Israël et le Hamas semblaient jeudi avoir chacun tiré un profit
politique et stratégique du cessez-le-feu entré en vigueur la veille au
soir dans la bande de Gaza, même si aucun des deux camps ne semblait se
faire d’illusions quant à sa pérennité.
Bien que le Hamas ait perdu une partie de ses dirigeants au cours des
raids aériens israéliens entamés il y a huit jours, il a acquis la
stature qui lui manquait sur les plans international et intérieur.
Après des années d’isolement, de nombreux responsables du monde arabe se
sont rendus à Gaza, alors même que l’armée israélienne se livrait à
l’opération "Pilier de défense", et la considération dont l’Egypte, à
l’initiative du cessez-le-feu, a fait preuve envers le Hamas aurait été
inconcevable du temps de l’ancien président Hosni Moubarak.
Conséquence de ce recentrage du monde arabe sur le Hamas, le Fatah de
Mahmoud Abbas, au pouvoir en Cisjordanie, s’est trouvé isolé, ainsi que
la solution diplomatique qu’il défend face à Israël.
"Le Hamas est dans une position plus solide que jamais", estime Talal
Okal, politologue basé à Gaza, selon qui cette situation rend peu
probable le maintien du cessez-le-feu. "Les Palestiniens doivent
continuer à se préparer à un nouvel affrontement."
Sur le plan intérieur, les manifestations de joies de dizaines de
milliers de Gazaouis contrastaient mercredi soir avec l’impopularité
subie par le Hamas à l’issue d’un précédent conflit avec Israël, entre
décembre 2008 et janvier 2009.
A l’issue de cet affrontement, le Hamas et d’autres groupes basés à Gaza
avaient renoncé pendant plusieurs mois aux lancers de roquettes vers
Israël, alors que des tirs palestiniens ont été signalés mercredi soir
quand le cessez-le-feu était déjà en vigueur.
Face au Hamas le gouvernement israélien du Premier ministre Benjamin
Netanyahu n’est cependant pas perdant et peut se satisfaire d’avoir
réduit les capacités militaires de son adversaire tout en continuant à
collaborer diplomatiquement avec l’Egypte du président islamiste Mohamed
Morsi.
Le gouvernement israélien, qui a également renforcé ses liens jusqu’ici
tendus avec l’administration du président américain Barack Obama, n’a
jamais prétendu que l’opération avait pour but de renverser le Hamas, et
peut donc affirmer que les objectifs de l’Etat hébreu sont remplis.
Un rapport de l’armée israélienne est allé en ce sens mercredi soir, et a
également souligné que le système israélien de défense antiaérienne dit
"Dome de fer" avait bien fonctionné, en interceptant 84% des roquettes
palestiniennes.
L’opposition israélienne, qui s’était rangée au consensus national au
cours des huit jours de conflit, a cependant accusé le gouvernement de
Benjamin Netanyahu d’avoir cédé du terrain face au Hamas, à deux mois
d’élections législatives où le Premier ministre est favori.
"Les citoyens israéliens s’attendaient à quelque chose d’autre", a
déclaré Shaul Mofaz, chef de file des opposants de Kadima. "Ils
s’attendaient à une situation où l’armée israélienne oblige le Hamas à
une trêve. Aujourd’hui, (le président égyptien Mohamed Morsi), avec le
soutien des Etats-Unis, a obligé Israël à une trêve."
Les stratèges israéliens doutent que le soutien de l’Egypte et des
Etats-Unis suffise à assurer l’avenir du cessez-le-feu sur lequel
Benjamin Netanyahu a lui-même laissé planer le doute, en reconnaissant
qu’une "action militaire plus sévère", serait peut-être nécessaire.
"Nous sommes sceptiques", a déclaré un haut fonctionnaire israélien,
sous couvert d’anonymat. "Mais les Egyptiens et les Américains
soutiennent cet accord, donc s’il est rompu, ils verront que nous avons
une bonne raison d’y aller fort."
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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