Les habitants de Siliana en Tunisie, théâtre de violences depuis trois
jours entre manifestants et policiers, se mobilisent de nouveau vendredi
contre le gouverneur et pour obtenir des aides des autorités qui
peinent à stabiliser le pays deux ans après sa révolution.
La principale centrale syndicale de Tunisie, l’UGTT, a appelé à une
marche symbolique sur Tunis et plusieurs milliers de personnes à pied, à
moto et en voiture parcouraient quelques kilomètres en direction de la
capitale en milieu de matinée.
"Avec nos âmes et notre sang, on se sacrifie pour Siliana",
scandaient-ils près de cette ville située à 120 km au sud-ouest de
Tunis.
Les manifestants interrogés par l’AFP ont assuré vouloir poursuivre leur
mobilisation jusqu’au départ du gouverneur régional, réclamant
également la fin de la répression policière et un programme de
développement.
"Nous allons (...) montrer la détermination des habitants à ne plus être
marginalisés" économiquement, a déclaré à l’AFP le secrétaire général
régional de l’UGTT, Nejib Sebti, appelant la foule à défiler "calmement
et pacifiquement".
Selon lui, une délégation de Sidi Bouzid (centre-ouest), le berceau de la révolution tunisienne, est attendue vendredi.
"Nous sommes prêts au dialogue mais sans la présence du gouverneur"
Ahmed Ezzine Mahjoubi, a ajouté M. Sebti, alors que le Premier ministre
Hamadi Jebali a exclu de le limoger sous la pression de la rue.
Dans la foule, de nombreux manifestants se sont plaints de violences
policières : "Voici ce que la police d’Ennahda (le parti islamiste au
pouvoir, ndlr) m’a fait", s’est emporté un homme montrant de larges
hématomes sur ses hanches et ses jambes.
Les rues étaient jonchées de pierres et des vestiges calcinés des
barricades de pneus installées par les manifestants. Sur la route de
Tunis, des habitants ont par ailleurs bâti des barrages, selon les
journalistes de l’AFP.
M. Jebali, qui est issu d’Ennahda, a promis jeudi une enquête sur les
violences, manifestants et policiers s’accusant mutuellement d’en être à
l’origine.
Il a cependant souligné qu’il ne cèderait pas à la pression de la rue :
"Nous n’accepterons pas un processus de destruction de la démocratie",
a-t-il martelé.
A l’approche du deuxième anniversaire le 17 décembre du début de la
révolution tunisienne, déclenchée par l’immolation d’un vendeur ambulant
de Sidi Bouzid excédé par la misère et le harcèlement des policiers, la
Tunisie est une nouvelle fois confrontée à une vague de violences.
Les manifestations sociales dégénérant en affrontements, les grèves et
les attaques de groupuscules salafistes se sont multipliées, alors que
le pays est plongé dans une impasse politique, aucun compromis sur la
nouvelle Constitution n’émergeant.
La Tunisie est aussi minée par une économie anémique en raison de la
crise de la zone euro et de l’instabilité qui a mis à mal la confiance
des investisseurs.
Le Premier ministre a dès lors lancé un appel au calme, soulignant que
le développement économique ne peut être réalisé "dans le chaos".
Un haut responsable d’Ennahda, Ameur Larayedh a pour sa part vu dans les violences la main de "contre-révolutionnaires".
Les revendications à Siliana ne sont pas sans rappeler celles de la
révolution qui a renversé Zine El Abidine Ben Ali : la misère, le
chômage et la dénonciation de l’arbitraire de la police.
Les violences dans la région ont fait plus de 300 blessés depuis mardi.
Les affrontements de jeudi étaient néanmoins beaucoup moins graves que
la veille, notamment car la police a renoncé, face aux critiques, à
l’usage de cartouches de chevrotine.
Siliana est frappée par de grandes difficultés économiques. Selon des
statistiques officielles, les investissements et les créations d’emplois
y sont en chute libre depuis le début de l’année.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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