Le premier président d’Algérie, Ahmed Ben Bella, a été accompagné, après la grande prière du vendredi, à sa dernière demeure au carré des Martyrs du grand cimetière Al-Alia d’Alger, par le président Abdelaziz Bouteflika, la classe politique algérienne et de hauts dirigeants du Maghreb. "L’Algérie n’est pas la seule à l’avoir perdu", a déclaré à la télévision algérienne le président tunisien Moncef Marzouki, venu présenter un dernier hommage au défunt. "Le Grand Maghreb l’a perdu aussi, tout comme la nation arabe. Il était le symbole du tiers-monde", a souligné cet ancien opposant, entouré de membres de son gouvernement.
D’autres hauts responsables politiques ont fait le déplacement : le Premier ministre marocain Abdelilah Benkirane, pour qui Ben Bella a été "un symbole de la lutte contre le colonialisme", son homologue mauritanien Moulay Oulad Mohamed El Aghdas, mais aussi le président sahraoui du Front Polisario Mohamed Abdelaziz, le fils de l’émir du Qatar, Jouan Ben Hamed Ben Khalifa Al Thani et l’ancien président algérien Chadli Bendjedid. Sous une pluie battante, ils ont marché derrière le président Abdelaziz Bouteflika pour accompagner la dépouille de Ben Bella, décédé chez lui dans son sommeil mercredi à l’âge de 95 ans, à l’intérieur du cimetière d’El-Alia, dans l’est de la capitale.
Dans ce terrain de 78 hectares, où se serrent plus de 250 000 tombes de musulmans et chrétiens, le cercueil était porté par plusieurs officiers marchant au pas, au rythme des tambours, en direction du carré des Martyrs où est déjà enterré le pire ennemi de Ben Bella : Houari Boumediene, son compagnon d’armes et ministre de la Défense qui l’avait renversé en 1965 et placé en détention, mais aussi le président assassiné en 1992 et héros de la révolution Mohamed Boudiaf, de même que d’autres figures emblématiques de cette indépendance acquise il y a 50 ans cette année.
"Nous sommes rassemblés aujourd’hui pour accompagner à sa dernière demeure un grand homme qui a consacré toute son existence à l’Algérie et à son indépendance, a déclaré le ministre des Moudjahidine Mohamed Chérif Abbas, chargé de l’oraison funèbre. Un sage qui a marqué à la fois l’histoire de la guerre de libération et celle de l’Algérie indépendante, dont il fut le premier président". Le président Bouteflika a été omniprésent pendant ces deux journées intenses d’hommage à Ben Bella, alors que les deux hommes ne s’étaient réconciliés qu’à la faveur de l’élection à la présidence en 1999 de l’ancien ministre des Affaires étrangères de Boumediene.
Il avait déjà accompagné jeudi jusqu’au Palais du peuple la dépouille de Ben Bella qu’il avait nommé président du Comité des sages de l’Afrique en 2007, chargé de la prévention et solution des conflits du continent noir. Les conditions d’accès à cette résidence des gouverneurs ottomans bâtie au XVIIIe siècle avaient été allégées pour permettre à la population de rendre un dernier hommage au héros de la lutte anticolonialiste avant son enterrement vendredi après-midi. À la différence de l’ensemble du monde politique et militaire algérien, et du corps diplomatique étranger, peu d’Algériens s’étaient déplacés : Alger a les pieds dans l’eau, fouettée par les averses et le vent depuis mercredi.
Même le cercueil en bois du défunt a dû être recouvert de larges bâches de plastique blanc dans le cortège couvert de fleurs qui le menait vers le cimetière, après une sortie du palais saluée par la garde républicaine. Le long cortège s’était ébranlé dans le vieil Alger, salué sur son passage par les youyous de femmes postées sur les balcons et dans la rue, luttant contre la pluie, en direction du cimetière El-Alia. Les routes étaient bien dégagées, ne serait-ce qu’à cause du mauvais temps qui a gardé la population devant son poste de télévision pour suivre le déroulement filmé des événements de la journée, entrecoupé d’images de Ben Bella : lorsqu’il est devenu président du Conseil national de la révolution algérienne (CNRA), chef du gouvernement, le 27 septembre 1962, puis après son élection le 15 septembre 1963 comme premier président de la République algérienne.
Aucune image qui fâche n’a été montrée : ses 15 ans de prison dont il a été libéré par Chadli en 1980, puis l’oubli de son nom dans l’histoire officielle du pays jusqu’en 1999. Mais un Ben Bella souriant à l’élection d’Abdelaziz Bouteflika à la présidence et une longue étreinte entre les deux hommes a été diffusée, au ralenti et en boucle, par la télévision nationale qui s’est mise mercredi, comme l’ensemble du pays, en deuil pour huit jours.
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