Des manifestations de masse sont attendues dimanche en Egypte pour
réclamer la démission ou au contraire défendre le président islamiste
Mohamed Morsi, confronté à une grave épreuve de force pour le premier
anniversaire de son arrivée au pouvoir.
L’armée a indiqué s’être déployée dans les divers gouvernorats pour
renforcer la protection des installations vitales, et se poser en
garante de la stabilité du pays en cas de troubles graves.
Plusieurs défilés doivent converger en fin d’après-midi vers le palais
présidentiel dans le quartier d’Héliopolis, en périphérie du Caire, pour
demander le départ du chef de l’Etat, accusé par l’opposition de
gouverner au seul profit des Frères musulmans, la confrérie dont il est
issu.
Les islamistes ont prévu quant à eux la poursuite de rassemblements
entamés depuis plusieurs jours à Nasr City, un faubourg de la capitale,
pour défendre la "légitimité" du président. Le Parti de la liberté et de
la justice, émanation des Frères musulmans, a appelé samedi à une
"mobilisation générale" pour M. Morsi.
Des manifestations sont également attendues en province, où des heurts
entre adversaires et partisans du chef de l’Etat ont fait huit morts,
dont un Américain, ces derniers jours.
Des affiches appelant à se joindre aux rassemblements contre le
président Morsi sont collées sur les murs du Caire, ou sur les vitres
des voitures. Des graffitis avec la date du "30 Juin" sont également
apparus dans les rues.
Cette crise traduit, près de deux ans et demi après la chute du régime
de Hosni Moubarak, la persistance de clivages profonds et d’un climat de
crise dans le plus peuplé des pays arabes (plus de 80 millions
d’habitants), qui pèsent également lourdement son économie.
Les adversaires de M. Morsi dénoncent une dérive autoritaire du pouvoir
destinée à instaurer un régime idéologiquement et politiquement dominé
par les islamistes, ainsi que son incapacité à relancer l’économie.
Ses partisans en revanche soulignent qu’il puise sa légitimité dans la
première élection présidentielle libre de l’histoire de l’Egypte et
accusent l’opposition laïque de vouloir un "coup d’Etat".
Les appels à manifester contre le président égyptien ont été lancés par
un mouvement, Tamarrod (rébellion en arabe), qui a revendiqué quelque 22
millions de signatures réclamant son départ et l’organisation d’une
présidentielle anticipée, soit plus que le nombre d’électeurs de
M. Morsi en 2012 (13,23 millions).
Mohamed El Baradei, l’une des figures de l’opposition, a appelé samedi
M. Morsi à "écouter le peuple" et à laisser se tenir une présidentielle
anticipée.
Le camp présidentiel met néanmoins en avant que cette pétition n’a pas
de valeur constitutionnelle, alors que M. Morsi affirme vouloir rester
jusqu’à l’échéance de son mandat, en juin 2016.
Le président américain Barack Obama a depuis Pretoria exprimé son
"inquiétude" face à la crise en Egypte et appelé M. Morsi et
l’opposition à engager un dialogue "plus constructif".
Craignant des dérapages violents, le département d’Etat a annoncé le
départ d’une partie de son personnel diplomatique et conseillé aux
Américains de différer tout voyage non-indispensable en Egypte.
Plusieurs pays, dont la France et la Grande-Bretagne, ont diffusé des
consignes de prudence à leurs ressortissants, leur recommandant d’éviter
les rassemblements ou de limiter leurs déplacements.
Certaines compagnies étrangères ont demandé à leurs salariés expatriés ou leurs familles de partir.
La crainte d’une aggravation de la crise provoque en outre depuis
plusieurs jours une ruée des automobilistes sur les stations service, et
pousse de nombreux Egyptiens à faire des provisions.
Samedi, plusieurs parlementaires de la chambre haute (Choura), de
tendance laïque, ont démissionné pour afficher leur soutien aux
manifestations anti-Morsi.
L’opposition a refusé l’appel au dialogue, jugé de "pure façade", lancé
cette semaine par M. Morsi pour qui la polarisation extrême du pays
pourrait conduire au "chaos".
La première année au pouvoir du premier président civil et islamiste
d’Egypte a déjà été marquée par plusieurs crises, en particulier fin
2012 lors de la rédaction et l’adoption par référendum d’une nouvelle
constitution soutenue par les islamistes.
(30-06-2013)
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