Le chef du principal groupe jihadiste en Egypte a été tué vendredi, à
trois jours de la présidentielle pour laquelle est donné largement
favori l’ex-chef de l’armée Abdel Fattah al-Sissi qui a fait de la
"lutte antiterroriste" sa priorité.
Au dernier jour de la campagne électorale, M. Sissi, l’artisan de
l’éviction du président islamiste Mohamed Morsi le 3 juillet 2013, a
appelé ses compatriotes à voter massivement lors du scrutin lundi et
mardi, dans une interview à plusieurs chaînes de télévision.
"Vous êtes descendus (dans la rue) le 30 juin car l’Egypte était en
danger", a-t-il dit, en allusion aux centaines de milliers de personnes
qui avaient manifesté pour réclamer le départ de M. Morsi accusé
d’accaparer le pouvoir. "Vous devez descendre maintenant plus qu’aucune
autre fois dans l’histoire du pays" pour voter.
Le scrutin se tiendra sur fond de violences quasi quotidiennes. Des
heurts entre pro-Morsi et policiers ont fait deux morts vendredi au
Caire à Fayyoum (sud-ouest), selon le ministère de la Santé. Des
rassemblements pro-Morsi ont été dispersés ailleurs dans le pays avec
des gaz lacrymogènes.
Selon des responsables de la sécurité, Shadi el-Menei, considéré comme
le chef d’Ansar Beit al-Maqdess, un groupe disant s’inspirer d’Al-Qaïda
qui a revendiqué des attaques contre les forces de sécurité depuis
l’éviction de M. Morsi, a été tué à l’aube dans le Sinaï (est).
Il a été abattu avec trois autres dirigeants du groupe par les forces de
sécurité qui ont tiré sur leur voiture alors qu’ils s’apprêtaient à
lancer une attaque contre un gazoduc dans le Sinaï, ont précisé certains
responsables.
D’autres ont cependant affirmé que le chef d’Ansar Beit al-Maqdess,
déclaré "organisation terroriste" par l’Egypte et les Etats-Unis, avait
été tué par des agresseurs non identifiés.
Il n’a pas été possible d’obtenir une confirmation de sources
indépendantes.
Dans un incident séparé, un officier a été abattu et deux autres
policiers blessés dans une attaque près de Rafah, dans le nord du Sinaï,
selon des responsables.
Les attaques du groupe jihadiste se sont multipliées pour venger la
répression contre les pro-Morsi, qui a déjà fait plus de 1.400 morts
depuis la destitution du président islamiste et entraîné l’incarcération
d’au moins 15.000 personnes et la condamnation à mort de centaines
d’autres.
"Nous ne nous arrêterons pas tant que nous n’aurons pas vengé le sang et
les corps des musulmans", affirmait Ansar Beit al-Maqdess début mai.
Avant la destitution de M. Morsi, ce groupe visait principalement Israël
en s’en prenant aux gazoducs approvisionnant l’Etat hébreu. Mais il a
ensuite étendu son champ d’action au delta du Nil et au Caire.
Les autorités accusent les Frères musulmans d’être derrière les
attaques, ce que la confrérie, elle aussi déclarée "organisation
terroriste" par le gouvernement intérimaire égyptien, a toujours nié.
Selon ce gouvernement dirigé de facto par l’armée, plus de 500 personnes
—essentiellement des policiers et des soldats— ont été tuées dans des
attentats depuis la destitution de M. Morsi.
M. Sissi a fait de la "lutte antiterroriste" sa priorité pour rétablir
la sécurité et redresser l’économie en ruine. Selon lui, par ailleurs,
"parler des libertés" ne devrait pas primer sur la "sécurité nationale".
Amnesty International a fait état jeudi de dizaines de civils victimes
de disparitions forcées et détenus au secret pendant plusieurs mois dans
un camp militaire à Ismaïliya, au nord du Caire.
Une loi controversée interdit en outre les manifestations non autorisées
par les autorités. M. Sissi a défendu cette loi dans son interview :
"Ce n’est pas que c’est inacceptable pour moi mais la situation ne
permet pas" des manifestations qui ne soient pas "réglementées".
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