Les pèlerins juifs se rassemblaient vendredi à la Ghriba, la plus
ancienne synagogue d’Afrique sur l’île tunisienne de Djerba, pour un
pèlerinage annuel qui intervient juste après une polémique sur le droit
des Israéliens à venir en Tunisie.
Militaires, policiers et forces spéciales étaient déployés en nombre sur
la route menant à la Ghriba, des barrages ayant notamment été installés
afin de fouiller les véhicules. A la mi-journée, les premiers groupes
de dizaines de pèlerins arrivaient pour prier, allumer des bougies et
déposer des oeufs barrés de voeux dans une cavité située au fond de la
synagogue.
Les organisateurs du pèlerinage espèrent accueillir 2.000 personnes
d’ici dimanche, dernier jour de ce rituel au lendemain de shabbat, le
jour de repos hebdomadaire juif, a indiqué à l’AFP l’un des
représentants de la communauté juive de Djerba, Perez Trabelsi.
L’affluence reste loin des quelque 8.000 personnes qui affluaient avant
l’attentat-suicide de 2002 au camion piégé qui avait fait 21 morts, dont
une majorité de touristes allemands.
Après cette attaque, et avant la révolution de janvier 2011 qui chassa
le régime de Zine El Abidine Ben Ali, quelque 3.000 visiteurs
participaient en moyenne aux festivités à la Ghriba.
Les crises politiques à répétition et l’essor d’une mouvance jihadiste
armée en 2012 et 2013 ont freiné l’affluence, qui s’est limitée à
quelques centaines de visiteurs.
La stabilisation relative du pays depuis le début de l’année, avec
notamment le retrait du pouvoir des islamistes d’Ennahda pour laisser la
place à un cabinet d’indépendants en attendant des élections prévues en
2014 a relancé les réservations.
"Avant je venais tous les ans, mais cette année c’est la première fois
depuis la révolution. On m’avait dit que c’était dangereux, mais ça ne
l’est pas.
C’est formidable ici, pourvu que ça dure", s’enthousiasme
Rachele Guetta, une juive originaire de Libye installée en Italie
depuis son expulsion de Tripoli en 1967.
Ombre au tableau cependant, le pèlerinage intervient tout juste après
une polémique en Tunisie sur l’octroi d’autorisations d’entrée sur le
territoire tunisien à des visiteurs israéliens. Selon M. Trabelsi, elle a
eu un impact négatif.
"Des gens ont eu peur, et ont annulé leur venue. Parmi eux des gens qui
vivent en France mais ont de la famille en Israël. Ils ont annulé parce
qu’ils ne pouvaient pas venir ensemble", a-t-il regretté tout en
indiquant que 250 Israéliens étaient malgré tout attendus cette année.
Pour une partie de la classe politique, permettre aux ressortissants de
l’Etat hébreu de venir en Tunisie équivaut à "normaliser" les relations
avec Israël, chose inacceptable par solidarité avec le peuple
palestinien.
Deux ministres, celle du Tourisme Amel Karboul et le ministre délégué à
la Sécurité auprès du ministre de l’Intérieur, Ridha Sfar, ont même été
visés par des motions de censure sur le sujet après l’entrée de
plusieurs touristes israéliens en Tunisie. La procédure n’a finalement
pas abouti après son annulation à la dernière minute à l’issue d’une
séance parlementaire rocambolesque la semaine dernière.
"Il faut faire la différence entre l’Etat et les citoyens. Pourquoi me
punir moi pour ce qu’a fait l’Etat ?", a déploré Isaac Weinberg,
commerçant venu d’Israël pour l’occasion.
Moshe Giat, un Israélien d’origine yéménite, a indiqué que les autorités
tunisiennes lui avaient délivré un laissez-passer mais qu’il avait dû
laisser son passeport à l’aéroport.
"Avec ma femme, on est passé par Paris. On nous a tellement dit que
c’était dangereux la Tunisie qu’elle est restée là bas", a-t-il dit.
Organisé chaque année au 33e jour de la Pâque juive, le pèlerinage de la
Ghriba est au coeur des traditions des juifs de Tunisie, une communauté
qui s’est réduite à environ 1500 âmes, contre 100 000 en 1956 avant
l’indépendance.
(16-05-2014 - Avec les agences de presse)
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