Samedi 18 mai, un important dispositif sécuritaire avait été mis en
place à Kairouan, haut lieu de l’islam dans le centre de la Tunisie, où
devaient se réunir en meeting les djihadistes d’Ansar al-Charia, malgré
l’interdiction du gouvernement. La mosquée Okba Ibn Nafaa, où s’était
tenu l’an dernier le second congrès annuel d’Ansar al-Charia qui avait
réuni quelque 5 000 personnes, est fermée ce dimanche. "C’est la
première fois, je crois", pense Cheikh Taieb Ghozzi, principal de la
mosquée Okba Ibn Nafaa, d’obédience malékite, qui prêche depuis les
années 1980. C’est sur cette même place vide, derrière les remparts de
la vieille ville, que l’an dernier, Abou Iyadh de son vrai nom Seifallah
Ben Hassine, vétéran d’Afghanistan, avait fait allégeance à Oussama Ben
Laden et présentait un programme social basé sur la charia. Il est
désormais recherché par les autorités pour son rôle présumé dans
l’attaque de l’ambassade américaine de Tunisie, en septembre dernier,
qui avait fait quatre morts.
Le gouvernement a récemment durci le ton face aux djihadistes, qu’il
accuse d’être en lien avec les événements de Chaambi, près de Kasserine,
où une quinzaine d’agents des forces de l’ordre ont été blessés par des
mines artisanales. Mais aussi après l’assassinat d’un policier près de
Tunis, où les djihadistes sont aussi montrés du doigt. "Il y a eu des
pressions de l’opinion publique, mais aussi peut-être de l’appareil
sécuritaire sur le gouvernement pour intervenir. Sans oublier que le
dialogue national apaise la situation politique et permet à Ennahda de
s’attaquer au problème sécuritaire. Mais là, ils ciblent des actions
pacifiques comme la prédication", commente Michael Ayari, chercheur à
l’International Crisis Group, qui mettait en garde dans un rapport
contre une réponse sécuritaire.
La semaine dernière, des tentes de prédication ont été démantelées par
les autorités, faute d’autorisation. Des échauffourées ont éclaté. Peu
après, de sa cachette, le leader du mouvement djihadiste, Abou Iyadh,
lançait un message virulent au gouvernement : "Vous ne combattez pas des
jeunes, mais la religion d’Allah. (...) Nos jeunes ont remporté des
victoires pour défendre l’islam en Afghanistan, en Tchétchénie, en Irak,
en Somalie et en Syrie. Ils n’hésiteront pas à se sacrifier pour la
défendre en terre de Kairouan." Seifeddine Erraies, porte-parole du
mouvement, déclarait quant à lui qu’aucune demande d’autorisation
n’avait été formulée par le mouvement, et que cette dernière venait
d’Allah. Une association avait bien tenté de faire la demande auprès du
gouverneur, "mais pendant la conférence de presse, ils ont insulté les
forces de l’ordre", affirme-t-il. Le gouvernement sera "responsable de
toute goutte de sang versée", avait lancé Seifeddine Erraies jeudi,
avant d’être, semble-t-il, arrêté la nuit dernière. "Il s’agit d’un
mouvement djihadiste qui joue sur la rhétorique anti-système, comme le
fait le leader. Mais, d’un autre côté, ils agissent pragmatiquement,
comme ils sont en train de le faire sur les pages Facebook", commente
Fabio Merone, chercheur italien, spécialiste de la mouvance djihadiste.
"Le gouvernement veut faire croire à la population que ce mouvement est
un danger. Mais en quoi des tentes de prédication sont-elles
dangereuses ? Il s’agit d’un jeu politique dont l’une des conséquences
sera la répression des salafistes djihadistes", craint Bilel Chaouachi,
jeune imam djihadiste, qui écume les plateaux télé tunisiens.
Prosélytisme, actions caritatives, soins médicaux gratuits... Les jeunes
du mouvement sillonnent le pays pour aller à la rencontre de la
population. "Ansar al-Charia est une organisation dont la logique est,
selon moi, politique. À leurs yeux, ils ont le droit de faire un
congrès, comme les autres. Sinon, cela signifie pour eux qu’on les
empêche d’exister", analyse Fabio Merone, qui précise que "les
négociations se poursuivent en coulisse". Ansar al-Charia en Libye, des
djihadistes de Syrie ou encore al-Qaida du Maghreb islamique ont envoyé
des messages de soutien au mouvement tunisien.
