Qu'Israël rende des comptes. Tel est l'espoir de Yasser al-Qassas et de
milliers de Gazaouis au moment où la Palestine rejoint la Cour pénale
internationale avec l'intention de faire juger les dirigeants israéliens
pour crimes de guerre et crimes liés à l'occupation.
La guerre de 2014 dans la bande de Gaza et la colonisation sont les deux
angles d'attaque de la direction palestinienne à l'heure de l'accession
formelle à la CPI mercredi.
Yasser al-Qassas fait partie des Palestiniens qui ont perdu certains des
leurs dans l'offensive menée par Israël en juillet-août 2014 pour faire
cesser les tirs de roquettes sur son territoire et détruire les tunnels
d'attaque palestiniens.
Environ 2.200 Palestiniens ont été tués selon des décomptes concordants.
Parmi eux se trouvaient 1.500 civils, rappelait un rapport récent de
l'office onusien Ocha qui indiquait que 2014 avait été l'année la plus
meurtrière depuis 1967 et l'occupation israélienne des Territoires.
Côté israélien, 73 personnes ont trouvé la mort, dont 67 soldats.
Une frappe sur leur immeuble de cinq étages a décimé la famille de
Yasser al-Qassas le 21 juillet à l'ouest de la ville de Gaza, se
rappelle ce Gazaoui sans emploi d'une quarantaine d'années. "Israël a
tué ma femme enceinte, quatre de mes filles et cinq autres membres de ma
famille", dit-il, "il faut qu'il paie pour ça à la CPI".
La direction palestinienne a lancé ce qu'un officiel directement
impliqué appelle un "effort national" pour mettre fin à ce qui constitue
selon lui "l'impunité" israélienne. Des commissions ont été établies,
dont l'une dédiée à Gaza, une autre à la colonisation. Des centaines de
Palestiniens, politiciens, experts et représentants de la société civile
sont mobilisés, dit cet officiel.
Cet effort repose largement sur les organisations qui défendent les droits des Palestiniens et collectent les éléments à charge.
Yasser al-Qassas est allée voir plusieurs d'entre elles. Ahed Bakr, pour
sa part, s'est rendu auprès du centre al-Mezan pour les droits de
l'Homme. Son fils Zakaria Ahed Bakr, 10 ans, son petit-fils Ahed Atef
Bakr, 10 ans, ses neveux Mohamed Ramez Bakr et Ismaïl Mohamed Bakr, 9 et
11 ans, ont été tués le 16 juillet alors qu'ils jouaient sur la plage
de Gaza. Leur mort sous le regard des journalistes a causé un vif émoi
international.
"J'exige que le président (palestinien Mahmud Abbas) soumette à la CPI
notre dossier contre l'Etat terroriste d'Israël pour que justice soit
rendue à nos enfants", dit Ahed Bakr, pêcheur de 55 ans.
"Israël a délibérément tué nos enfants. Le monde entier l'a vu en
direct. Je n'aurai pas de repos avant de voir les dirigeants israéliens
derrière les barreaux", dit-il.
L'armée israélienne mène ses propres enquêtes sur de possibles bévues,
dont quatre criminelles, sur le drame du 16 juillet ou encore le
bombardement d'une école de l'ONU qui avait fait environ 20 morts le 30
juillet à Jabaliya. Le professionnalisme de ces investigations "devrait
suffire" et "satisfaire n'importe qui" si les enquêtes sont à la
hauteur, disait récemment celui qui les dirige, le général Dan Efrony.
L'offensive judiciaire palestinienne indigne le gouvernement de Benjamin
Netanyahu selon lequel l'armée israélienne est "la plus morale du
monde".
Pour Israël, c'est le mouvement islamiste Hamas qui est coupable de
crimes de guerre pour avoir lancé ses roquettes sur des civils
israéliens et s'être servi de civils palestiniens comme boucliers
humains.
Dans un récent rapport, Amnesty International écrivait que les groupes
armés palestiniens s'étaient rendus coupables de crimes de guerre en
tuant des civils non seulement israéliens mais palestiniens par des tirs
de roquettes aveugles. Mais cela ne doit pas occulter les violations
israéliennes, ajoutait l'organisation qui, dans deux précédents
rapports, accusait aussi Israël de crimes de guerre.
Les Palestiniens ne jugent pas crédibles les enquêtes israéliennes.
"Nous avons documenté des centaines de cas dans lesquels les Israéliens
sont passibles de poursuites pour crimes de guerre", dit le directeur du
centre al-Mezan, Issam Younis, membre du comité national dédié à la
CPI. L'adhésion à la CPI vise à faire rendre des comptes à un Etat "qui
se croit au-dessus des lois".
Parmi les évènements dont est saisi al-Mezan figure le bombardement du
12 juillet sur un centre pour handicapés à Beit Lahia, dans le nord du
territoire. Ola Washahi, 30 ans, et Shua Abu Saada, 47 ans, décrites
comme handicapées physiques et mentales sévères, avaient péri et leur
centre détruit.
La directrice, Jamila Alaywa, s'est tournée vers al-Mezan. "Nous
réclamons justice, même si cela doit prendre des années au tribunal,
dit-elle. Nous ne sommes pas pressés".
(31-03-2015)
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