L'Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et le Koweït ont annoncé
vendredi douze milliards de dollars en aides ou investissements pour
l'Egypte, au moment où le président Abdel Fattah al-Sissi s'affiche
comme le fer de lance de la lutte anti-jihadistes.
L'annonce des trois puissances du Golfe, alliées centraux du président
Sissi depuis qu'il a destitué l'islamiste Mohamed Morsi en juillet 2013,
est intervenue à l'ouverture dans la station balnéaire de Charm
el-Cheikh d'une conférence économique internationale visant à attirer
des investisseurs étrangers en Egypte.
Mais la venue annoncée au dernier moment des chefs de la diplomatie
américaine John Kerry et britannique Philip Hammond --quand d'autres
pays occidentaux sont représentés par des ministres des Finances ou des
diplomates-- et les premières déclarations du secrétaire d'Etat
américain confortent l'idée que ces trois jours de conférence vont
également servir à asseoir l'influence de M. Sissi sur la scène
internationale.
Car même s'il réprime violemment toute opposition, Abdel Fattah al-Sissi
demeure un allié incontournable pour les occidentaux dans le monde
arabe, où le groupe Etat islamique (EI) grignote du terrain en Egypte et
en Libye après s'être installé en Syrie et en Irak.
Avant la conférence, le président égyptien s'est entretenu avec John
Kerry pour discuter des efforts de guerre de la coalition contre l'EI,
de la Libye et de la Syrie, selon le département d'Etat. "Le peuple
américain soutient la sécurité et le bien-être du peuple égyptien", a
dit le secrétaire d'Etat américain.
M. Kerry a également eu une réunion quadripartite avec le président
égyptien, le président palestinien Mahmoud Abbas et le roi Abdallah de
Jordanie au sujet du conflit israélo-palestinien.
A l'ouverture de la conférence, l'émir du Koweït cheikh Sabah al-Ahmed
Al-Sabah, le prince hériter d'Arabie saoudite Moqren ben Abdel Aziz et
le vice-président et Premier ministre des Emirats arabes unis Mohammad
ben Rachid al-Maktoum ont annoncé des aides cumulées de 12 milliards de
dollars, sous forme d'investissements pour l'économie égyptienne et
d'aides au développement, et dont trois milliards seront déposés à la
banque centrale.
Les Etats-Unis sont eux venus les mains vides à la conférence et n'ont
toujours pas débloqué la dernière partie de l'aide qu'elle accorde
annuellement à l'Egypte. Des diplomates américains ont martelé que M.
Kerry n'annoncerait pas le dégel de cette dernière enveloppe de 650
millions de dollars.
Washington alloue chaque année 1,5 milliard de dollars d'aide à l'Egypte, dont 1,3 milliard en assistance militaire.
Une partie de celle-ci avait été gelée après la destitution de Morsi et conditionnée à des réformes démocratiques.
Depuis, des hélicoptères de guerre Apache ont toutefois été livrés pour
soutenir Le Caire dans sa lutte contre les jihadistes dans le Sinaï.
Comme d'autres capitales occidentales, Washington fait mine de
s'émouvoir de la sanglante répression que Le Caire mène contre les
partisans de M. Morsi.
Mais les Etats-Unis n'ont jamais qualifié son renversement de coup
d'Etat et ont vite reconnu qu'ils ne pouvaient pas bouder le plus peuplé
et le mieux armé des pays arabes face aux jihadistes.
M. Sissi réclame la formation d'une force arabe pour juguler cette
menace islamiste armée, qui sera au menu du sommet de la Ligue arabe fin
mars. Il a récemment indiqué que l'Arabie Saoudite, le Koweït, les
Emirats arabes Unis et la Jordanie pourraient s'impliquer dans ce
projet.
"Les Etats-Unis sont désireux et impatients d'être le catalyseur du
développement économique de l'Egypte", a déclaré M. Kerry devant des
industriels américains et égyptiens en marge de la conférence de Charm
el-Cheikh. Il a toutefois ajouté, comme pour illustrer le dilemme
américain face à son allié arabe: "Nous espérons voir davantage de
progrès dans la réalisation des aspirations démocratiques du peuple
égyptien".
Car policiers et soldats ont tué plus de 1.400 manifestants pro-Morsi
depuis 2013 et emprisonné plus de 15.000 sympathisants islamistes,
tandis que l'ONU a dénoncé des "procès de masse expéditifs" au terme
desquels des centaines d'opposants pro-Morsi ont été condamnés à mort.
Les autorités égyptiennes ont annoncé la participation à la conférence
de près de 100 pays et 25 groupes ou organismes internationaux et M.
Sissi veut projeter l'image d'un pouvoir fort ayant su rétablir la
sécurité et la stabilité.
Son objectif pourrait être contrarié par les attentats meurtriers
revendiqués quasi quotidiennement par des jihadistes et visant la police
et l'armée en représailles, selon eux, à la répression. Les plus
meurtriers sont revendiqués par la branche égyptienne de l'EI, dont le
nord-Sinaï est le bastion.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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