Le technocrate libyen Moustapha Abou Chagour, considéré comme proche
des islamistes, a été élu mercredi soir Premier ministre avec comme
priorité de rétablir la sécurité en Libye, quelques heures après une
attaque à Benghazi qui a fait quatre morts américains dont
l’ambassadeur.
Près d’un an après la chute du régime de Muammar Kadhafi en octobre
2011, M. Abou Chagour, qui succède au chef de gouvernement de
transition, Abdelrahim al-Kib, aura également pour tâche de conduire une
nouvelle période de transition.
Mais le nouveau gouvernement qu’il formera disposera de plus de
légitimité et d’une plus grande marge de manoeuvre que le cabinet
sortant dont l’unique mission était de gérer les affaires courantes.
M. Abou Chagour a obtenu 96 des votes à l’Assemblée nationale
libyenne réunie à Tripoli, devançant de seulement deux voix le chef de
l’alliance des libéraux Mahmoud Jibril. Au premier tour, M. Jibril avait
obtenu 68 voix contre 55 pour M. Abou Chagour et 41 pour le candidat
islamiste Awadh al-Barassi.
Agé de 61 ans, cet actuel vice-Premier ministre a pu l’emporter grâce
aux voix des députés du Parti de la justice et de la construction (PJC)
issu des Frères musulmans, après la défaite de leur candidat au premier
tour.
Entré au gouvernement libyen en tant que vice-Premier ministre en
novembre 2011, M. Abou Chagour a fait ses études notamment aux
Etats-Unis, où il a obtenu son doctorat en ingénierie électrique.
Opposant au régime Kadhafi, il s’était exilé aux Etats-Unis dans les
années 1980, avant de se joindre au Front de salut national libyen, une
formation de l’opposition à l’étranger.
Aux Etats-Unis, il se forge un CV impressionnant : après avoir obtenu
son doctorat au California Institute Technology, il a enseigné à
l’Université de Rochester à New York puis à l’Université de l’Alabama.
Durant sa carrière professionnelle, il a participé au programme spatial de la Nasa et a collaboré avec le Pentagone.
Au total huit candidats étaient en lice pour son poste. Ils s’était
succédé lundi et mardi à la tribune pour convaincre les 200 membres du
Congrès général national (CGN), plus haute autorité politique du pays
issue des élections du 7 juillet.
Les programmes des candidats étaient axés sur la sécurité et
l’intégration des ex-rebelles ayant combattu le régime Kadhafi. La
construction d’une armée et d’une police professionnelle, de même que la
surveillance des frontières constituent la pierre angulaire des
programmes présentés.
Les graves problèmes de sécurité ont encore été illustrés mardi soir
avec la mort de l’ambassadeur des Etats-Unis en Libye, Chris Stevens, et
de trois fonctionnaires américains, tués dans une attaque menée par des
hommes armés contre le consulat américain à Benghazi (est).
Selon des sources de sécurité libyennes, les assaillants voulaient
protester contre un film d’un réalisateur américano-israélien jugé
offensant pour l’islam.
Malgré les incidences de cette attaque condamnée par les autorités
libyennes et la communauté internationale, le CGN a maintenu l’élection
du Premier ministre.
L’économie, le volet social et la réconciliation nationale étaient
aussi parmi les thèmes abordés par les candidats qui étaient d’accord
pour une suppression des subventions des produits alimentaires et du
carburant, couplée avec une amélioration des revenus et la construction
de logements sociaux.
Dans un rapport rédigé fin août et transmis mardi à l’AFP, les
Nations unies ont estimé que "la sécurité publique en Libye ne sera
améliorée que si le nouveau gouvernement consent des efforts importants
pour appliquer des réformes".
L’ONU a appelé à "un nouveau gouvernement qui associe toutes les
parties et qui recueille l’aval du peuple libyen. Ainsi, les problèmes
immédiats pourront être effectivement abordés, surtout la difficile
instauration d’institutions publiques solides et modernes, la collecte
des armes et l’intégration des révolutionnaires dans les institutions
chargées de la sécurité (...)".
L’Alliance des forces nationales (AFN) de Mahmoud Jibril, une
coalition d’une soixantaine de petits partis libéraux menée par des
architectes de la révolte de 2011, détient 39 sièges sur les 80 réservés
à des partis politiques.
Le PJC, issu des Frères musulmans, est la deuxième formation
politique avec 17 sièges. Les 120 sièges restants ont été attribués à
des candidats indépendants aux allégeances et convictions encore floues.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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