L’Egypte a connu samedi une deuxième journée d’affrontements sanglants,
avec la mort de 26 personnes à Port-Saïd (nord-est), les plus graves
violences depuis l’élection du président islamiste Mohamed Morsi en juin
dernier.
L’opposition a fait monter la pression sur le pouvoir en réclamant une
solution politique "globale" avec un "gouvernement de salut national",
faute de quoi elle pourrait boycotter les législatives prévues dans les
tout prochains mois.
Les affrontements à Port-Saïd ont éclaté après l’annonce de la
condamnation à mort de 21 Egyptiens pour leur implication dans les
violences ayant suivi un match de football l’an dernier dans cette
ville. Un bilan de sources médicales fait état de 26 morts et 277
blessés.
Ces heurts interviennent au lendemain du deuxième anniversaire du
soulèvement qui fit chuter Hosni Moubarak début 2011, déjà marqué par
des violences entre manifestants et policiers qui ont fait neuf morts et
plus de 530 blessés à travers le pays.
A Port-Saïd, des proches des personnes condamnées ont tenté d’envahir la
prison dans laquelle se trouvaient ces dernières. D’après des témoins,
des assaillants inconnus ont ouvert le feu en direction de la police qui
a riposté avec du gaz lacrymogène.
Deux postes de police ont été pris d’assaut et des tirs nourris se
faisaient entendre à travers la ville, selon un correspondant de l’AFP.
Le ministère de l’Intérieur a parlé "d’affrontements violents et
sanglants". Un général de l’armée a annoncé le déploiement des
militaires pour "rétablir le calme" et protéger les installations
publiques.
Port-Saïd est située à l’entrée nord du canal de Suez, mais l’organisme
de gestion de cette voie d’eau stratégique pour le commerce mondial a
indiqué que le trafic n’était "pas affecté".
Néanmoins, selon le ministère grec des Affaires étrangères, un ferry
grec en provenance du port israélien de Haïfa a essuyé des tirs samedi
matin alors qu’il était ancré à Port-Saïd. Le bateau, où personne n’a
été blessé, a depuis repris la mer.
Au Caire, dans la salle d’audience, le verdict a été en revanche
accueilli par les cris de joie et les youyous des membres des familles
des victimes.
Le président du tribunal a fixé au 9 mars le verdict pour le reste des accusés, dont 9 policiers.
En février 2012, 74 personnes étaient mortes à Port-Saïd après un match
entre le grand club cairote d’Al-Ahly et une équipe locale, Al-Masry.
Ce drame, le plus meurtrier du football égyptien, s’est produit après la
victoire d’Al-Masry, dont des centaines de supporteurs avaient envahi
le terrain et lancé des projectiles vers ceux d’Al-Ahly. Les accusés ont
récusé toutes les charges.
Les "Ultras" d’Al-Ahly, des supporteurs fervents et organisés qui
revendiquent la majorité des victimes, avaient menacé les autorités de
"chaos" si le verdict n’était pas assez sévère.
Parallèlement, l’opposition aux islamistes, regroupée au sein du Front
du salut national (FSN), a réclamé une "solution globale" à la crise
politique incluant notamment la formation d’un "gouvernement de salut
national".
Faute de quoi, a-t-elle prévenu, elle boycotterait les législatives
prévues en principe en mars ou avril, à une date encore à définir, et
réclamerait une présidentielle anticipée alors que M. Morsi n’est en
fonction que depuis sept mois.
L’opposition laïque et le pouvoir sont à couteaux tirés depuis novembre,
date à laquelle M. Morsi s’est doté temporairement de pouvoirs
exceptionnels afin d’accélérer un projet de Constitution rédigé par une
commission dominée par les islamistes.
Des manifestations tournant parfois à la violence avaient déjà eu lieu à l’époque.
Vendredi, les manifestations et heurts à l’occasion de la "Journée de la
Révolution" se sont produits dans de nombreuses villes, notamment Le
Caire, Alexandrie et Suez.
Les manifestants accusent M. Morsi et les Frères musulmans dont il est
issu de trahir la "révolution" qui leur a permis d’accéder au pouvoir
grâce à une élection présidentielle pour la première fois démocratique.
M. Morsi, qui a appelé dans la nuit ses compatriotes à "rejeter la
violence", a participé samedi à une réunion du Conseil national de
défense consacrée à la sécurité publique.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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