samedi 17 mai 2014

Syrie : A Homs, un centre pour aider les déplacés à retrouver leur dignité

Dans la ville de Homs dévastée, où nombre de Syriens ont tout perdu dont leur travail, un homme d’affaires a lancé un programme d’aide pour les déplacés : il offre des outils à des artisans, en échange de quoi ils forment un apprenti.
Outre les 2200 morts et les destructions considérables en deux ans de combats et de bombardements, plus de 500 000 habitants de cette ville du centre du pays, que les derniers rebelles ont quitté il y a une semaine, ont dû fuir leur foyer.
Abdel-Nasser al-Cheikh Fattouh affirme avoir eu l’idée d’un programme d’aide pour les déplacés en voyant l’un d’eux cherchant désespérément du travail.
"J’ai sympathisé avec ce menuisier de Bayada qui avait perdu son atelier", explique-t-il, en référence à un quartier tenu par les rebelles puis repris en mars 2012 par l’armée, et aujourd’hui totalement désert.
"Selon un hadith (recueil des actes du prophète de l’islam, ndlr), Muhammad -sws- a offert une hache à un homme qui lui demandait de l’aider et l’a invité à travailler et couper du bois", indique ce quinquagénaire.
Avec deux autres hommes d’affaires de la ville, il a donc offert à 18 artisans vivant avec leur famille dans le centre d’accueil qu’il dirige dans le quartier d’Inchaat une caisse à outils, en retour de quoi ils s’engagent à prendre comme apprenti un autre déplacé.
Le centre "Abdel Mohaymen Abbas" accueille 100 familles, soit au total 500 personnes. Installé dans une ancienne école prêtée par la municipalité, il est financé par ces trois hommes d’affaires, des dons et récemment par des aides allouées par l’ONU.
"Il s’agit d’une chaîne. Quand l’apprenti connaîtra son métier, il aura droit à son tour à une caisse à outils à condition d’en former un autre", explique cet industriel qui n’a plus accès pour des raisons de sécurité à sa fabrique de bassins en cuivre, située à la lisière de la ville.
A l’entrée du centre, un grand panneau indique : "Nos ateliers vous proposent des professionnels bien formés dans différentes spécialités. Ceux qui souhaitent bénéficier de leurs services doivent appeler le numéro suivant".
Parmi les métiers proposés figurent menuisier, forgeron, plombier électricien ou encore coiffeur.
Raouaa, une femme de 38 ans, a fui il y a 28 mois Jab al-Jandali, un des quartiers assiégés pendant deux ans par l’armée. "Je possédais un salon de coiffure pour dames. J’ai tout perdu. J’ai dû bouger à plusieurs reprises avant de poser mes affaires dans ce centre".
Vêtue d’une abaya noire et coiffée d’un foulard rose, elle a adhéré au projet. "J’ai voulu enseigner mon métier aux jeunes filles afin qu’elles puissent avoir un revenu. On ne sait pas ce que la vie nous réserve", confie-t-elle en souriant.
Après voir reçu des brosses, des ciseaux, un sèche-cheveux et des produits capillaires, elle exerce son métier au domicile de ses clientes avant de rentrer le soir au centre et former 13 femmes entre 18 et 40 ans.
L’une d’elles, Rima Nahhal, 28 ans, est heureuse d’apprendre ce métier. "Le soir, je suis ma formation et dans la journée je m’entraîne en coiffant des femmes du centre. Je pourrai exercer ce métier plus tard pour améliorer mon quotidien", dit cette mère de trois enfants.
Le principe est simple. Une fois reçus les outils ou le nécessaire de coiffure, ces artisans gagnent leur vie et n’ont plus besoin d’assistance.
Le plombier Abou Waël, 45 ans, forme deux jeunes qui l’aident désormais dans son travail. "Les clients m’appellent pour des réparations et grâce à Dieu, je gagne bien ma vie", assure-t-il.
Professeur d’anglais, Racha, une volontaire qui gère le projet, encourage les artisans à exercer une activité professionnelle pour leur réinsertion dans la société. "Ils ont une bonne expérience mais ont perdu leur travail et sont devenus des déplacés. Le projet leur redonne de l’espoir et cela se reflète d’une manière positive sur la société", explique-t-elle.

(17-05-2014)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire