Une loi sur les partis adoptée par les autorités libyennes, la
première du genre depuis 1964, empêche les islamistes radicaux et les
fédéralistes de s’organiser politiquement, une stratégie d’"exclusion"
dénoncée par leurs représentants.
La loi adoptée mardi soir, dont le texte n’a pas été rendu public,
interdit notamment les formations politiques fondées sur des
considérations religieuses, régionales ou tribales, selon des membres du
Conseil national de transition (CNT, au pouvoir).
Selon Fathi Baaja, un membre du CNT, cette loi ne vise pas les
islamistes modérés, mais exclut les islamistes radicaux qui "suivent une
politique d’exclusion envers les autres".
Depuis le début du Printemps arabe, les islamistes ont été les grands
vainqueurs des élections, en particulier en Tunisie et en Egypte, les
deux pays méditerranéens encadrant la Libye, où un résultat similaire
est attendu en juin lors de l’élection d’une Assemblée constituante.
Les Frères musulmans libyens, principale force organisée dans le pays,
avaient annoncé leur intention de ne pas participer directement à la vie
politique et d’axer leurs activités sur le social.
La Confrérie a toutefois appelé ses membres à créer des partis. Ainsi,
un représentant des Frères musulmans a été élu début mars à la tête du
Parti de la justice et de la construction, formé d’islamistes et
d’indépendants.
Le porte-parole de ce parti, Nizar Kaawan, a déclaré que la "loi ne vise
pas directement les Frères musulmans, mais va à l’encontre de la
déclaration constitutionnelle (du CNT) qui affirme la liberté de
création des partis".
Il a déploré que la loi interdise aux islamistes radicaux, dont les salafistes, de participer à la vie politique.
"Nous préférons que l’occasion soit donnée aux salafistes et aux autres
groupes radicaux de (...) s’initier à la démocratie et au dialogue, ce
qui leur permettrait de renoncer à la violence", a-t-il ajouté.
La nouvelle loi devrait également empêcher les partisans d’un système fédéraliste de s’organiser politiquement.
La proclamation en mars de l’autonomie de la Cyrénaïque, région qui
s’étend de la frontière égyptienne à Syrte, en mars à Benghazi (est),
avait provoqué la colère du pouvoir central et suscité les craintes
d’une partition du pays.
Le porte-parole du Conseil supérieur de la Cyrénaïque, qui milite pour
le fédéralisme, Abou Bakr Baïra, a reconnu que la loi "touche
directement" les partisans du fédéralisme.
"La loi se dresse devant le pluralisme des partis" et "va à l’encontre
des acquis de la révolution libyenne", a estimé M. Baïra. Dénonçant une
"politique d’exclusion", il a espéré que cette "loi ne soit pas
appliquée et qu’on laisse le peuple libyen choisir son destin".
Pendant les décennies du règne de Muammar Kadhafi, renversé et tué en
octobre dernier, toute organisation à but politique était bannie.
Le CNT a abrogé début janvier la loi criminalisant les organisations
politiques, mais depuis, aucun texte ne régissait la création des
partis.
Les formations se sont néanmoins multipliées dans le but de participer à l’élection de l’Assemblée constituante.
Le 11 avril, la Commission électorale avait appelé à l’adoption au plus
vite de la loi sur la formation des partis politiques afin que
l’élection puisse avoir lieu dans les temps.
(25 avril 2012 - Avec les agences de presse)
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