Après quatre jours de discussions marathon à Addis-Abeba, les présidents
du Soudan, Omar el-Béchir, et du Soudan du Sud, Salva Kiir, sont
parvenus mercredi à un accord partiel prévoyant notamment une zone
démilitarisée à la frontière entre les deux pays qui ont failli entrer
en guerre au printemps dernier.
"Il y a un accord sur certains points", a déclaré le porte-parole de la
délégation du Soudan du Sud Atif Kiir, tandis que son homologue
soudanais Badr el-din Abdullah Badr a parlé de "progrès sur beaucoup de
sujets". Tous deux ont annoncé la signature d’un accord pour jeudi.
Les détails de l’accord n’ont pas été révélés mais les deux porte-parole
ont indiqué que celui-ci prévoit une zone tampon d’où les militaires
des deux parties devront se retirer, à dix kilomètres de part et d’autre
de la frontière de fait, celle-ci n’ayant pas été tracée formellement.
Sur le plan économique, les deux parties sont également convenues de
permettre la reprise de la production pétrolière au Soudan du Sud.
En revanche, il n’a pas été possible de parvenir à un accord concernant
la région disputée d’Abyei, ou sur des zones frontalières revendiquées
par les deux pays.
"Les deux pays ne sont pas parvenus à un accord sur deux sujets, celui
d’Abyei (...) et celui de la frontière", a déclaré à la presse le
porte-parole sud-soudanais à l’issue des pourparlers, mercredi dans la
nuit.
"Les deux pays sont convenus d’avoir un autre cycle de négociations
(...) notamment sur le problème de la frontière, sur les zones
contestées", a-t-il ajouté.
La date d’un éventuel prochain cycle de négociations n’a pas été précisée.
Son homologue Abdullah s’est montré optimiste à propos des questions qui devraient être réglées plus tard.
"Nous avons surmonté beaucoup de divergences... il y a encore quelques
unes sur Abyei", a-t-il dit, ajoutant que le réglement des problèmes
frontaliers "allait prendre du temps".
Les présidents el-Béchir et Kiir s’étaient retrouvés dimanche à Addis
Abeba, siège de l’Union africaine (UA), pour ce qui devait être une
seule journée de discussions à l’issue de laquelle ils devaient signer
un accord traitant aussi bien du tracé de leur frontière commune, de la
démilitarisation de cette zone, que de la production et du transit du
pétrole.
Le statut de la région contestée d’Abyei — un territoire grand comme le
Liban, à la frontière entre les deux pays — a été une des principales
pierres d’achoppement tout au long de ces difficiles discussions, selon
des diplomates sur place.
L’accord partiel est intervenu mercredi soir, à l’issue d’un ultime
face-à-face à huis clos entre MM. el-Béchir et Kiir dans une pièce du
grand hôtel de la capitale éthiopienne.
Très peu d’informations avaient filtré sur l’avancée des discussions
visant à régler définitivement les questions laissées en suspens par
l’accord de paix de 2005, qui a mis fin à des décennies de guerres
civiles entre rebelles du Sud et gouvernement de Khartoum et débouché
sur l’indépendance du Soudan du Sud en juillet 2011.
Les tensions entre les deux pays autour de ces questions ont dégénéré
entre mars et mai en combats frontaliers entre leurs deux armées, les
plus intenses depuis la partition du Soudan.
La communauté internationale, très inquiète du risque d’un nouveau
conflit à grande échelle entre Juba et Khartoum, belligérants de la plus
longue guerre civile du continent, a accentué sa pression sur les deux
chefs d’Etat pour qu’ils parviennent à un accord définitif sur les
questions en suspens.
Un des points de désaccord majeur semble concerner la zone dite des "14
miles", une bande de terre frontalière s’étendant à 14 miles (22,5 km)
au sud du cours d’eau Bahr el-Arab et revendiquée par les deux parties,
selon des diplomates.
Le ministre soudanais de la Défense Abdelrahim Mohamed Hussein, cité par
le Centre des médias soudanais, proche des services soudanais de
renseignement, a assuré qu’il n’y aurait "aucun compromis autour de
cette bande, territoire soudanais".
Le blocage autour de ce secteur semble en outre faire obstacle à la mise
en place d’une zone démilitarisée de chaque côté de la frontière, sur
laquelle les parties étaient censées se mettre d’accord au cours de ce
cycle de négociations.
Cette zone-tampon vise à éviter toute reprise des affrontements
frontaliers mais aussi à couper les lignes d’approvisionnement des
mouvements rebelles actifs dans les régions soudanaises du Kordofan-Sud
et du Nil-Bleu, que Khartoum accuse Juba de soutenir.
Dans une lettre au Conseil de sécurité de l’ONU fin juillet, Khartoum
s’était insurgé contre une carte de l’UA délimitant provisoirement la
frontière pour servir de base à l’établissement de la zone démilitarisée
et plaçant la zone des "14 miles" côté sud-soudanais.
Début août, Khartoum et Juba ont conclu un accord sur le pétrole,
notamment sur les redevances de passage du brut sud-soudanais par les
oléoducs du Nord, un des sujets les plus épineux entre les deux voisins.
Le Soudan du Sud a hérité de 75% des réserves de brut du Soudan d’avant
la sécession mais dépend pour l’exporter des infrastructures du Nord.
Des détails de cet accord pétrolier restent néanmoins à finaliser.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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