lundi 17 décembre 2012

Tunisie : le président Marzouki chahuté à Sidi Bouzid

Des manifestants ont jeté des pierres lundi contre le chef de l’État tunisien Moncef Marzouki et le président du Parlement Mustapha Ben Jaafar à Sidi Bouzid, où se déroulaient les célébrations du deuxième anniversaire du début de la révolution tunisienne.
Les jets ont commencé après un discours de Moncef Marzouki et alors que Mustapha Ben Jaafar s’apprêtait à prendre la parole. Le service d’ordre a rapidement évacué les deux dirigeants vers le siège de la préfecture de cette région marginalisée du centre-ouest de la Tunisie, a constaté un journaliste de l’AFP. En scandant "le peuple veut la chute du gouvernement", les manifestants ont aussi envahi le parvis sur lequel était montée la tribune où le chef de l’État s’était exprimé. La police n’est pas intervenue, alors que les heurts entre manifestants et policiers se multiplient dans le pays depuis plusieurs mois.
Lorsque le président tunisien a pris la parole, une grande partie des 5 000 personnes réunies sur la place ont scandé "Dégage, dégage", l’un des cris de ralliement du soulèvement qui a provoqué la chute du régime de Zine El Abidine Ben Ali. Copieusement sifflé, Moncef Marzouki a promis des progrès économiques sous six mois aux habitants de Sidi Bouzid, alors que la misère et le chômage étaient déjà au coeur des causes de la révolte de l’hiver 2010-2011.
"Je comprends cette colère légitime, mais le gouvernement a diagnostiqué le mal. Dans six mois, un gouvernement stable sera en place et livrera les médicaments pour guérir le mal du pays", a-t-il déclaré. "Pour la première fois, nous avons un gouvernement qui ne vole pas le peuple", a-t-il encore dit, hué par les manifestants.
Moncef Marzouki avait déjà été chahuté quelques heures plus tôt, lorsqu’il s’était rendu sur la tombe de Mohamed Bouazizi, le vendeur ambulant qui s’était immolé par la feu le 17 décembre 2010 à Sidi Bouzid, donnant le coup d’envoi au Printemps arabe. Des islamistes radicaux étaient présents en nombre lundi devant la préfecture de Sidi Bouzid : des militants du parti Hizb Ettahrir, un mouvement autorisé se disant non-violent, brandissaient des drapeaux noirs ou blancs, bannières de la mouvance salafiste. Les salafistes djihadistes sont accusés d’avoir orchestré plusieurs flambées de violences depuis juin, en particulier l’attaque de l’ambassade américaine à Tunis le 14 septembre en marge d’une manifestation, dans laquelle quatre assaillants ont été tués.

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Marzouki chahuté à Sidi Bouzid
Le président tunisien Moncef Marzouki a été chahuté lundi à Sidi Bouzid, où il était venu se recueillir pour le deuxième anniversaire de la révolution qui a donné le coup d’envoi au Printemps arabe, dans un contexte de fortes tensions en Tunisie. Moncef Marzouki a déposé dans la matinée une gerbe de fleurs sur la sépulture de Mohamed Bouazizi, vendeur ambulant qui s’était immolé par le feu le 17 décembre 2010 devant la préfecture de cette région marginalisée du centre-ouest du pays pour dénoncer les brimades policières et la pauvreté.
Le chef de l’État, un laïc allié aux islamistes d’Ennahda qui dirigent le gouvernement, a été alors pris à partie par les habitants de cette ville, berceau de la révolte qui a poussé le président Zine el-Abidine Ben Ali à la fuite le 14 janvier 2011. "Vous êtes venus il y a un an et vous aviez promis que les choses allaient changer sous six mois, mais rien n’a changé !" a lancé un manifestant. "On ne veut pas de vous ici", s’est exclamé un autre. Moncef Marzouki a répliqué que le pouvoir tunisien n’avait "pas de baguette magique". Le chef de l’État devait ensuite prononcer un discours devant la préfecture, là où Mohamed Bouazizi s’était immolé. Quelque deux à trois mille personnes étaient réunies sur cette place en milieu de matinée.
Les revendications économiques et sociales étaient au coeur de la révolution tunisienne, mais le chômage et une croissance anémique continuent de miner le pays, si bien que les manifestations, émaillées de violences, se sont multipliées ces derniers mois. Fin novembre, 300 personnes ont ainsi été blessées au cours de 5 jours d’affrontements avec la police après qu’une grève a dégénéré en violences à Siliana, au sud-ouest de Tunis.
Les médias tunisiens, comme les habitants de la région de Sidi Bouzid, exprimaient cette amertume lundi matin. "La ville de Menzel Bouzaienne (au sud de Sidi Bouzid, NDLR) a tant donné pour la révolution mais elle n’a rien récolté du point de vue investissements et développement. La situation est devenue plus mauvaise, le chômage a augmenté", s’est insurgé Hamid Nasri, dont le frère Chawki a été tué pendant le soulèvement. "Sidi Bouzid, l’éternelle étincelle", titrait le principal quotidien francophone La Presse avant d’égrainer "seuil de pauvreté creusé, taux de chômage multiplié, infrastructures économiques et industrielles au point zéro, terres hypothéquées, agriculture déprimée".
Selon le ministère tunisien de l’Industrie, les investissements ont chuté de 36 % dans la région et les offres d’emplois de 24,3 % sur les 11 premiers mois de l’année par rapport à la même période un an plus tôt. Le gouvernement dirigé par Ennahda est la première cible de ces critiques. Dix des organisateurs du Festival Bouazizi, célébrant le début de la première révolution du Printemps arabe, ont ainsi démissionné la semaine dernière en dénonçant la "mainmise" du parti islamiste sur l’organisation des événements.
Outre ses difficultés économiques, le pays est régulièrement confronté à des violences orchestrées par des groupuscules islamistes. Il est aussi plongé dans une impasse politique, faute de compromis sur la future Constitution, 14 mois après l’élection de la constituante. Des islamistes radicaux étaient présents en nombre lundi devant la préfecture de Sidi Bouzid : des militants du parti Hizb Ettahrir, un mouvement autorisé se disant non violent, brandissaient des drapeaux noirs ou blancs, bannières de la mouvance salafiste. Dans ce contexte, l’état d’urgence instauré le jour de la fuite de Ben Ali et donnant des pouvoirs accrus à l’armée et à la police est toujours en vigueur.

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