jeudi 1 mai 2014

Irak : Les Irakiens ont défié les violences pour élire leurs députés

Les Irakiens ont défié les violences lundi et se sont rendus aux urnes pour élire leur Parlement lors des premières élections législatives depuis le retrait des troupes américaines fin 2011, le Premier ministre sortant Nouri al-Maliki se disant "sûr de sa victoire".
La commission électorale devrait annoncer le taux de participation dans la soirée. A la mi-journée, environ 40% des électeurs en Irak s’étaient déplacés, selon une source diplomatique.
Le chef de la diplomatie américaine John Kerry a félicité les millions d’Irakiens qui ont "courageusement voté", estimant qu’ils avaient envoyé "un puissant message de revanche aux extrémistes violents qui tentent de saboter les progrès de la démocratie et de semer la discorde".
Aucune date officielle n’a été fixée pour l’annonce des résultats, qui ne devrait pas intervenir avant plusieurs semaines.
Les bureaux de vote, ouverts de 07H00 locales (04H00 GMT) à 18H00 locales, ont été étroitement surveillés tout au long de la journée pour prévenir tout risque d’attentat, et les voitures ont interdiction de circuler dans Bagdad depuis mardi soir.
Le scrutin a été néanmoins marqué plus de 50 attaques, visant principalement des bureaux de vote ou des électeurs, qui ont fait au moins 14 morts et 36 blessés.
Au nord de Kirkouk (nord), un attentat a tué deux membres de la commission électorale. Au nord de Bagdad, des insurgés se sont emparés d’un bureau de vote qu’ils ont détruit aux explosifs après avoir évacué employés et électeurs.
Les violences avaient déjà fait près de 90 morts ces deux derniers jours. M. Maliki, qui espère un troisième mandat, a voté vers 07H30 à l’hôtel Rachid, au coeur de la "zone verte", un secteur fortifié de Bagdad.
Il a déclaré aux journalistes être "sûr de la victoire". Ce scrutin est "encore plus réussi que le précédent, car il n’y a plus de soldat américain sur le sol irakien", a-t-il dit.
M. Maliki est donné favori, malgré un bilan très critiqué notamment pour n’avoir pas résolu les problèmes du chômage et de la corruption, ni remédié au piètre état des services publics, alors que le pays est plongé dans des violences qui font en moyenne 25 morts chaque jour.
"Il faut chasser la plupart des politiciens, parce qu’ils n’ont rien fait, à part se disputer depuis des années", lance Abou Achraf, 67 ans, ancien comptable venu voter à Mansour, dans l’ouest de Bagdad.
Agé de 91 ans, appuyé sur ses béquilles, Jawad Saïd Kamaleddine a lui aussi glissé son bulletin dans l’urne dans l’espoir que "tous les politiciens changent. Ce sont tous des voleurs".
D’autres veulent néanmoins voir M. Maliki, 63 ans, rester à la tête du gouvernement. "Si on ne vient pas voter, à qui va-t-on laisser le pouvoir ? ... aux ennemis", affirme Oum Jabbar, venu voter dès 07H00 dans la ville sainte chiite de Najaf.
Pour convaincre les électeurs, les 9.039 candidats ont tapissé le pays d’affiches, sur lesquelles chacun joue sur son appartenance ethnique et confessionnelle, plus que sur son programme.
Les tensions entre chiites et sunnites, exacerbées notamment par la guerre en Syrie voisine, sont devenues un argument politique instrumentalisé tant par M. Maliki que par les jihadistes. Elles alimentent les violences, qui en avril seulement ont tué plus de 750 personnes.
Les insurgés, dont des jihadistes de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), tiennent depuis début janvier, à l’ouest de Bagdad, Fallouja et plusieurs quartiers de Ramadi, empêchant la tenue du scrutin dans une partie de la province sunnite d’Al-Anbar.
M. Maliki a su tirer parti des tensions pour focaliser l’attention sur la lutte contre les insurgés, tentant de faire oublier son bilan plus que mitigé.
Selon une règle non écrite, le poste de Premier ministre revient à un chiite, les Kurdes détiennent la présidence et les sunnites la tête du Parlement. Or Maliki reste le seul chiite ayant l’envergure du poste.
Sa coalition, l’Alliance pour l’Etat de droit, a de bonnes chances de remporter un certain nombre des 328 sièges en jeu. Elle n’est toutefois pas assurée d’obtenir une majorité, d’autres partis chiites venant la défier dans ses bastions du centre et sud.
Les négociations pour former un gouvernement risquent donc de prendre de longs mois. Après les élections de mars 2010, le gouvernement avait prêté serment en décembre.

(30-04-2014)

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