"Le président de la République provisoire Moncef Marzouki a décidé
mercredi de prolonger de trois mois l’état d’urgence à compter du 1er
novembre 2012", a indiqué l’agence officielle TAP.
L’état d’urgence, qui confère des pouvoirs d’intervention accrus aux
forces de l’ordre et à l’armée, est en vigueur en Tunisie depuis janvier
2011 et la fuite du président Zine el-Abidine Ben Ali à l’issue d’une
révolution. Depuis juillet, il n’était prolongé que par tranche d’un
mois. Les autorités assuraient que cela témoignait d’une amélioration
des conditions de sécurité.
Cette décision intervient au lendemain d’affrontements entre les forces
de l’ordre et des militants islamistes radicaux qui avaient attaqué deux
postes de la garde nationale dans un quartier de la banlieue de Tunis
de La Manouba. Selon le bilan officiel, un assaillant a été tué par
balle et deux agents ont été blessés. Une source policière interrogée
par l’AFP et plusieurs médias tunisiens font cependant état de deux
morts. Le gouvernement, dominé par les islamistes d’Ennahda, assure être
déterminé à lutter contre ce type de violences, alors que l’opposition
l’accuse de faire preuve de laxisme, voire de complaisance à l’égard des
salafistes djihadistes.
Le ministère de l’Intérieur a averti mercredi que les forces de sécurité
allaient recourir à "tous les outils permis par la loi", laissant
entendre que des balles réelles seraient utilisées le cas échéant. Il a
aussi affirmé avoir déployé de vastes renforts dans le quartier de Douar
Hicher, où les violences ont eu lieu mardi. Cependant, sur le terrain,
aucun dispositif de sécurité renforcé n’était visible dans la journée et
des dizaines de personnes semblant appartenir à la mouvance salafiste,
certaines armées de couteaux, étaient rassemblées dans les rues, selon
une journaliste de l’AFP. Certains ont assuré se préparer à de nouveaux
affrontements. "On ne va pas laisser le meurtre d’hier sans réaction", a
affirmé l’un d’eux.
Un autre, âgé d’une vingtaine d’années, a reconnu que les violences
avaient été déclenchées par l’interpellation de plusieurs salafistes,
estimant : "Ce n’est pas une raison pour tirer dans la tête d’un
Tunisien." Ennahda, qui se pose en partisan d’un islamisme politique
modéré, a pour sa part réagi à ces heurts de manière ambiguë. Il a
appelé au "calme" et noté que "l’État a le droit de faire face à toute
menace à la paix sociale" tout en disant "prier" pour "le citoyen
tunisien" mort dans l’attaque des postes de police.
Les salafistes djihadistes, une branche rigoriste de l’islam sunnite,
sont considérés comme responsables de nombreux coups d’éclat, certains
sanglants, depuis la révolution de 2011. Les évènements de mardi sont
les plus graves impliquant cette mouvance depuis l’attaque le 14
septembre de l’ambassade des États-Unis (quatre morts parmi les
assaillants, des dizaines de blessés).
Une centaine de personnes suspectées d’avoir participé à ces heurts en
représailles à un film islamophobe diffusé sur Internet ont été arrêtées
depuis, mais leur chef présumé, Abou Iyadh, est toujours en fuite. La
Tunisie peine à se stabiliser depuis la révolution. Des manifestations
motivées politiquement, religieusement ou par des revendications
économiques et sociales dégénèrent régulièrement en violences. Ainsi, le
18 octobre, un responsable du parti d’opposition Nidaa Tounès à
Tataouine (sud) est mort en marge d’affrontements entre ses partisans et
des manifestants proches des islamistes au pouvoir.
(01 Novembre 2012)
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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