Israël a vivement dénoncé jeudi l'accord cadre sur le nucléaire iranien
après avoir multiplié les mises en garde, agitant même la menace d'un
recours à la force, ce qui est néanmoins peu probable selon des experts.
Le chef du gouvernement israélien Benjamin Netanyahu s'est montré l'un
des plus farouches détracteurs de l'accord négocié en Suisse, alors que
son pays est historiquement la cible d'appels à la destruction par les
dirigeants de la République islamique.
Selon lui, il est impossible de laisser en confiance aux Iraniens la
capacité d'enrichir de l'uranium. Il rappelle à l'envi leurs
dissimulations passées et évoque la menace plus globale de l'expansion
iranienne, en Irak, en Syrie, au Liban et à présent au Yémen.
Netanyahu a vivement réagi à l'annonce de l'accord cadre à Lausanne.
Cet accord, s'il est appliqué, menace la survie d'Israël, a déclaré au
président américain Barack Obama le Premier ministre, cité vendredi par
son porte-parole sur son compté Twitter.
Il a ajouté que l'accord d'étape mènerait l'Iran à la bombe nucléaire et aux risques "d'une guerre horrible".
Un responsable gouvernemental israélien a de son côté décrié "un mauvais
accord cadre qui conduira à un mauvais et dangereux accord" final. "Si
un accord (final) est conclu sur la base de cet accord cadre, ce sera
une erreur historique qui rendra le monde beaucoup plus dangereux".
Il "donne une légitimité internationale au programme nucléaire iranien,
dont l'unique but est de fabriquer la bombe atomique", a-t-il affirmé.
Netanyahu n'avait pas hésité à défier la Maison Blanche en allant le 3
mars dire devant le Congrès américain tout le mal qu'il pensait des
tractations. Cet épisode a contribué à l'une des pires crises dans les
relations entre Israël et les Etats-Unis.
Israël a conçu une grande frustration à ne pas être associé à ces
discussions qui, estime Yaacov Amidror, ancien conseiller à la sécurité
nationale de Netanyahu, le concernent plus directement que les
Etats-Unis. Les Américains se sont employés à tenir les Israéliens à
l'écart de crainte qu'ils n'essaient de saborder les discussions par des
fuites.
D'après Yoel Guzansky, ancien chef des questions liées à l'Iran au
Conseil de sécurité nationale, et Yossi Kuperwasser, directeur général
au ministère des Affaires stratégiques de 2011 à 2014, Israël devrait
dire qu'il n'est pas lié par cet accord --qui confère un surcroît de
légitimité à l'Iran-- et fera tout ce qu'il peut pour se protéger.
Le ministre israélien des Renseignements, Youval Steinitz, a d'ores et
déjà réaffirmé jeudi que toutes les options, y compris l'action
militaire, étaient envisagées face à la menace d'un Iran doté de l'arme
nucléaire. Il a assuré que son pays agirait dans les domaines de la
diplomatie et du Renseignement, mais "si nous n'avons pas le choix,
(...) l'option militaire est sur la table", a-t-il dit.
Netanyahu ne cesse de proclamer qu'Israël fera tout pour assurer sa sécurité.
"Le plus important, ce sera d'améliorer et d'investir dans les capacités
militaires et le renseignement pour jouer les chiens de garde" et
aboyer si l'Iran entreprend de produire la bombe, estime M. Kuperwasser.
Netanyahu devrait aussi maintenir la pression sur tous ceux qui
pensent comme lui dans la région, avec l'espoir dans un premier temps
que l'accord ne prendra pas chair d'ici à juin, dit-il. Cela donnera
lieu à une singulière convergence d'intérêts avec les pays arabes de la
région, note-t-il.
L'éventualité d'une attaque israélienne contre un site nucléaire iranien
n'est pas à exclure, mais elle est très faible. Israël passerait pour
celui qui menace la sécurité globale, juge M. Guzansky. Evidemment, si
l'Iran trichait, "ce serait une autre histoire", ajoute-t-il. Mais, "si
vous avez une option militaire crédible, l'Iran veillera à ne pas vous
pousser à vous en servir", abonde M. Kuperwasser.
D'après M. Guzansky, Israël doit à présent obtenir des Etats-Unis des
assurances selon lesquelles, "si les Etats-Unis détectent une violation
iranienne de l'accord, il se passera X, Y, Z. Les Etats-Unis et Israël
doivent s'entendre sur ce que sera X, Y, Z".
De son côté, Emily Landau, experte à l'Institut pour les études de
sécurité nationale à Tel-Aviv, estime que quand M. Netanyahu dit qu'il
fera tout pour protéger son pays, "tout" veut désormais dire pour
convaincre la communauté internationale et non plus attaquer l'Iran. "La
rhétorique a changé", dit-elle.
Quoi qu'il en soit, selon M. Guzansky, la situation est
"gagnant-gagnant" d'un point de vue intérieur pour Netanyahu: la
menace iranienne fait l'objet de consensus national et il peut affirmer
qu'il a tout fait pour tenter de la neutraliser.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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