Au moins 142 personnes ont été tuées vendredi à Sanaa dans un triple
attentat-suicide contre deux mosquées fréquentées par des Houthis, la
milice chiite qui s'est emparée du pouvoir dans la capitale yéménite. Le
groupe État islamique a revendiqué cet attentat qui est l'un des plus
sanglants à frapper la capitale du Yémen, pays déstabilisé par une grave
crise interminable attisée par les Houthis et les djihadistes sunnites
d'Al-Qaïda, deux groupes hostiles au pouvoir du président Abd Rabbo
Mansour Hadi.
Si ces nouveaux attentats à Sanaa n'ont pas été revendiqués dans
l'immédiat, la technique de l'attaque-suicide rappelle le mode
opératoire du réseau Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa), ennemi
juré des Houthis et implanté dans le sud et le sud-est du pays. En fin
de matinée, une première bombe a explosé à la mosquée Badr, dans le sud
de Sanaa, suivie d'une autre à l'entrée de ce même lieu de culte au
moment où les fidèles prenaient la fuite, selon des témoins. Le
troisième attentat a visé une mosquée du nord de la capitale. Les
Houthis prient dans ces mosquées.
La télévision Al-Massira, contrôlée par les Houthis, a affirmé que les
hôpitaux de la capitale réclamaient en urgence des dons de sang. Sur les
lieux, des corps déchiquetés et ensanglantés étaient transportés sur
des brancards. Des traces de sang étaient visibles sur le sol jonché de
débris.
Les attaques sont les plus sanglantes depuis la prise du pouvoir de
Sanaa par les Houthis début février. Le dernier attentat
particulièrement sanglant dans la capitale remonte au 7 janvier (40
morts) et avait visé l'académie de police de Sanaa. Depuis
l'insurrection populaire de 2011, dans le sillage du Printemps arabe,
qui a poussé au départ le président Ali Abdallah Saleh, le pouvoir
central a été marginalisé par les Houthis et Aqpa qui ont accru leur
influence, tout en se livrant une guerre sans merci.
Preuve de l'affaiblissement du pouvoir, Hadi, le président
internationalement reconnu, a dû s'installer à Aden, principale ville du
Sud, après avoir fui en février Sanaa où il était assigné à résidence
par la milice chiite. Mais, même là, il ne semblait guère en sécurité
puisque son palais présidentiel a été visé jeudi par un raid aérien,
selon une source de sécurité. Hadi a été évacué vers un "lieu sûr", mais
il n'a pas quitté le pays", a déclaré une source de la présidence.
Des affrontements avaient éclaté avant ce raid à Aden entre les unités
d'un général rebelle, Abdel Hafez al-Sakkaf, et des membres des "comités
populaires" (supplétifs de l'armée) fidèles à Hadi, faisant 11 morts,
selon des sources de sécurité. Les troupes fidèles au président ont
réussi à reprendre le contrôle d'Aden. Dans un communiqué, le président a
fait état de "l'échec d'une tentative d'un putsch" et appelé les forces
armées à "refuser toutes les directives de Sanaa".
Le général Hafez, dont les liens sont avérés avec les Houthis et
l'ex-président Saleh, a fui Aden après les combats pour se rendre à
Sanaa, mais son convoi est tombé dans la nuit dans une embuscade, selon
un responsable militaire. "Il a échappé à une tentative d'assassinat,
mais son garde du corps a été mortellement touché par les balles alors
que trois autres sont morts lorsque leur véhicule s'est retourné",
a-t-il ajouté, sans préciser où se trouvait actuellement le général
rebelle.
Le général Sakkaf, qui refuse un ordre de limogeage de Hadi, est à la
tête d'une unité des forces spéciales comptant 1 000 à 2 000 hommes,
lourdement armés. La situation était calme vendredi à Aden où les forces
loyales au président Hadi ont renforcé leur contrôle, en multipliant
les barrages routiers, selon des correspondants de l'AFP. Le mouvement
Ansaruallah, autre nom pour les Houthis, qui est soupçonné d'avoir le
soutien de l'Iran, a déferlé en septembre 2014 à Sanaa puis étendu son
influence vers l'ouest et le centre du Yémen. S'il a rencontré peu de
résistance de la part des forces gouvernementales, il en est tout autre
avec Aqpa qui a revendiqué depuis septembre de nombreux attentats contre
les Houthis. Aqpa est considéré comme la branche la plus dangereuse
d'Al-Qaïda.
Les espoirs suscités par l'ouverture d'un dialogue destiné à sortir le
Yémen de la crise, parrainé par l'ONU, sont quasiment morts et les
observateurs évoquent un sérieux risque de guerre civile.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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