En ce matin glacial, Salem s’engage dans une longue marche sous la neige
pour amener son fils à l’école : comme chaque année avec l’arrivée du
froid, des villageois du Moyen-Atlas, région du Maroc aux hivers très
rigoureux, se battent contre les éléments et l’isolement.
Si la côte atlantique marocaine, en particulier dans le Sud, est réputée
pour sa douceur hivernale, l’intérieur du pays, constitué de massifs
montagneux, subit de fréquentes intempéries (gel, neige) de novembre à
avril.
Les habitants y sont souvent démunis. Vendredi dernier, un bébé, victime
du froid et malade, est ainsi décédé à Anfgou (Haut-Atlas), faute de
soins appropriés, selon plusieurs témoins.
A une centaine de kilomètres plus au nord, à l’approche du village
berbère de Timahdite, dans le Moyen-Atlas, la piste qui mène à la tribu
des Aït Kessou devient vite impraticable avec la boue et la neige fondue
qui la recouvrent.
"Les pick-up et camions ne peuvent plus s’approcher. A dos de mulet, je
parcours des dizaines de kilomètres pour m’approvisionner", explique à
l’AFP Moha Ouâalli, un père de famille. "Les gens comme nous n’ont pas
de vie ici", poursuit-il en regardant ses trois mulets -chargés de sacs
de blé et de nourriture- arpenter la piste en direction de la forêt.
Tenant par la main son fils de huit ans, Salem Saïd tente pour sa part
de marcher dans la neige. Parfois, il soulève son enfant pour presser le
pas.
"Je dois l’emmener à l’école et c’est à trois kilomètres. Il ne peut pas
y aller tout seul", souligne-t-il, réclamant une plus grande présence
de l’Etat.
"Nous ne demandons pas la lune. Une simple route praticable pour nous
désenclaver, c’est tout", explique M. Saïd avant de poursuivre son
chemin vers la seule école de la région.
En l’absence de route praticable, les véhicules ne peuvent
approvisionner les souks hebdomadaires des villages du Moyen et
Haut-Atlas.
Les autorités locales évoquent à demi-mots le manque de moyens, un "frein" selon elles au désenclavement.
"Il y a un chasse-neige pour toute la région, c’est insuffisant", dit à
l’AFP un élu local sous couvert de l’anonymat. "Il ne faut pas oublier
que le budget communal est limité. Sans une stratégie globale de l’Etat
pour l’infrastructure routière en milieu rural, le problème de
l’enclavement se posera chaque année", poursuit cet élu joint par
téléphone.
La région de Timahdite, avec celle d’Anfgou, est considérée comme la
plus concernée par le problème. Les premières chutes de neige ont été
particulièrement fortes cette année, soulignent les habitants, rendant
les célèbres forêts de cèdres à peine visibles sous l’immense manteau
blanc.
"La neige n’a pas que des effets négatifs. Elle permet le remplissage
des puits et des barrages. Mais le manque d’infrastructures isole les
habitants, surtout les plus démunis", souligne Lahcen Ouhalli, un
militant local de l’Association marocaine des droits humains (AMDH,
indépendante). "Ceux qui ont les moyens possèdent des tracteurs qu’ils
utilisent pour l’approvisionnement. Ils sont moins isolés que les
autres, qui n’ont que leurs mulets, leurs ânes ou leurs pieds",
note-t-il.
"C’est grâce à cet âne que je peux me déplacer pour acheter de quoi
vivre. Sinon, avec ce froid et cette neige, on ne peut rien faire",
confirme Fadma Bouba, une mère de famille.
La première vague de froid de la saison, au début du mois, a été
largement évoquée par la presse locale, qui a fait état de la mort de
quatre enfants.
Cette information a toutefois été démentie par le ministère de
l’Intérieur, selon lequel grâce à un important "dispositif" mis en
place, "tous les douars isolés" ont été "désenclavés dans un délai très
court".
Le ministre de la Santé Hossein El Ouardi, qui s’est rendu dans la
région d’Anfgou la semaine dernière, a annoncé lundi le lancement d’une
campagne d’aide médicale. Plus de 2.400 personnes doivent en bénéficier.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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