mercredi 28 novembre 2012

Egypte : la police tire des gaz lacrymogènes sur des manifestants au Caire

De nouveaux heurts ont éclaté mercredi au Caire entre manifestants et forces anti-émeutes au lendemain d’une mobilisation populaire inédite contre le président islamiste Mohamed Morsi dont la décision de se doter de pouvoirs exceptionnels divise le pays.
Des heurts avaient eu lieu dans la nuit dans les rues environnantes de la place Tahrir avant de s’y propager le matin. Les forces de l’ordre ont tiré des gaz lacrymogènes sur les manifestants, et des gaz ont atteint les tentes où des protestataires campent depuis le 23 novembre, selon un photographe de l’AFP.
La télévision a montré des images de protestataires masqués attrapant les canettes de gaz pour les lancer à leur tour vers la police dans une rue proche de l’ambassade des Etats-Unis, non loin de cette place emblématique de la révolution de 2011 qui a renversé le président Hosni Moubarak.
Des centaines de manifestants avaient passé la nuit sur la place après des manifestations de dizaines de milliers de personnes à travers le pays pour dénoncer la décision le 22 novembre du président Morsi de renforcer provisoirement ses pouvoirs afin, selon lui, de pouvoir engager les réformes.
Mais les détracteurs du président l’ont accusé de se comporter en "nouveau pharaon" et de "voler la révolution".
Le décret par lequel les décisions de M. Morsi sont désormais à l’abri de tout recours en justice a provoqué une crise sans précédent depuis l’élection en juin du premier chef islamiste du pays le plus peuplé du monde arabe, désormais divisé entre pro et anti-chef de l’Etat.
Depuis le début des troubles, trois personnes ont été tuées dans des heurts entre policiers et manifestants ou entre protestataires des deux camps rivaux, selon des sources médicales. Des dizaines d’autres ont été blessées, dont 100 mardi, selon le ministère de la Santé.
Les violences ont été néanmoins dénoncées par de nombreux manifestants anti-Morsi à Tahrir, désireux de garder un caractère pacifique à leur manifestation. Les rassemblements de mardi lors desquels le puissant mouvement des Frères musulmans, dont est issu le président, a été également conspué, ont eu lieu dans la plupart des 27 provinces du pays, dont Alexandrie, deuxième ville d’Egypte.
"Dégage !", ont scandé les manifestants reprenant le slogan emblématique de la révolte anti-Moubarak. Une banderole déployée à une entrée de la place Tahrir proclamait : "Interdit aux Frères musulmans". "Nous ne voulons pas remplacer un dictateur par un autre", selon un manifestant, Asser Ayub, 23 ans.
Après une rencontre avec la hiérarchie judiciaire lundi, M. Morsi a maintenu le décret controversé par lequel il s’est autorisé à prendre toute mesure jugée nécessaire pour "protéger la révolution".
Pour ses partisans, ces pouvoirs exceptionnels lui permettront d’engager des réformes indispensables pour la marche vers la démocratie et cesseront avec l’adoption prévue dans quelques mois de la nouvelle Constitution.
Unique inflexion apparente, seuls ses "pouvoirs souverains" -dont la définition reste vague- sont hors d’atteinte des juges, a dit la présidence, laissant entendre que les décisions de routine pourraient être soumises aux magistrats.
Le décret empêche aussi la justice d’examiner les recours contre le processus de rédaction de la Constitution, que ses adversaires estiment dominé par les islamistes.
Alors que l’Egypte a besoin d’aide pour relancer son économie, le Fonds monétaire international a averti qu’un "changement majeur" dans sa politique économique pourrait remettre en cause le pré-accord sur le plan d’aide de 4,8 milliards de dollars.
Pour les Etats-Unis, la situation en Egypte "n’est pas claire".
Le département d’Etat a appelé à la fin de "l’impasse constitutionnelle" tout en minimisant les risques de voir M. Morsi se transformer en autocrate. "Nous ne savons pas encore ce qui va résulter de ces (rencontres). Mais on est loin d’un autocrate qui dirait simplement +c’est ça ou rien+".
Toutefois, l’ambassade des Etats-Unis au Caire a semblé plus critique. "Le peuple égyptien a clairement indiqué lors de la révolution du 25 janvier qu’il en avait assez de la dictature", peut-on ainsi lire sur un tweet du compte officiel de l’ambassade.

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