Il y a six mois, des milliers de Yazidis souffraient de la faim et de la
soif en fuyant sous une chaleur écrasante les jihadistes dans le nord
de l'Irak. Désormais, ils doivent faire face à la rigueur de l'hiver.
"La neige tombée il y a quelques jours a un peu fondu, mais il gèle
toujours la nuit", confie Sherzad Hussein, déblayant énergiquement des
blocs de glace du toit de son abri en préfabriqué.
Après s'être abrités tant bien que mal sur les pentes arides du mont
Sinjar quand les jihadistes de l'Etat islamique (EI) ont lancé une
nouvelle offensive dans le nord du pays en août, bien des survivants ont
comme lui repris la route pour se mettre en sécurité au Kurdistan
irakien.
Avoir un vrai toit fait du jeune homme un privilégié parmi les hordes de déplacés.
Le camp de Daoudia, où il vit près de Dohouk dans la région autonome du
Kurdistan, est l'un des rares à compter des bâtiments en dur.
La plupart des 500.000 déplacés dans la province de Dohouk vivent dans
des tentes, ou bien dans des hôtels, appartements, écoles ou bâtiments
en construction, en fonction de leurs moyens.
Depuis le siège en août du mont Sinjar, où des milliers de Yazidis ont
enduré une chaleur étouffante pendant des semaines, la température a
chuté de 50 degrés.
Mais sur ses pentes désormais enneigées, quelques centaines de familles
sont toujours là, dans des camps rudimentaires. Femmes et enfants sont
en majorité, les hommes combattent avec les forces de sécurité kurdes
contre l'EI, à quelques kilomètres de là.
"La vie est difficile ici. Quand l'hiver a commencé, nous n'avions rien
comme vêtements et pas grand chose en nourriture", explique Hassan Hisn
Semmo, en s'abritant de la pluie sous une tente dans laquelle des jeunes
hommes préparent du thé à l'occasion de funérailles.
"Nous avons besoin de kérosène parce qu'il fait tellement froid. Et nos
femmes doivent marcher longtemps pour trouver de l'eau", ajoute le vieil
homme, emmitouflé dans un manteau fabriqué à partir de morceaux de
couvertures largués par avion sur le Mont Sinjar.
Les yazidis, considérés comme hérétique par l'EI, ont été
particulièrement visés par les exactions du groupe extrémiste qui a
conquis depuis juin des pans entiers du territoire irakien, notamment
les alentours du mont Sinjar, fief de la petite communauté dont elle
abrite des temples sacrés.
Alors si la montagne où les Yazidis se sont réfugiés cet été est devenue inhospitalière, elle revêt une importance symbolique.
"J'avais une jolie maison, mais je risquerais pas ma vie pour elle. Pour cette montagne, je suis prêt à mourir", dit M. Semmo.
Effort humanitaire majeur -
Les conditions sont un peu meilleures dans des camps comme celui de
Daoudia, mais la lutte pour la survie est loin d'être terminée pour les
Yazidis.
"Il y a des coupures de courant, le kérosène pour les chauffages manque
et nous n'avons pas toujours assez de vêtements sur le dos", raconte
Nayef Khalaf Hussein, 42 ans.
Il
montre les morsures du froid sur la peau de son neveu de trois ans, un
des neufs enfants dont il doit s'occuper depuis la mort de leur père,
victime d'une crise cardiaque durant les violences en août et de leur
mère, décédée en janvier d'une leucémie.
Les organisations humanitaires et les autorités locales préparent depuis
des mois la venue de l'hiver: des tentes spéciales ont été construites
sur des blocs en béton pour une meilleure isolation, et de grandes
quantités de chauffages, de bâches en plastique et couvertures
distribués.
"A partir d'octobre, les températures ont commencé à baisser et les gens
s'inquiétaient sérieusement", explique Eric Besse, qui coordonne les
activités d'Action contre la Faim dans la région.
"Le monde humanitaire et le gouvernement (kurde) ont répondu dans les
grandes lignes à ces attentes", estime-t-il. "J'ai entendu parler de
quelques cas d'enfants décédés (...) mais le froid n'a pas tué un grand
nombre de personnes".
(23-01-2015)
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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