mardi 13 août 2013

Soudan : Un centre de recherche en pointe sur le mycétome

Au sud de Khartoum, derrière les murs en brique du centre de recherche sur le mycétome, se cache l’un des rares succès médicaux du Soudan, un établissement impeccable qui soigne gratuitement les Soudanais depuis des années.
Les pieds bandés, suintant et déformés, les patients arrivent de tout le pays dans ce centre du quartier de Soba, fondé par Elsheikh Maghoub, 78 ans, et dirigé par le professeur de chirurgie A.H. Fahal.
Le mycétome, une infection fongique qui se caractérise par des pieds suintant, peut se propager à tout le corps, causant de multiples déformations et parfois la mort.
Le Soudan est à la pointe de la recherche sur le mycétome, "maladie gravement négligée" selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Une première pour ce pays classé dans les derniers des indices de développement de l’ONU.
La maladie touche également le Tchad, le Niger, le Nigeria, l’Ethiopie, la Somalie et quelques régions du Yémen et de l’Arabie Saoudite, selon des experts.
Mais c’est au Soudan, pays pauvre et en proie à des violences, que se trouve cet établissement reconnu internationalement.
"La plupart des malades sont des fermiers, ou des gardiens de troupeaux. Ils sont pauvres, de plus en plus", explique M. Mahgoub.
Il a ouvert le premier centre sur le mycétome au Soudan en 1968, avec une infirmière et un technicien britannique.
A l’époque, "beaucoup de personnes se demandaient : pourquoi devrais-je m’occuper de cette maladie, difficile à diagnostiquer et difficile à traiter ?", explique-t-il aux journalistes lors d’une visite organisée de son centre.
L’établissement de Soba, ouvert en 1990, a son propre laboratoire, dispose de deux salles et emploie à mi-temps sept médecins, en plus de M. Mahgoub et du directeur.
Quelque 6.400 patients y ont déjà été traités, mais les deux hommes cherchent toujours à comprendre pourquoi le mycétome est si répandu au Soudan et dans les pays voisins.
"Je pense qu’il y a deux facteurs", résume M. Mahgoub. D’abord, les personnes travaillant dans les champs ont plus de chances d’être infectées par une épine dans le pied. Ensuite, beaucoup de patients ont des systèmes immunitaires faibles.
Mohammed al-Amien Ahmad est un cas typique. Il y a une vingtaine d’années, une épine s’est plantée dans le pied de ce fermier. "L’épine est sortie et tout semblait aller bien", explique-t-il au Dr Mahgoub, "puis les gonflements sont apparus, et ça grattait un peu". Mais sa situation a empiré ces deux dernières années.
La soixantaine, vêtu d’un costume traditionnel, le fermier a parcouru plus de 500 km avec son pied gonflé et suintant de pus pour se rendre au centre.
Dans la majorité des cas, le mycétome n’est pas douloureux et les patients, comme ce fermier, retardent le moment de se rendre chez un médecin.
"La première chose que nous leur disons, c’est de venir vite", explique M. Mahgoub, "parce que si le gonflement n’est pas trop important, on peut tout enlever". Il faut ensuite prendre des traitements antifongiques.
Mais si au centre tout est gratuit, les traitements antifongiques prescrits après les interventions sont à la charge des patients, qui ne peuvent pas toujours se le permettre. "La maladie reprend alors là où on l’avait laissée. C’est un vrai problème", explique M. Mahgoub.
Les prix des médicaments ont explosé ces dernières années dans le pays, et la situation sanitaire inquiète le ministère de la Santé, alors que de nombreux médecins soudanais quittent leur pays pour exercer à l’étranger.

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