Tandis que les cheikhs avaient appelé les jeunes d’Ansar al-Charia à
reporter le meeting à la semaine prochaine, les djihadistes ont annoncé
dimanche que le congrès aurait finalement lieu à Ettadhamen, dans la
banlieue ouest de Tunis. Des affrontements ont éclaté vers midi entre
policiers et salafistes à la cité Ettadhamen, où les militants d’Ansar
al-Charia se sont finalement réunis. Des centaines de salafistes, qui
ont érigé des barricades à l’aide de pneus en feu dans les rues de ce
quartier, jetaient des pierres sur les policiers, qui répondaient par
des tirs de gaz lacrymogènes.
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Le porte-parole des salafistes interpellé
Les forces de sécurité tunisiennes déployées par centaines à Kairouan
pour empêcher la tenue du congrès d’un mouvement salafiste, Ansar
Ashariaa, ont interpellé dimanche à l’aube le porte-parole de cette
organisation, selon des sources concordantes.
L’interpellation du porte-parole, Seifeddine Raïs, a été annoncée par
l’organisation salafiste jihadiste sur sa page Facebook, puis confirmée
par une source sécuritaire interrogée par l’AFP.
"Il a été interpellé à l’aube alors qu’il faisait un footing devant les
policiers", a indiqué la source policière, qui a qualifié le
comportement de M. Raïs de "provocation".
Des centaines d’agents des forces de l’ordre et des militaires ont été
déployés à Kairouan et aux entrées de la ville pour empêcher coûte que
coûte la tenue du congrès d’Ansar Ashariaa, un rassemblement interdit
par le gouvernement qui l’a qualifié de "menace" pour la sécurité de la
Tunisie.
Le dispositif est particulièrement imposant sur la place face à la
mosquée Oqba ibn Nafaa, où Ansaar Ashariaa compte rassembler dimanche
après 15H00 GMT les 40.000 partisans qu’il revendique.
Partout en ville, des véhicules des forces de l’ordre patrouillent,
sirènes hurlantes, avec à bord des agents cagoulés. Les policiers
procèdent aussi à de nombreuses fouilles de véhicules.
Ansar Ashariaa, une organisation salafiste jihadiste, a juré de
maintenir son congrès malgré son interdiction, laissant craindre une
confrontation.
La Tunisie a vu depuis la révolution de 2011 se multiplier les violences
orchestrées par la mouvance salafiste. Le pays est aussi déstabilisé
par une profonde crise politique et le développement des conflits
sociaux face à la misère.
Le parti islamiste au pouvoir Ennahda a longtemps été accusé de laxisme
pour avoir toléré les groupuscules salafistes jihadistes. Il a cependant
considérablement durci sa position après que seize militaires et
gendarmes ont été blessés fin avril-début mai par des mines posées par
des groupes armés liés à Al-Qaïda traqués à la frontière avec l’Algérie.
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Les salafistes appellent à un rassemblement près de Tunis
Le mouvement salafiste jihadiste Ansar Ashariaa a appelé ses partisans à
se rassembler dimanche dans une banlieue de Tunis, les autorités ayant
interdit leur congrès à Kairouan (150 km de Tunis).
"Nous appelons tous nos frères à être présents en grand nombre à la cité
Ettadhamen, dans la capitale", a annoncé Ansar Ashariaa sur sa page
officielle Facebook.
Un représentant du mouvement salafiste, Sami Essid a ensuite assuré que
le congrès du mouvement était en cours dans cette banlieue.
"Notre congrès a lieu à la cité Ettadhamen", a-t-il dit à l’AFP.
M. Essid n’a pas voulu dire clairement si le rassemblement de Kairouan
était dès lors annulé et la page Facebook d’Ansar Ashariaa n’a pas non
plus donné de précisions à ce sujet.
Selon une habitante d’Ettadhamen, quartier populaire de l’ouest de Tunis
et un bastion salafiste, un grand nombre de militants d’Ansar Ashariaa y
circulaient en groupes.
Certains étaient armés de bâtons, d’autres d’armes blanches et brandissaient la bannière noire de leur mouvement.
Sur la place du marché, ils scandaient "nous allons à Ettadhamen", a relaté ce témoin.
Le gouvernement tunisien a interdit le congrès d’Ansar Ashariaa le
qualifiant de "menace" pour la sécurité du pays. La ville de Kairouan a
été bouclée par un impressionnant dispositif sécuritaire.
Malgré l’interdiction, les militants salafistes avaient juré maintenir
ce rassemblement laissant craindre une confrontation violente avec les
forces de l’ordre.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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