La police bahreïnie quadrillait mercredi Manama et ses environs,
empêchant des manifestants de répondre à un appel d’un mouvement
Tamarrod local, proche de l’opposition chiite, de se rassembler près de
l’ambassade américaine pour protester contre le pouvoir sunnite.
Tamarrod a expliqué que l’objectif de la manifestation — dont l’heure
n’a pas été précisée — était d’instaurer une "véritable démocratie comme
celles qui existent dans des pays occidentaux comme les Etats-Unis et
le Royaume-Uni".
Mais, les autorités ont affirmé leur intention d’empêcher ce
rassemblement, voulue comme une réplique du mouvement Tamarrod égyptien,
à l’origine d’une mobilisation monstre dans la rue ayant conduit
l’armée à déposer le président islamiste Mohamed Morsi.
Un dispositif de sécurité exceptionnel a été mis en place dès mardi soir
à Manama et dans de nombreux villages chiites proches en prévision de
la manifestation.
Dans un communiqué publié tôt mercredi, le ministère a affirmé que "le
déploiement de forces de sécurité dans différents endroits du royaume
est destiné à préserver l’ordre public et à assurer la fluidité de la
circulation".
L’opposition, qui milite pour une monarchie constitutionnelle, a indiqué
pour sa part que les autorités avaient isolé plusieurs localités
chiites, en coupant des routes avec des blocs en béton et des fils
barbelés.
Ce dispositif est destiné à "empêcher les citoyens de manifester", a
souligné le mouvement chiite Al-Wefaq, le plus important groupe de
l’opposition, en accusant les autorités d’avoir "transformé certaines
régions en prison pour leurs habitants".
Des témoins ont expliqué que le lourd dispositif de sécurité avait empêché des manifestants de sortir dans la rue.
Le ministère de l’Intérieur a par ailleurs indiqué que des manifestants
avaient tenté de bloquer dans l’île de Moharraq, à l’est de Manama, une
route avec des pneus auxquels ils ont mis le feu avant une intervention
des forces de sécurité pour dégager cette voie.
Il a aussi affirmé que des "terroristes" avaient attaqué, à l’aide de
cocktails Molotov, et blessé un travailleur asiatique qui était en train
de dégager une route bloquée par des manifestants à Noueidrat, village
chiite au sud de Manama.
En prévision du rassemblement de Tamarrod, le roi Hamad ben Issa
Al-Khalifa a amendé la semaine passée la loi sur les rassemblements
publics en interdisant toute manifestation dans la capitale de Bahreïn,
secoué depuis 2011 par un mouvement de contestation chiite.
Il a également promulgué des lois durcissant les sanctions contre les
personnes participant à des manifestations interdites, de même que
celles contre les parents dont les enfants mineurs prendraient part à
des rassemblements.
Début août, Tamarrod a adressé une lettre ouverte à l’ambassade
américaine à Manama, en soulignant que les Etats-Unis avaient "la
responsabilité morale de protéger les manifestants".
Le département d’Etat n’a pas voulu "spéculer sur ce qui pourrait ou sur
ce qui ne pourrait pas se dérouler" mercredi, mais sa porte-parole
adjointe Marie Harf a rappelé mardi que les Etats-Unis "soutenaient le
droit de se rassembler pacifiquement et le droit à la liberté
d’expression, y compris à Bahreïn".
"Nous restons très préoccupés par la poursuite d’incidents violents à
Bahreïn et nous exhortons toutes les parties à (...) contribuer à créer
un climat de dialogue et de réconciliation", a-t-elle plaidé.
L’ONU a de son côté appelé Bahreïn à "respecter ses obligations
internationales en matière de droits de l’Homme, y compris celles
concernant la liberté d’expression et de rassemblement pacifique".
Selon la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), au
moins 80 personnes ont été tuées depuis le début de la contestation
animée par les chiites, majoritaires, contre la dynastie sunnite des
Al-Khalia.
Opposition et pouvoir sont engagés dans un dialogue national qui doit reprendre le 24 août, sans réelle perspective de progrès.
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