
Peu après 05H00 GMT, des volontaires attendaient les premiers votants à
l'intérieur d'un bureau de vote du quartier El-Daïm à Khartoum, devant
lequel des représentants des candidats avaient installé des stands, a
constaté l'AFP.
Le scrutin ne soulevait pas l'enthousiasme dans les rues de la capitale,
très calmes lundi matin, alors que le régime a décrété, dimanche, un
jour chômé pour cette élection.
"Tout le monde connaît le résultat", soulignait un commerçant, Moutawakil Babikir, qui a décidé de ne pas se rendre aux urnes.
La campagne, qui s'est achevée vendredi, a été terne. A côté des
portraits de M. Béchir placardés le long des avenues de Khartoum, les
affiches des autres candidats sont restées rares.
- 'Aucune surprise à attendre' -
Le général Béchir est arrivé au pouvoir en juin 1989, en renversant par
un coup d'Etat un gouvernement issu d'élections démocratiques. Le Parti
du Congrès national (NCP), sa formation, et ses alliés contrôlent depuis
les rouages de l'Etat, et les autorités répriment dissidents et médias.
Ces élections sont les deuxièmes multipartites organisées depuis 1989,
mais comme en 2010 la plupart des partis de l'opposition les boycottent,
estimant que le contexte politique ne permet pas un scrutin libre.
Le NCP "est quasiment seul en lice. Il n'y a donc aucune surprise à
attendre" des élections, dont les résultats sont attendus fin avril,
souligne Khaled al-Tijani, un commentateur politique.
L'Union européenne a d'ores et déjà estimé que le scrutin ne pouvait
"donner un résultat crédible et légitime" car "le dialogue est
contourné, certains groupes exclus et les droits civiques et politiques
violés".
La Norvège, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont aussi souligné dans
un communiqué commun l'absence d'"un environnement favorable à des
élections participatives et crédibles".
En 2010, la communauté internationale avait déjà critiqué le scrutin,
les observateurs affirmant qu'il ne respectait pas les normes
internationales.
Jeudi, à quelques jours du vote, Khartoum a libéré deux opposants,
Farouk Abou Issa et Amine Makki Madani, arrêtés en décembre après avoir
signé un accord unifiant les rangs de l'opposition. Une décision visant,
selon leur avocat, à alléger la pression internationale sur le régime,
accusé de chercher à étouffer toute voix dissidente.
Dimanche, la police a dispersé à coups de bâtons une manifestation de
quelques centaines d'étudiants mobilisés contre le scrutin, à Port
Soudan (est), selon des témoins. Les protestataires scandaient notamment
"le peuple veut la chute du régime".
A Kalma, au Darfour-Sud, région en proie à un conflit depuis 12 ans, des
centaines d'habitants d'un camp de déplacés ont aussi manifesté sous le
slogan "Non aux élections du sang".
Durant la campagne, M. Béchir, qui brigue un nouveau mandat de cinq ans,
a promis d'apporter "sécurité et stabilité politique et économique".
Le défi est énorme. Déjà durement affectée par l'embargo imposé par les
Etats-Unis depuis 1997 en raison de violations présumées de droits de
l'Homme et des liens du régime avec le terrorisme, l'économie a subi un
nouveau coup dur avec l'indépendance en 2011 du Sud, qui a privé
Khartoum de 75% de ses revenus pétroliers.
L'inflation est galopante et le taux de chômage supérieur à 30%.
Le Soudan, qui compte 38 millions d'habitants, est aussi isolé sur la
scène internationale, M. Béchir étant réclamé par la Cour pénale
internationale pour crimes contre l'humanité au Darfour.
Les violences touchent aussi depuis 2011 les Etats du Kordofan-Sud et du Nil Bleu, avec des rébellions armées.
Pour des "raisons de sécurité", le vote ne sera pas organisé dans un
secteur du Darfour et dans sept du Kordofan-Sud, a décidé la Commission
électorale.
Les rebelles ont menacé pour leur part d'empêcher le scrutin dans
l'ensemble du Nil Bleu et du Kordofan-Sud, mais l'armée a assuré qu'elle
"ne permettra pas" que son déroulement soit entravé.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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