jeudi 8 janvier 2015

Oman : On s'inquiète de l'absence prolongée du sultan Qabous

L'absence prolongée du sultan Qabous d'Oman, à l'étranger depuis six mois pour raisons médicales, suscite des inquiétudes sur sa succession et la stabilité de ce pays de la péninsule arabique, selon des diplomates.
Agé de 74 ans, le sultan est à la fois chef de l'Etat et Premier ministre, et assure également le pouvoir effectif des ministères régaliens (Défense, Intérieur, Affaires étrangères et Finances).
Le sultan, à la tête du pays depuis plus de 44 ans et qui n'a pas de successeur désigné, "concentre tous les pouvoirs de l'exécutif entre ses mains. En son absence, le processus de prise de décision est en panne", explique à l'AFP un diplomate occidental en poste à Mascate.
Parti le 9 juillet en Allemagne officiellement pour des "examens médicaux", le souverain --qui souffrirait d'un cancer du côlon selon une source diplomatique-- a depuis fait une seule apparition le 5 novembre à la télévision d'Etat.
Très affaibli, il a, dans une brève allocution, annoncé qu'il ne pourrait assister, quelques jours plus tard, à l'anniversaire de son intronisation.
"Par cette vidéo non datée, le sultan a voulu montrer qu'il est toujours aux commandes du pays, d'autant qu'il continue aussi à promulguer des décrets depuis son lieu de résidence à l'étranger", indique le diplomate.
"Mais comme il n'a pas délégué de prérogatives, personne ne peut prendre de décisions à sa place", précise un autre diplomate.
Or la croissance économique du sultanat est en berne et la situation risque de s'aggraver avec l'effondrement des cours du brut, en baisse de 55% depuis juin et dont Oman tire 79% de ses revenus.
Le gouvernement a d'ailleurs adopté un budget 2015 prévoyant un déficit de 6,47 milliards de dollars, soit 8% du PIB, mais où les dépenses courantes se taillent la part du lion avec 68% des dépenses publiques, contre seulement 23% aux investissements.
Pays non membre de l'Opep, Oman produit près d'un million de barils par jour (mbj) pour une population de quelque 4 millions d'habitants dont environ 1,8 million d'étrangers, notamment asiatiques.
"Malgré leurs déclarations rassurantes minimisant l'impact de la chute des recettes pétrolières, les responsables omanais redoutent un ralentissement des investissements et, par conséquent, la suspension de grands projets d'infrastructures", explique le premier diplomate.
Il cite notamment l'ambitieux projet d'une zone franche au port de Doqum, lancé en 2008 pour un coût de plusieurs dizaines de milliards de dollars et conçu pour concurrencer selon lui la zone franche de Jebel Ali à Dubaï.
L'idée d'imposer une taxe de 2% sur les transferts en devises des travailleurs étrangers, qui ont atteint 7,2 milliards de dollars en 2013 selon des estimations non officielles, a été longuement discutée l'an dernier avant d'être abandonnée.
Une accentuation des difficultés économiques des Omanais, conjuguée à l'incertitude sur l'état de santé du sultan Qabous et sur sa succession, alimente les discussions sur le risque de nouveaux troubles, selon des habitants de Mascate.
Oman, un pays généralement paisible, avait été secoué en 2011, dans la foulée du Printemps arabe, par des troubles qui avaient fait deux morts parmi les protestataires mobilisés contre la corruption et le chômage.
Le sultan Qabous avait alors rapidement procédé à un important remaniement ministériel, écartant notamment des ministres accusés de corruption, et annoncé la création de 50.000 emplois, des aides pour les chômeurs et d'autres mesures sociales.
"Cette fois, la violence peut éclater de nouveau dans la région industrielle de Sohar (nord), qui avait connu en 2011 les manifestations les plus violentes et où les habitants se plaignent d'une mauvaise répartition de la richesse nationale", indique le diplomate.

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