lundi 5 mai 2014

Libye : confusion autour de l’élection d’un nouveau Premier ministre

La confusion régnait dimanche soir autour de l’élection d’un nouveau Premier ministre en Libye, après un vote chaotique au Congrès général national (CGN, Parlement), à l’image d’un pays miné par l’anarchie et les luttes d’influences depuis la chute du régime Kadhafi.
Lors d’une session présidée par le premier vice-président du Congrès, Ezzeddine Al-Awami, Ahmed Miitig, un homme d’affaires méconnu du grand public, a obtenu au terme d’un troisième tour, 113 votes, en deça du nombre requis de 120 votes favorables.
Mais des députés avaient réclamé la poursuite de la session pour tenter de convaincre des députés de donner leur confiance à M. Miitig et surtout attendre d’autres députés qui étaient alors absents.
La télévision nationale a interrompu la retransmission avant de la reprendre une heure plus tard pour annoncer un nouveau résultat.
Le second président du Congrès, Salah al-Makhzoum, annonçait alors que M. Miitig avait pu réunir 121 votes et qu’il était invité à prêter serment comme Premier ministre. Chose faite quelques minutes plus tard, en l’absence du premier vice-président qui avait déjà quitté la salle.
Des députés ont contesté le nouveau comptage, affirmant que le premier résultat annoncé avait déjà été validé et la séance levée.
Dans deux lettres adressées dimanche soir au gouvernement et aux membres du Congrès, M. Awami a qualifié l’élection de M. Miitig de "nulle et illégale", demandant au gouvernement sortant d’Abdallah Al-Theni, de continuer à gérer les affaires courantes, jusqu’à l’élection d’un nouveau Premier ministre.
Selon ces lettres publiées sur le site du gouvernement, M. Al-Awami qui, assure l’intérim en l’absence du président du CGN, Nouri Abou Sahmein, confirme le premier décomptage de 113 votes qui ne permettaient pas à M. Miitig d’obtenir la confiance du Congrès.
Le porte-parole du cabinet sortant, Ahmed Lamine, a indiqué à la télévision Libya Al-Ahrar, que le gouvernement allait appliquer les directives qui lui sont parvenues de la présidence du Congrès.
"Finalement nous nous retrouvons avec deux Premiers ministres. Il ne manquait que cela", a commenté un diplomate en poste à Tripoli.
Cette confusion illustre les divisions profondes à la tête d’un Etat déjà faible et qui n’arrive pas à imposer son autorité sur des milices qui font la loi dans le pays et qui agissent en toute impunité.
Chérif al-Wafi, un député libéral a accusé les blocs islamistes d’avoir "violé la déclaration constitutionnelle", sorte de Constitution provisoire rédigée par la rébellion en 2011.
Au cours d’une conférence de presse, M. al-Wafi a indiqué qu’il allait avec plusieurs autres membres "prendre les mesures juridiques nécessaires" pour empêcher M. Miitig de prendre les rênes du gouvernement.
Des irrégularités similaires avaient été déjà soulevées par des députés lors du limogeage de l’ancien Premier ministre Ali Zeidan qui avait dénoncé lui même son éviction "illégale".
Le nouveau Premier ministre doit succèder à Abdallah Al-Theni, démissionnaire, qui assure l’intérim depuis le limogeage de M. Zeidan.
Dimanche, lors d’un second tour, Ahmed Miitig, l’a emporté devant Omar al-Hassi, un universitaire de Benghazi, avec 73 voix contre 43. Le gagnant devait toutefois réunir 120 votes lors d’un troisième tour.
Mardi, sur sept candidats en lice, Miitig et al-Hassi étaient arrivés en tête avec respectivement 67 et 34 voix.
Mais le second tour avait été interrompu par une attaque menée contre les locaux du Congrès par un groupe armé dont les motivations sont toujours inconnues.
Dans son programme électoral, M. Miitig a inscrit la sécurité et la construction des institutions sécuritaires et militaires comme une "priorité".
Le pays est en effet en proie à des violences et des attaques quotidiennes visant des diplomates et les services de sécurité et à une hausse de la criminalité et de l’influence des islamistes extrémistes, dans l’impunité la plus totale.
Vendredi encore, au moins neuf soldats et policiers ont été tués dans des heurts entre l’armée et des jihadistes du groupe Ansar Asharia, à Benghazi, dans l’Est.
Le nouveau chef de gouvernement doit conduire une nouvelle période de transition jusqu’à l’élection d’un nouveau Parlement, dont la date n’a pas été encore fixée.
Sous la pression de la rue, le CGN miné par une lutte d’influence entre islamistes et libéraux, avait en effet accepté récemment de céder la place à un nouveau Parlement élu.

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