Les Irakiens exprimaient leur colère dimanche au lendemain d’une vague
d’attentats revendiquée par Al-Qaïda ayant fait 74 morts pendant les
fêtes de la fin du ramadan, dénonçant l’incapacité des autorités à
préserver l’Irak de troubles meurtriers.
"L’Etat islamique s’est mobilisé (...) à Bagdad, dans (les provinces) du
sud et d’autres pour envoyer un message de dissuasion au troisième jour
de l’Aïd el-Fitr", en réponse à des opérations des forces de sécurité
irakiennes, a écrit dans un communiqué publié dimanche sur des sites
internet jihadistes l’"Etat islamique en Irak et au Levant" (EIIL), une
branche d’Al-Qaïda, auteur de la revendication.
Les chiites "ne connaîtront la sécurité ni la nuit ni le jour, ni le jour de l’Aïd ni aucun autre", a ajouté l’EIIL.
La communauté internationale a condamné ces attentats, mais la plupart
des dirigeants irakiens, notamment le Premier ministre Nouri al-Maliki,
sont restés silencieux.
L’Irak a connu son mois de ramadan le plus sanglant depuis 2008, avec
plus de 800 personnes tuées, selon un bilan établi par l’AFP.
Samedi, pendant que les Irakiens célébraient l’Aïd el-Fitr, qui marque
la fin du mois sacré du jeûne pour les musulmans, 74 personnes ont péri
et plus de 320 ont été blessées.
A Bagdad, théâtre de la majorité de ces attaques, 11 attentats
coordonnés à la voiture piégée ont fait 47 morts, ont dit des sources
policières et médicales.
"Il n’y aura aucune amélioration de la situation en Irak", a déploré
Abu Samer, ingénieur à la retraite de 64 ans habitant à Shaab, un
quartier commerçant du nord de la capitale où un double attentat a
entraîné la mort de huit personnes.
"Je ne peux faire confiance à aucun politicien", a-t-il ajouté, dénonçant la litanie des promesses non tenues.
Ce sexagénaire a confié espérer envoyer ses enfants à l’étranger, "loin de ce qui est en train de se passer en Irak".
De son côté, dans l’est de Bagdad, sur le site d’une autre attaque à la
voiture piégée, Ali al-Shammari, un vendeur de cigarettes de 35 ans, a
souligné que l’impasse politique dans laquelle se trouve son pays était
responsable de la flambée de violences.
"Je ne voterai plus jamais pour personne. Combien de temps devons-nous
vivre dans cette situation à cause des politiciens ?", s’est-il
interrogé.
A Bagdad, les forces de sécurité ont renforcé dimanche les contrôles aux
barrages routiers, provoquant de vastes embouteillages. Mais malgré ce
dispositif, habituel après des attentats, de nouvelles violences ont
fait six morts, ont annoncé des responsables.
Un engin explosif a provoqué la mort de trois soldats au sud de Bagdad,
deux miliciens ont été abattus près de Baquba et un homme qui
franchissait un barrage policier à vive allure a été tué par un policier
à Mossoul (nord).
Le ministre britannique chargé du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord,
Alistair Burt, a dénoncé la vague d’attentats de samedi, estimant
qu’elles avaient "clairement visé à alimenter le conflit confessionnel
et à déstabiliser le pays".
Il appelé "tous les responsables politiques, religieux et communautaires
à travailler ensemble pour combattre ce type de violences".
Les Etats-Unis ont qualifié pour leur part les auteurs des attentats
d’"ennemis de l’islam" et rappelé qu’une prime de 10 millions de dollars
était offerte pour toute information permettant de "tuer ou capturer
Abu Bakr al-Baghdadi", le chef de l’Etat islamique en Irak et au
Levant.
La vague de violences est survenue quasiment trois semaines après deux
assauts spectaculaires menés par ce groupe contre deux prisons
irakiennes, qui ont permis la libération de plusieurs centaines de
détenus, dont de hauts responsables du réseau extrémiste.
Des experts ont souligné que ces évasions ajoutaient à la défiance de la
population vis-à-vis du gouvernement, déjà accusé d’incurie face à la
recrudescence des attentats ces derniers mois et qui se voit aussi
reprocher son incapacité à fournir des services de base.
Des experts, dont l’organisation internationale Interpol, ont averti que
ces évasions risquaient de se traduire par une hausse des attaques en
Irak, qui a déjà retrouvé son niveau de violences de 2008, lorsque ce
pays sortait à grand peine d’une quasi guerre civile.
L’organisation Human Rights Watch a de son côté appelé les autorités
irakiennes à "mettre un terme aux réponses draconiennes" mises en place
face aux attentats, dont le recours à la torture des suspects et aux
aveux forcés.
La vague de violences depuis le début de l’année est encouragée, selon
des analystes, par la montée de la colère chez la minorité sunnite, qui a
organisé en décembre des manifestations pour dénoncer les
discriminations dont elle se dit victime.
Le gouvernement, dominé par des chiites, a depuis fait quelques
concessions, libérant notamment plusieurs milliers de prisonniers, mais
sans résoudre le coeur du problème.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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