Les assurances du gouvernement sur une amélioration de l’état du
président Abdelaziz Bouteflika, hospitalisé en France, n’ont pas
convaincu en Algérie où des analystes estiment difficile de garder
longtemps le secret sur la santé des dirigeants à l’ère des réseaux
sociaux.
M. Bouteflika, hospitalisé depuis le 27 avril à l’hôpital militaire du
Val-de-Grâce à Paris, a été transféré mardi dans un autre établissement
militaire "afin d’y poursuivre sa convalescence", a annoncé en soirée le
service de santé des armées françaises dans un communiqué.
Un membre du gouvernement français avait confié dans la journée à des
journalistes que M. Bouteflika devait être transféré "aux Invalides pour
suivre sa convalescence", en référence à un établissement de santé dans
le centre de Paris.
Le Premier ministre algérien Abdelmalek Sellal a dénoncé lundi les
"fausses" informations de presse sur l’état de santé de M. Bouteflika,
76 ans, affirmant que son pronostic vital n’avait "jamais" été engagé et
qu’il était en convalescence.
"Le secret entourant les maladies des chefs d’Etat n’est pas propre à
l’Algérie", explique le directeur de l’Ecole supérieure de journalisme
d’Alger, Brahim Brahimi, donnant l’exemple de l’ancien président
français "François Mitterrand, arrivé au pouvoir en 1981 avec un cancer
gardé secret pendant des années".
"Ce n’est pas nouveau. Ce qui est nouveau c’est qu’avec internet, les
réseaux sociaux, on ne peut plus rien cacher", souligne-t-il.
M. Brahimi a rappelé que les autorités avaient répondu, au départ, au
souhait des Algériens d’être informés de l’état de santé de leur
président, en annonçant son hospitalisation en France le jour même où il
avait été victime d’un AVC mineur. Mais, depuis, elles ont gardé le
silence ouvrant la voie aux rumeurs.
"Ils ont bien commencé en disant que le président a eu un malaise",
a-t-il dit. Mais selon lui, "l’erreur des responsables réside dans le
fait que pendant 10 jours, les institutions n’ont pas joué leur rôle".
Le Premier ministre ne s’était pas exprimé sur ce sujet depuis le 11
mai, quand il avait déclaré que le président "se portait bien".
"Il aurait été préférable de donner un bulletin de santé hebdomadaire", a dit M. Brahimi.
Le commentateur vedette du Quotidien d’Oran, Kamel Daoud, considère
qu’"on ne gère plus la santé d’un président de la République comme en
décembre 78", en allusion à la maladie qui avait emporté l’ancien
président Houari Boumediène (1965-1978), gardée secrète pendant des mois
avant l’annonce officielle de son décès le 27 décembre 1978.
"Il faut faire un effort de sincérité et de courage", a ajouté M. Daoud
qui a qualifié d’"humiliation" le fait que "c’est le Quai d’Orsay (le
ministère français des Affaires étrangères) qui nous informe que
Bouteflika est encore à Paris".
Plusieurs journaux algériens ont jugé mardi que l’absence de
communication sur l’état de santé de M. Bouteflika, déjà soigné en 2005
pour un "ulcère hémorragique à l’estomac" au Val-de-Grâce, ouvrait la
voix aux rumeurs.
"Il appartient à la présidence de la République de rendre public un
communiqué officiel qui l’engage et au médecin personnel du chef de
l’État de donner un bulletin de santé hebdomadaire, puisque la semaine
d’hospitalisation initialement prévue est largement dépassée", a estimé
le quotidien francophone Liberté.
Plus agressif, le quotidien arabophone Echorouk dénonce le fait que les
"services secrets français soient informés avec précision de l’état de
santé du président".
Des informations publiées ces derniers jours en France et en Algérie
faisaient état d’une aggravation de l’état de santé du président
Bouteflika, touchant ses fonctions vitales. Deux journaux algériens, Mon
Journal et Jaridati avaient même indiqué qu’il était dans un état
comateux. Le directeur des deux publications Hicham Aboud est poursuivi
notamment pour atteinte à la sécurité de l’Etat.
"Toute cette affaire tourne autour de la succession. Il n’y pas de
communication. Les clans du pouvoir gèrent un vide né de la maladie du
chef de l’État. Si sa maladie n’est pas aussi grave qu’ils le
prétendent, ils n’ont qu’à le montrer à la télévision", a indiqué à
l’AFP un politologue qui a requis l’anonymat.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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