Des dizaines de milliers d’Egyptiens se sont rassemblés mardi place
Tahrir au Caire pour protester contre la décision de Mohamed Morsi de
s’octroyer des pouvoirs exceptionnels, la plus forte mobilisation
hostile au président islamiste depuis son élection en juin.
Plusieurs cortèges ont convergé sur la célèbre place du centre de la
capitale égyptienne, pour dénoncer également le puissant mouvement des
Frères musulmans, dont est issu le président.
Les manifestations hostiles au président ont touché d’autres villes du
pays en proie à une grave crise depuis la décision le 22 novembre de
M. Morsi de renforcer provisoirement ses pouvoirs afin selon lui de
pouvoir engager les réformes. Mais ses détracteurs ont dénoncé un
"nouveau pharaon".
"Dégage !", scandaient de nombreux manifestants place Tahrir, reprenant
le slogan emblématique de la révolte populaire qui avait chassé du
pouvoir le président autocratique Hosni Moubarak en février 2011.
Une banderole déployée à une entrée de la place proclamait : "Interdit aux Frères musulmans".
"Nous ne voulons pas remplacer un dictateur par un autre" affirmait un
étudiant, Asser Ayub, 23 ans. "Morsi est le président des Frères, pas
de la révolution", disait un autre manifestant, Mohamed Rashwan, 21 ans.
Comme tous les jours depuis une semaine, des heurts sporadiques ont eu
lieu dans la journée près de la place, aux abords de l’ambassade des
Etats-Unis, entre des jeunes et la police qui répondait aux jets de
pierres par des tirs de gaz lacrymogènes.
Selon l’Alliance populaire, un petit parti de gauche, un de ses
militants y est mort asphyxié, ce qu’a confirmé une source médicale. Il
s’agit du troisième décès provoqué par les troubles des derniers jours
en Egypte.
Ces accrochages ont été dénoncés par de nombreux manifestants anti-Morsi
à Tahrir, désireux de garder un caractère pacifique à leur
manifestation.
A Alexandrie, des milliers de personnes protestaient contre le président
sur une grande place bordant la Méditerranée. Mais en début de soirée
une contre-manifestation de partisans du président a elle aussi attiré
plusieurs milliers de personnes dans cette deuxième ville du pays.
Une manifestation pro-Morsi au Caire avait été annulée de crainte d’affrontements.
Dans la station balnéaire réputée de Charm el-Cheikh, sur la mer Rouge,
ainsi que dans les villes de Mansura, Tanta, Assiout, Sohag et Minya,
des rassemblements anti-Morsi ont également eu lieu.
Après une rencontre avec la hiérarchie judiciaire lundi, M. Morsi a
décidé de maintenir le décret controversé par lequel il s’est autorisé à
prendre toute mesure jugée nécessaire pour "protéger la révolution".
Ses partisans soulignent que ces pouvoirs exceptionnels lui donneront
les moyens d’engager des réformes indispensables pour la marche vers la
démocratie et assurent qu’ils cesseront avec l’adoption prévue dans
quelques mois de la nouvelle Constitution.
Mais en plaçant les décisions présidentielles à l’abri de tout recours
en justice, ce décret a provoqué la colère d’une grande partie du monde
judiciaire et de la classe politique.
Unique inflexion apparente, seuls ses "pouvoirs souverains" -dont la
définition reste vague- sont hors d’atteinte des juges, a dit la
présidence, laissant entendre que les décisions de routine pourraient
être soumises aux magistrats.
Le décret empêche aussi la justice d’examiner les recours contre le
processus de rédaction de la Constitution, que ses adversaires estiment
dominé par les islamistes.
Il demande également "de nouveaux jugements" dans les affaires de
meurtres de manifestants durant la révolte de 2011, faisant planer une
menace sur des chefs de la sécurité, voire un nouveau procès pour Hosni
Moubarak. Ce point répond à une demande de l’opposition et d’une grande
partie de l’opinion.
Alors que l’Egypte a besoin d’aide pour relancer son économie, le Fonds
monétaire international a averti qu’un "changement majeur" dans la
politique économique du pays pourrait remettre en cause le pré-accord
sur le plan d’aide de 4,8 milliards de dollars.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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