vendredi 24 août 2012

Egypte : Mohamed Morsi ordonne la libération d'un journaliste


Le président égyptien Mohamed Morsi a ordonné jeudi 23 août la libération d’un journaliste placé en détention préventive plus tôt dans la journée à l’ouverture de son procès, une mesure qui avait provoqué un tollé.
Le rédacteur en chef du quotidien indépendant Al-Dostour, Islam Afifi, s’était vu notifier dans la matinée sa détention par un tribunal pénal du Caire, en attendant une prochaine audience prévue le 16 septembre.
M. Afifi est poursuivi pour publication d’informations mensongères et incitation à la déstabilisation du pays, et son procès est le premier à se tenir contre un journaliste depuis la chute de Hosni Moubarak en février 2011.
La présidence égyptienne a toutefois annoncé en début de soirée que M. Morsi avait, par décret-loi, décidé d’abroger les dispositions pénales permettant la détention préventive durant un procès pour les délits de presse.
"M. Afifi va être relâché en vertu de ce décret", a déclaré le porte-parole de la présidence, Yasser Ali. Le journaliste a ensuite pu quitter la prison de Tora, dans la banlieue sud du Caire, pour rentrer chez lui, a indiqué à l’AFP une source au sein des services de sécurité.
M. Ali a ajouté que c’était la première fois que M. Morsi, entré en fonctions le 30 juin, publiait un décret ayant valeur de loi. Le président islamiste s’est attribué mi-août le pouvoir législatif après l’avoir retiré au haut conseil militaire qui l’exerçait depuis la dissolution de l’Assemblée en juin.
Le placement en détention de M. Afifi avait provoqué tout au long de la journée un tollé dans les milieux de la presse et chez les défenseurs des libertés publiques, déjà très critiques envers le procès qui lui est intenté.
Interrogé par l’AFP avant l’annonce de sa mise en détention, M. Afifi lui-même avait dénoncé un procès "politique".
Le Syndicat des journalistes égyptiens avait indiqué, dans un communiqué publié dans la journée, avoir engagé des contacts pour obtenir sa libération.
L’Organisation égyptienne des droits de l’Homme a aussi demandé la libération du journaliste, affirmant que le procès allait à "contre-courant de la situation nouvelle de l’Egypte, qui a un président élu et où on s’engage à respecter les libertés publiques".
L’organisation Reporters sans frontières, basée à Paris, a exprimé "sa plus vive inquiétude sur les restrictions de la liberté de la presse en Egypte" après cette mise en détention préventive.
Selon l’acte d’accusation lu en début d’audience, le journaliste est poursuivi pour des articles affirmant que l’élection du président Morsi a été falsifiée ou que des terrains de la péninsule du Sinaï avaient été vendus aux Palestiniens.
Les poursuites pour incitation au "chaos" et diffusion de "fausses nouvelles de nature à troubler l’ordre public" contre M. Afifi ont été annoncées le 16 août en même temps que celles contre le présentateur de télévision Tewfik Okacha qui est accusé d’"incitation au meurtre" du président Morsi.
M. Okacha dirige la chaîne de télévision privée Al-Faraïn (Les Pharaons) qui diffuse un programme très hostile à M. Morsi et aux Frères musulmans dont il est issu. Il a été interdit de quitter le territoire de même que M. Afifi.
Les autorités ont suspendu la diffusion de la chaîne pour un mois.
Ces procédures judiciaires interviennent alors que des militants anti-Morsi ont annoncé pour vendredi des manifestations contre le chef de l’Etat.
M. Morsi avait fait récemment le ménage dans la presse gouvernementale en faisant nommer par la Choura (chambre haute), dominée par les Frères musulmans, de nouveaux rédacteurs en chef à la tête des médias d’Etat, qui lui étaient très hostiles.
A l’annonce des poursuites, le département d’Etat américain s’était dit "très inquiet" des restrictions à la liberté de la presse en Egypte.
Les rapports entre les Frères musulmans et la presse privée sont marqués par la méfiance, sur fond de soupçons d’une volonté de la confrérie de mettre au pas les journalistes qui lui sont hostiles.
Le 9 août, plusieurs titres de la presse non-gouvernementale ont publié des encarts blancs à la place de leurs habituels éditoriaux pour dénoncer selon eux une volonté de contrôle des médias de la part des Frères musulmans.

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