L'ONU a réaffirmé dimanche son soutien à l'unité du Yémen et à son
président retranché à Aden au moment où la milice chiite des Houthis
appelait "à la mobilisation générale" pour soutenir sa progression vers
le sud de ce pays en pleine déliquescence.
Dans une déclaration unanime à l'issue d'une réunion d'urgence à New
York, le Conseil de sécurité a réitéré son appui au président Abd Rabbo
Mansour Hadi et agité une vague menace de sanctions contre les Houthis.
Il appelle également "tous les Etats membres à s'abstenir de toute
ingérence qui attiserait le conflit et aggraverait l'instabilité", une
référence apparente mais implicite à l'Iran accusé de soutenir les
Houthis.
Le président Hadi est pour sa part appuyé par les monarchies sunnites du Golfe, dont l'Arabie saoudite.
S'adressant au Conseil par vidéo-conférence depuis le Qatar, l'émissaire
de l'ONU Jamel Benomar a prévenu que le Yémen s'acheminait vers "une
guerre civile" et risquait la "dislocation".
Sur le terrain, les miliciens chiites progressaient vers le sud du Yémen
en prenant l'aéroport de Taëz, troisième ville du pays située sur la
route entre la capitale Sanaa (nord), où ils ont pris le pouvoir en
début d'année, et Aden, la principale ville du sud où est retranché M.
Hadi.
Dans
un discours télévisé, le chef de la milice chiite Abdel Malek al-Houthi
a invité "le grand peuple du Yémen (...) à la mobilisation générale" et
à s'enrôler dans sa milice, justifiant l'avancée de ses combattants
vers le sud au nom de la lutte contre les extrémistes sunnites
d'Al-Qaïda et du groupe Etat islamique (EI).
Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa), bien implantée dans le sud
du Yémen, est considérée comme la branche la plus dangereuse du réseau
mais l'EI a revendiqué vendredi ses premiers attentats au Yémen, des
attaques suicide ayant visé deux mosquées de Sanaa fréquentées par des
Houthis et fait 142 morts.
M. Houthi a également tiré à boulets rouges sur le président Hadi,
l'accusant d'être "une marionnette aux mains des forces du mal,
conduites par les Etats-Unis" et de fomenter un complot "financé par
l'Arabie saoudite et le Qatar".
Samedi, M. Hadi avait appelé l'armée à "refuser toute directive émanant
de Sanaa (sous contrôle des Houthis)", et promis de tout faire pour que
"le drapeau de la République du Yémen flotte sur les montagnes de Maran
(bastion des Houthis dans le nord du pays, NDLR), et non pas le drapeau
iranien".
Le Yémen semble désormais au bord d'une guerre civile à caractère
confessionnel, alors que le dialogue politique parrainé par l'émissaire
de l'ONU Jamal Benomar est bloqué.
Forts du soutien de militaires restés fidèles à l'ex-président Ali
Abdallah Saleh (au pouvoir de 1978 à 2012), les Houthis semblent bien
décidés à avancer vers Aden, où est retranché M. Hadi depuis sa fuite en
février de Sanaa.
La conquête de Taëz permettrait aussi aux Houthis d'avancer vers le
détroit stratégique de Bab al-Mendeb, à l'embouchure du Golfe d'Aden et
de la mer Rouge, une importante voie maritime pour le commerce
international.
A Taëz, des milliers de personnes sont sorties dans les rues pour
protester contre la progression des miliciens Houthis, qui ont tiré à
balles réelles tuant un manifestant et en blessant cinq autres, selon
des militants.
Quelque 300 Houthis en tenue militaire et des soldats se sont déployés
dans l'enceinte de l'aéroport de Taëz. Des renforts étaient en route en
provenance de Sanaa, à 250 km au nord, a précisé à l'AFP une source
aéroportuaire.
"Ces soldats sont partisans de l'ancien président Saleh" qui, trois ans
après son départ du pouvoir sous la pression de la rue, reste influent
au sein de différents corps d'armée, a expliqué à l'AFP une source
militaire.
Face à la progression des Houthis, Aden se prépare.
Selon
des sources de sécurité et militaire, les forces loyales au président
Hadi, soutenues par des tribus et des membres des "comités populaires"
(supplétifs de l'armée), se sont employées à renforcer les défenses
autour de la ville.
Ces forces établissaient notamment une ceinture de sécurité à la
périphérie de la grande ville du sud, où des soldats, "soutenus par une
quarantaine de chars de combat, ont été déployés", a déclaré à l'AFP une
source militaire.
(22-03-2015)
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